Thomas Macpherson, l'homme qui sauta en kilt sur l'Aveyron

  • Ecossais et fier de l'être, Thomas Macpherson a été anobli par la reine d'Angleterre. Tous ceux qui le connurent ou le croisèrent, dans le maquis de l'Aveyron, du Cantal ou du Lot, savent qu'il est déjà un personnage de légende.
    Ecossais et fier de l'être, Thomas Macpherson a été anobli par la reine d'Angleterre. Tous ceux qui le connurent ou le croisèrent, dans le maquis de l'Aveyron, du Cantal ou du Lot, savent qu'il est déjà un personnage de légende. Repro CP
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Centre Presse Aveyron

Histoire. Héros de la Seconde Guerre mondiale, Sir Thomas Macpherson est décédé à Londres, le 6 septembre 2014 à l'âge de 94 ans. Personnage haut en couleurs, anobli par la reine d'Angleterre pour ses hauts faits d'armes, il a négocié en Aveyron la reddition des Allemands de Rueyres, en 1944. Cinquante ans plus tard, en septembre 1994, un journaliste a interviewé pour Centre Presse ce "personnage de légende". 

Héros de la Seconde Guerre mondiale, Sir Thomas Macpherson est décédé à Londres, le 6 septembre 2014 à l'âge de 94 ans. Personnage haut en couleurs, anobli par la reine d'Angleterre pour ses hauts faits d'armes, il a négocié en Aveyron la reddition des Allemands de Rueyres, en 1944. Cinquante ans plus tard, en septembre 1994, un journaliste a interviewé pour Centre Presse ce "personnage de légende".  

Les négociations pour la reddition de la garnison allemande qui tenait le centre d'interconnexion électrique de Rueyres, sur la commune de Brommat, furent menées, entre autres, par deux officiers alliés : l'un, un Ecossais, Thomas Macpherson, chef de la mission interalliée Jedburgh-Quinine, et l'autre, André Cheix, un Français qui commandait la compagnie André.

Tous deux avaient été parachutés début juin 1944 sur le maquis de la Luzette, en limite du Lot et du Cantal. Cinquante ans après, nous les avons retrouvés. Ils nous racontent d'où ils venaient et comment se passa la reddition de Rueyres. 

Dans la nuit du 7 au 8 juin 1944, le chef d'une mission interalliée, Thomas Macpherson, un Ecossais âgé alors de 23 ans, atterrit en kilt sur un terrain du maquis de la Luzene, à cheval sur les communes lotoises de Sousceyrac et de Labastide -du-Haut-Mont, et cantalienne de Saint-Saury.

Pourquoi avoir atterri en kilt ?

D'abord parce que cela fait partie de l'uniforme de mon régiment. Ensuite pour montrer aux résistants que l'on passait d'une période de lutte clandestine à une autre, plus agressive.

Quelle mission deviez-vous remplir ?

 Nous devions couper les voies de communication entre le sud et le nord, créer le plus de troubles possible dans une zone la plus large possible pour retardes les Allemands. Cela s'inscrivait dans la stratégie des débarquements de Normandie, qui avait eu lieu, et de Provence, à venir. J'ai été parachuté en même temps que Michel de Bourbon-Parme, qui représentait la France dans cette mission, et ma radio, Arthur Brown, Anglais comme moi. Nous venions d'Alger mais nous avions été formés à la lutte de guérilla dans un camp d'entraînement interallié, au nord de Londres. Le sergent Brown était en relation régulière avec Londres et me tenait au courant de la situation tant dans le Cantal que dans l'Aveyron, le Lot, la Corrèze et la Dordogne.

Il vous fallait donc un moyen de locomotion rapide pour Intervenir en fonction des renseignements recueillis. Comment faisiez-vous pour circuler ?

