Gardarem lo Larzac : quarante ans d’engagement au service d’un idéal

  • Gardarem lo Larzac compte aujourd'hui 1 250 abonnés.
    Gardarem lo Larzac compte aujourd'hui 1 250 abonnés. Centre Presse
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Joël Born

Militantisme. Porté par une équipe de bénévoles, le journal du Larzac solidaire a traversé des hauts et des bas. Mais il est toujours là, 40 ans après sa création. Au service des combats pour la Terre et l’environnement.

Depuis plus de 40 ans, la lutte des paysans du Larzac, qui aboutit, en 1981, à l’abandon du projet d’extension du camp militaire par François Mitterrand, reste gravée dans la mémoire collective. Symbole concret et toujours vivant de cette vaste mobilisation, de ce combat (et de cette victoire des citoyens contre l’État), Gardarem lo Larzac, le journal du Larzac solidaire vient de souffler ses quarante bougies. Hasard du calendrier, ironie de l’histoire, au même moment, l’annonce de l’installation de la Légion étrangère, dans le camp du Larzac, relance le débat et provoque de nouveaux remous dans le Sud-Aveyron.

À l’école de la non-violence

Quarante ans qu’on sème. Sous ce titre, Solveig Letort a signé l’éditorial de ce numéro (324) anniversaire du journal militant. Cette quinquagénaire, élevée à l’école de la non-violence et formée à l’ethnosociologie, a grandi sur le Larzac, aux côtés de ses parents, André, un psychomotricien, tendance PSU, et Anne-Marie, une artiste peintre, tombée sous le charme des lieux.

Après être allée voir si l’herbe était plus verte ailleurs, Solveig s’est installée définitivement à La Couvertoirade, en 1995, où elle vit, en compagnie de ses filles, Manon, 20 ans, et Gabrielle, 16 ans. Près de sa mère. Animatrice touristique, auteur de Le Larzac s’affiche, préfacé par Stéphane Hessel, elle participe au comité de rédaction de Gardarem lo Larzac, depuis une quinzaine d’années.

Comment ce modeste journal a-t-il survécu à autant d’années ? « Logiquement, le journal aurait dû s’arrêter en 1981, mais il y avait eu tellement de solidarité qu’il n’était pas possible d’en rester là. C’est assez formidable, quand on sait que ce sont des bénévoles qui maintiennent la flamme », explique Solveig.

Après avoir connu des hauts et des bas, le bimensuel, qui fut de tous les combats pour la Terre et l’environnement, a retrouvé un second souffle, après la sortie du film Tous au Larzac, en 2011. Il compte aujourd’hui 1 250 abonnés. En France et partout dans le monde. Des anciens, un brin nostalgiques des grandes luttes passées de l’après Mai 68, mais aussi des jeunes, qui « ont besoin de voir autre chose. De trouver du sens.» « À un moment donné, il faut pouvoir se poser, avoir une analyse différente. »

Composé de sept bénévoles, le comité de rédaction de GLL se réunit une fois par mois. « C’est toujours un peu la même maquette, du local à l’international, avec des contributions extérieures qui nous ouvrent de nouveaux horizons. »

L’esprit du Larzac

Près de 45 ans après le Serment des 103 paysans, contre l’extension du camp militaire, l’esprit du Larzac est resté vivace. Pour Solveig, c’est aussi l’expression de la ruralité. « Nous ne sommes pas nombreux. Tout seul, on meurt. Chacun est obligé de mettre un peu d’eau dans son vin, de maintenir le dialogue, résume-t-elle. Cela nous oblige à accepter les différences. On peut ne pas être d’accord mais on en discute. »

Si elle se revendique de la mouvance altermondialiste, elle ne met pas pour autant des œillères. Et sa position sur l’arrivée programmée de la Légion est plutôt nuancée. « C’est un symbole fort. Je comprends que les gens qui se sont bagarrés à l’époque le vivent mal mais c’est beaucoup moins violent que dans les années 70. Le terrain militaire est là, après tout ils font ce qu’ils veulent chez eux. Je partage plutôt l’avis de José Bové, du moment qu’il n’y a pas d’extension et que l’on essaie d’instaurer le dialogue. Il faut savoir construire, on ne peut pas être toujours opposé à tout. Le Larzac ne nous appartient pas. Il faut aussi laisser aux habitants la possibilité d’aménager ce territoire. »

Solveig Letort défend notamment l’idée de la création d’une cité scolaire, d’un collège sur le plateau. « C’est une opportunité, un rendez-vous historique », insiste-t-elle rappelant que, tous les jours, 200 gamins du Larzac, descendent à Millau. « C’est un pari sur l’avenir qu’il faut oser tenter avec les élus. En évitant, bien sûr, de concentrer tous les Légionnaires à La Cavalerie. »

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