Martin Malvy : «Cette grande Région aura une force de frappe décuplée»

  • Martin Malvy «En Aveyron, nous n’avons pas toujours été d’accord, mais on y est toujours arrivé».
    Martin Malvy «En Aveyron, nous n’avons pas toujours été d’accord, mais on y est toujours arrivé». JAT
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Philippe Routhe

Région. Dans quelques mois, à presque 80 ans, Martin Malvy, après dix-sept années de présidence, mènera la Région Midi-Pyrénées vers la grande région qu’elle formera avec le Languedoc-Roussillon. L’occasion d’évoquer avec lui sa vision de l’avenir et le travail effectué durant toutes ces années.

Dans quelques mois, à presque 80 ans, Martin Malvy, après dix-sept années de présidence, mènera la Région Midi-Pyrénées vers la grande région qu’elle formera avec le Languedoc-Roussillon. L’occasion d’évoquer avec lui sa vision de l’avenir et le travail effectué durant toutes ces années.

C’est un peu votre dernière tournée dans les départements de Midi-Pyrénées, avec ces contrats de plan.

Non, je vais encore faire le tour des départements. Mais j’essaye, tout comme Damien Alary dans le Languedoc-Roussillon, de tout bien mettre en œuvre pour la transformation de ce territoire. L’action publique ne supporte pas les interruptions. Il faut assurer le passage et l’on s’y emploie. Nous faisons le nécessaire pour que les contrats soient passés avec les PETR, les métropoles, les espaces constitués pour gérer les fonds Leader. Je veux permettre une continuité des politiques. J’ai effectué la même démarche dans les huit départements de la Région.

Avant la création de la grande région, avez-vous veillé d’une manière ou d’une autre à préserver un certain équilibre ?

Nous ne sommes pas dans des politiques identiques. Il faudra le temps de l’harmonisation. Il faudra le temps de la réflexion à cette nouvelle assemblée pour développer sa politique territoriale.

Quelle identité voyez-vous se dégager pour cette grande région ?

Déjà, elle est historique. C’est l’histoire du Languedoc, du temps où les décisions se prenaient à Toulouse et l’intendance était assurée à Montpellier. Demain, cette Région va devenir un grand pôle de la France, participant à la structuration du pays, qui sera situé au sud de Rhônes-Alpes Auvergne, voisin de Paca et de l’Aquitaine et frontalier avec la Catalogne.

Elle sera dotée d’un patrimoine riche, avec de nombreux sites classés à l’Unseco, du Pont-du-Gard à Gavarnie. Et ce sera une véritable puissance agroalimentaire et économique. Première exploitation ovine, première production de blé noir, première production viticole mondiale. Cela, sur une superficie équivalente à l’Autriche ou au Benelux.

Cette région sera une force de frappe exceptionnelle sur le plan universitaire et de la recherche, avec Toulouse et Montpellier, et vingt sites universitaires dans toute la région. En passant au 20rang sur 270 régions, cette grande Région aura une force de frappe décuplée.

Ce qui confère de grandes responsabilités

En effet. C’est un beau projet à organiser dans l’équilibre. Nos amis languedociens craignent parfois d’être absorbés par Midi-Pyrénées. Mais il n’y aura plus de Midi-Pyrénées ! Il y aura deux métropoles, qui auront naturellement intérêt à défendre leur développement pour défendre leur place sur le plan européen ou mondial. La Région devra veiller à tout cela mais également assurer le développement de tout le territoire.

Vous auriez aimé présider cette grande région ?

Oui ! J’ai d’ailleurs beaucoup hésité. Mais trois mandats à la tête de Midi-Pyrénées, c’est déjà long. À la création de la nouvelle assemblée, je me serai présenté à un âge un peu trop prononcé au regard de certains concitoyens. Ceux qui me connaissent me disent que j’aurai pu y aller, ceux qui ne me connaissent pas, notamment les jeunes générations, n’auraient pas trouvé cela très enthousiasmant.

Puis il y a eu la candidature de Carole Delga, que je connais très bien. Maire de Martre-Tolosane, je l’avais sollicitée pour se présenter à la région, où elle a été vice-présidente. Elle m’a dit que si je n’y allais pas, elle se présenterait. Et je trouve qu’elle ferait une très bonne présidente de Région. Elle connaît bien le fonctionnement des collectivités, les rouages des institutions.

Revenons à votre action au cours de vos 17 années de présidence. Comment avez-vous trouvé le travail avec les Aveyronnais ?

Cela s’est globalement bien passé. Nous n’avons pas tout le temps été d’accord, certes, mais on y est toujours arrivé. Le fait qu’il y ait une opposition politique, que ce soit Jean Puech ou Jean-Claude Luche, n’a pas empêché le soutien du territoire. Je faisais encore remarquer aux élus que le département de l’Aveyron a été le premier bénéficiaire des fonds européens.

J’ai par exemple fait inscrire Rodez dans les trois contrats de plan pour le schéma universitaire. On peut aussi évoquer le réseau ferré, qui sera refait à neuf entre Toulouse et Rodez, entre Brive et Rodez. Ce n’est pas une paille cela ! Idem pour la RN88, pour laquelle depuis 1998 la Région a débloqué 158 millions d’euros. Je me suis d’ailleurs fixé comme objectif que tous les chefs-lieux de Midi-Pyrénées soient reliés à la métropole en 2x2 voies. Ce sera fait.

Cela traduit votre souci d’équité, semble-t-il.

J’y ai toujours veillé. Je ne conçois pas que l’on fasse de la politique en donnant à ceux qui sont de la même couleur que vous et en oubliant les autres. Je le dis souvent : ce que nous gérons ne nous appartient pas.

Pas loin de Toulouse, à Barcelone, le mouvement Podemos s’impose. Cela vous inspire quoi ?

L’histoire de l’Espagne et de la Catalogne en particulier n’est pas la même que la nôtre. Ce qui m’interpelle, c’est la défiance à l’égard des politiques. On est en situation de crise. Ou plutôt de rhumatisme long, avec de profonds bouleversements de nos sociétés. C’est structurel. La conséquence de cette réalité, c’est les difficultés économiques que nous n’avons pas appréhendées les années précédentes.

Tenez, le chemin de fer. J’avais demandé un audit il y a quelques années. Sur la première page il y avait écrit: réseau en fin de vie. Il date d’un siècle et rien n’avait été fait dessus depuis plus d’une vingtaine d’années. Idem pour l’industrie. Depuis le choc pétrolier de 1973, la situation se délite. Je suis très critique, mais pas polémique, sur les deux mandats de Jacques Chirac et celui de Nicolas Sarkozy, car aucun effort de redressement économique n’a été entrepris.

La France s’est laissée aller. Il faut avoir le courage de réformer le pays. Il faut du temps aussi. Et l’on peut comprendre qu’aujourd’hui, les citoyens, à gauche ou à droite, n’y croient pas. Mais même Podemos en Espagne ou Tsipras en Grèce n’ont de solution magique. Cela va prendre du temps. Ce qui est sûr c’est que lorsque l’économie repartira, la grande région, avec ses atouts, sera en tête de la reprise. 

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