Rugby : avec Tahiti, Ralph Teriitaohia a vécu son Mondial à lui

  • Ralph Territahoa sous les couleurs de Tahiti.
    Ralph Territahoa sous les couleurs de Tahiti. repro CP
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Mathieu Roualdés

Hors-cadre. Bien loin de Londres et de l’effervescence autour de la Coupe du monde qui s’y déroule, le 2e ligne ruthénois Ralph Teriitaohia vient de vivre son Mondial à lui avec la sélection tahitienne, 97e nation mondiale. Récit de cette expérience "extraordinaire".

Tahiti, son récif de corail, ses sensuelles «vahinés», ses pirogues et sa sélection nationale de...rugby ! Bien loin de l’Angleterre et de l’effervescence autour de la coupe du monde qui s’y déroule, l’île paradisiaque vient de disputer son Mondial à elle, l’Oceania Cup, face à ses voisins du Pacifique : la Papouasie-Nouvelle-Guinée, les Samoa Américaines et les Îles Salomon. Ne nous demandez pas le pedigree ou encore les joueurs stars de ces formations, classées dans les bas-fonds du rugby mondial de la 95place à la toute dernière pour les Samoa Américaines... On peut juste vous citer un nom, celui de Ralph Teriitaohia.

Leader de Rodez depuis plusieurs saisons, le 2e ligne portait le brassard de capitaine de la sélection tahitienne lors de cette compétition, du 20 au 30 août dernier à Port Moresby, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Une juste récompense pour celui qui fut le premier joueur professionnel de l’île, lors de son passage à Aurillac au début des années 2000.

"Depuis que j’évolue en France, la Fédération souhaitait que je vienne jouer avec la sélection. Je n’ai jamais pu car cela demande du temps libre et de l’argent. On paye quasiment tout et le billet d’avion n’est pas donné. Mais je m’étais promis d’honorer une cape avant la fin de ma carrière", explique le gaillard. C’est désormais chose faite. Et à 34 ans, il n’est pas prêt d’oublier. Il avoue même avoir "le blues" lorsqu’il en parle aujourd’hui.

Marqué par la misère de Papouasie

Car plus qu’une simple compétition de rugby, c’est une véritable aventure humaine qu’il a vécue. "Je ne savais pas où je mettais les pieds en partant. En Papouasie, je m’attendais à du sable blanc et des cocotiers. Finalement, j’ai vu une misère terrible. Cela n’a rien de paradisiaque, c’est le Larzac avec des déchets! Cela m’a vraiment marqué", décrit-il pudiquement. Face à cela et une interdiction formelle de s’aventurer dans les rues de Port Moresby sans escorte, le rugby a donc naturellement repris le dessus. Ses valeurs avec. Celles du partage et de l’esprit d’équipe d’abord, à l’image de l’équipe qui s’est cotisée pour offrir de nouvelles chaussures à l’un des siens. Celles du respect et de la modestie aussi.

"J’ai été impressionné par l’humilité de tous les joueurs. Les locaux m’ont, avec les autres joueurs venant de France, merveilleusement bien accueilli. Personne ne bronche, ne se plaint. C’était facile d’être capitaine dans ces conditions...", souffle le Ruthénois. Même lorsque Tahiti souffre d’un arbitrage «maison» face aux treizistes papous, lors du match d’ouverture, personne ne bronche. Ce premier revers (32-10) est vite digéré et la valeur travail prend alors le relais. La sélection se débrouille pour trouver des terrains d’entraînement dignes de ce nom et répète inlassablement ses gammes dans le sillage de «captain’» Ralph. Tout cela ne va pas tarder à payer.

Car la deuxième journée du tournoi restera comme un moment historique pour cette jeune sélection. Alors qu’elle courait après un succès depuis plus de 10 ans, elle va déjouer tous les pronostics en s’imposant face aux Îles Salomon (36-12) et ses joueurs aux gabarits plus impressionnants les uns que les autres! Celui qui a quitté son village natal de Paeau pour Clermont- Ferrand-on vous laisse imaginer le choc thermique-, à 18 printemps-, n’est pas prêt d’oublier ce moment : "C’était extraordinaire. D’un coup, tout s’est enchaîné. La presse a commencé à nous suivre, toute l’île à nous supporter, nos matches étaient diffusés à la télévision... Bref, c’était fou."

La folie à Papeete

Pourtant, il n’avait encore rien vu! Car les Tahitiens ont réédité leur exploit lors du dernier match face aux Samoa Américaines (20-8), grâce notamment à un dernier essai de Teriitaohia. Insuffisant pour s’emparer de la première place offrant un ticket pour les qualifications au Mondial-2019 dans la zone Asie. Mais bien assez pour offrir une fierté incommensurable à tout un peuple. Le retour des Tahitiens sur leurs terres n’a fait que confirmer cela.

"Quand on est arrivé à l’aéroport de Papeete, il y avait une foule incroyable ! Tout au long de la semaine qui a suivi le tournoi, on a enchaîné les séances de dédicace sur l’île. Les sponsors nous ont logés dans des hôtels luxueux. J’ai même tourné des publicités pour certains. J’ai eu l’impression d’être champion du monde! Aujourd’hui, il y a ma tête sur de grands panneaux publicitaires au bord des routes de Tahiti", rigole encore le discret Teriitaohia qui n’aurait "jamais imaginé cela".

De retour en France depuis plusieurs semaines, Ralph Territahoa porte sur lui un souvenir indélébile de cette expérience. Celui d’un tatouage qui s’étend sur tout son bras gauche à la mode « maori », fruit de... 60 heures de travail! Pour le reste, le joueur a tout offert à des proches, des inconnus, histoire de s’inscrire un peu plus dans cette humilité et ce partage qui l’ont tellement marqué. "J’ai donné mon maillot à mon père. Je crois qu’il ne l’a pas quitté depuis, tellement il est fier", conclut-il, larmes aux yeux et frissons à fleur de peau.

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