J'ai d'abord eu un camion à gazogène, puis une Peugeot 202 et enfin une Traction avant Citroen, que nous prîmes à la milice (1). Pout le gazogène, le chef du maquis de la Luzette, Bernard Cournil, était garagiste au Rouget (Cantal). Il était en contact avec les mineurs de Decazeville qui échangeaient le gazogène qu'ils stockaient contre des armes, parachutées à la Luzette

On vous attribue la paternité de nombreux sabotages, comme celui du pont de Coursavy, sur le Lot. En avez-vous fait sauter beaucoup.

Pas mal, mais comme je ne tenais pas de journal, je ne pourrais vous certifier lesquels. Le rythme était environ de trois opérations par semaine.

Vous avez négocié la reddition de la garnison allemande qui occupait le centre d'interconnexion électrique de Rueyres. Dans quelles conditions ?

Les Allemands tenaient une position forte, avec des mitrailleuses et plusieurs batteries de camions antiaériens. Ils contrôlaient le barrage de Sarrans qu'ils pouvaient saboter, noyant toute. la vallée. Sur place, je pouvs compter sur un compagnon, un chef résistant qui avait comme nom dc code Christian (2). La première chose fut de faire croire aux Allemands que nos forces étaient supérieures aux leurs. Nous avons utilisé un petit stratagème. nous avons enveloppé la partie avant des mitraillettes Sten, que nous avions, avec d'épais vêtements mouillés. Cela a pour effet d'en changer le son et dc faire croire à de grosses mitrailleuses. Et cela pouvait raisonnablement être convaincant. Mais j'étais aussi en uniforme militaire anglais (3) et je crois que, sans doute, ce fut le point crucial qui persuada le commandant allemand de se rendre en échange d'un bon traitement

La guerre ne fut pas finie pour autant. Comment se passa-t-elle pour vous ?

Alors que je rejoignais Vichy, avec mon chauffeur et deux résistants, pour apprécier ce qu'il fallait y faire, peu avant la libération de la ville, nous apprîmes que Lavai, premier ministre du maréchal Pétain, venait d'en partir dans une Mercedes blindée. Nous l'avons poursuivi et nous avons trouvé sa voiture en panne. Laval avait pu en trouver une autre seuier ,ent une demi-heure avant. Nous aurions bien pu le capturer, auquel cas je ne suis pas sûr que j'aurais su quoi en faire, mais en fait, nous sommes tombés dans une embuscade et ma voiture fut mise hors d'état d'avancer. Et c'est peut-être aussi bien ainsi.

Et par la suite ?

Comme à Rueyres, j'ai assisté à la reddition du major général allemand Elster, qui commandait une colonne de 7000 hommes bien équipés et de 16000 hommes des troupes d'occupation, à pied ou à cheval, qui se repliaient de la côte Atlantique pour rejoindre l'Allemagne. Un compagnon anglais, le capitaine Cox, menait la négociation et je suis arrivé en kilt, avec un officier de carrière, le major Sarazin, qui avait été envoyé après la libération de Toulouse. Notre présence en uniforme militaire fut, à son avis, décisive car ils voyaient qu'ils avaient en face d'eux une armée régulière. En effet, la seule condition d'Elster était qu'ils ne soient pas livrés aux FFI.

Quand êtes-vous retourné en Angleterre, après la guerre ?

Seulement à la fin de septembre 1945. Auparavant, après le Centre dé la France, j'allais à Marseille puis je menais une autre opération similaire dans le nord de l'Italie.

Propos recueillis en septembre 1994 par Manuel Rispal, 50 ans après la reddition des Allemands à Rueyres. 

  1. Un autre témoignage indique qu'il circulait aussi derriere la moto de Bernard CourniL 
  2. Il s'agissait de Hoazeau. La négociation ad lieu les 19 et 20 soOt 1944. Dana son livre «Le Cantal de 1939 à 1944; les troupes allemandes à travers le Massif Central», aux Editions De Borée, Eugène Maures consacre deux pages la reddition de Rueyres. 
  3. Rappelons qu'il était en kilt.
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