En quête d'une AOC, le pérail part à l’assaut des palais parisiens

  • En 2013, le volume du pérail commercialisé avec le logo de l’association («Identité pérail») a frôlé la barre des 1000 tonnes.
    En 2013, le volume du pérail commercialisé avec le logo de l’association («Identité pérail») a frôlé la barre des 1000 tonnes. JB
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Jérémy Beaubet

Fromage. Ce trésor des causses sera l’invité d’honneur de l’espace Aveyron au prochain Salon de l’agriculture. Un coup de pouce médiatique qui vise à accélérer l’obtention tant espérée de l’AOC.

Sur les causses et terres rouges du Sud-Aveyron, on a toujours mangé du pérail. Longtemps considéré comme un fromage vivrier, on le fabriquait jadis dans des péralhièra, ces éviers en pierre qu’on trouvait dans toutes les fermes du coin.

À partir des années 1970, l’agriculture locale s’est mise à produire pour vendre et le succès du roquefort a failli éclipser à jamais ce trésor dégusté dans les cours de récréation. Il est évident que sans la volonté de quelques hommes très profondément attachés à leur territoire, le pérail n’existerait plus que dans nos souvenirs d’enfance.

Une filière qui emploie 140 salariés

Parmi ses principaux défenseurs, Jean-François Dombre fait figure de personnage central, même s’il s’en défend. À la tête de la célèbre fromagerie des Cabasses située sur les monts ventés de Verrières, cet agriculteur préside l’Association de défense et de promotion de ce doux fromage au lait de brebis caillé et moulé à la main.  "Cette association, créée en 1994, regroupe actuellement 200 producteurs locaux de lait, souligne-t-il avec une certaine fierté. Elle fait vivre aussi 140 salariés qui transforment le pérail dans divers ateliers de la région (Lactalis, Papillon, les Bergers du Larzac, NDLR). Ce que je veux dire par là, c’est que ce fromage n’a rien de marginal et contribue à faire vivre notre département."

Pour lui, comme pour tous les adhérents de l’association, la reconnaissance "des efforts fournispasse désormais par l’obtention de l’AOC. Une bataille "longue et difficile" que l’association a perdue en 2012 mais qu’elle entend gagner avec le soutien des élus politiques de l’Aveyron. Et ces derniers l’ont bien compris: mardi 11 février, c’est sur les terres de Jean-François Dombre, "au bon air" donc, que le président du conseil général, Jean-Claude Luche, et le président de la chambre d’agriculture, Jacques Molières, sont venus dévoiler le programme des animations prévues sur le stand de l’Aveyron lors du prochain Salon de l’agriculture. À cette occasion, la filière du pérail sera spécialement mise à l’honneur le 25 février, lors de la grande journée aveyronnaise, et profitera ainsi d’une vitrine exceptionnelle à l’entrée du pavillon consacrée à l’élevage des ovins.

Cette mobilisation institutionnelle en faveur de l’AOC, qui n’est rien d’autre que du lobbying, Jean-François Dombre a tenu à la saluer. "Je pense que notre association est allée au bout du dossier technique et a su apporter toutes les réponses dont a besoin l’Institut national de l’origine et de la qualité (NDLR, l’Inao, l’organisme chargé de la labellisation). Désormais, poursuit-il, c’est à vous, les médias, mais surtout à vous, les hommes politiques, qui représentent le peuple de notre région, de prendre le relais. Le fait que tout le monde se range derrière nous, c’est capital. Ça ne pourra que déboucher sur du bon. Cette AOC, je suis sûr qu’on va arriver à l’avoir" 

Une douceur locale désormais expédiée partout en Europe

Bien évidemment, le pérail n’est pas la seule production fromagère à l’espérer. Dans l’Hexagone, les postulants à l’appellation sont nombreux et ça peut se comprendre, tant elle booste les ventes. "L’appellation est un gage de qualité pour les consommateurs. Elle apporte un plus en terme de notoriété, tant sur le marché national qu’à l’export", considère Jean-François Dombre. Qui y voit un autre avantage, plus local: "En l’obtenant, dit-il, celle-ci va obliger certains faiseurs de pérail de la région à adhérer à notre association et à notre cahier des charges, ce qui devrait augmenter la production d’une centaine de tonnes par an. À moins d’arrêter de produire, ils ne pourront pas y déroger." 

En 2013, le volume du pérail commercialisé avec le logo de l’association («Identité pérail») a frôlé la barre des 1000 tonnes. Expédié partout en France, le pérail trouve également son public en Belgique, en Espagne, en Italie et même au Japon et au Québec. Une réalité économique d’autant plus belle qu’il y a vingt ans seulement, cette douceur locale, alors confinée aux laits de fin de lactation, faillit disparaître à jamais de la carte des saveurs...

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