«Un médecin sur cinq est en souffrance»

  • Pour Didier De Labrusse, il «faut arrêter de vouloir rapetasser le système de santé, sans écouter les professionnels.» 
Des professionnels qu’il dit très inquiets. Et, pour certains, en état réel de mal-être.
    Pour Didier De Labrusse, il «faut arrêter de vouloir rapetasser le système de santé, sans écouter les professionnels.» Des professionnels qu’il dit très inquiets. Et, pour certains, en état réel de mal-être. José A. Torres
Publié le , mis à jour
Joël Born

Alors que s’ouvre, aujourd’hui, la conférence de santé souhaitée par le Premier Ministre, Manuel Valls, le président du Conseil départemental de l’ordre des médecins, Didier De Labrusse, évoque le blues des médecins. Un profond malaise. 

Alors que s’ouvre, aujourd’hui, la conférence de santé souhaitée par le Premier Ministre, Manuel Valls, le président du Conseil départemental de l’ordre des médecins, Didier De Labrusse, évoque le blues des médecins. Un profond malaise.

Les médecins aveyronnais ont-ils eux aussi le blues ?

Le malaise est extrêmement profond. 20 % des médecins sont proches du « burn out ». Un médecin sur cinq est en souffrance. Cela devient très préoccupant. En Aveyron on le constate aussi et ce n’est pas spécifique aux médecins libéraux.

On retrouve également ce malaise chez les praticiens hospitaliers, avec des causes différentes. Les médecins libéraux n’en peuvent plus des contraintes administratives et des relations compliquées avec les caisses.

Pour les médecins hospitaliers, il y a beaucoup de contraintes d’autres natures. Depuis la loi HPST (Hôpital, patients, santé et territoires), c’est la disparition du pouvoir médical dans les hôpitaux. La gestion n’est plus qu’administrative et syndicale. [

Qu’entendez-vous par-là ?

Beaucoup de médecins ont le sentiment de ne pas être entendus. Et je n’ai pas le sentiment que la nouvelle loi a pris la mesure du problème. Nous sommes quand même l’un des seuls pays occidentaux où certains indicateurs du système de santé sont à la baisse. Beaucoup de professionnels sont très inquiets.

Comment expliquez-vous cette crise du système de santé ?

Les raisons sont extrêmement multifactorielles. Il y a plusieurs problèmes, un ensemble de phénomènes, le plus important étant que l’on vit toujours sous le règne des Ordonnances Debré. Le système libéral et le système public ne doivent pas se parler. Aujourd’hui, nous n’en avons plus les moyens. Dès que l’on dit ça, on se heurte, de tous les côtés, à des parti pris, des a priori.

Vous pensez donc, comme  la plupart de vos confrères, qu’il faut revoir l’organisation du système de santé ?

Actuellement, le système de santé est victime d’une complète désorganisation. N’importe qui peut refaire plusieurs fois le même examen. Dans les faits, le parcours de soins n’existe pas. Le système est contraint au niveau financier.

J’ai l’impression que la gestion de la santé est faite à trois mois. En ce moment, c’est la chasse aux arrêts de travail, après ça va être la chasse aux bons de transports... J’ai l’impression qu’il n’y a pas de vrai pilotage d’ensemble de la santé. Il faut que le Conseil national de l’Ordre des médecins devienne force de propositions. C’est le chemin qui est pris. 

En Aveyron, diverses mesures ont été prises pour essayer d’endiguer la désertification médicale. Peut-on dire, aujourd’hui, que la situation s’est sensiblement améliorée ?

En Aveyron, on a réussi à boucher les trous pour les généralistes, grâce au partenariat avec les internes, mais il y a un gros problème pour les autres spécialités.

La conférence nationale de santé, qui s’ouvre aujourd’hui, est boudée par les représentants des médecins libéraux. Quel est votre sentiment ?

Le système de santé est à bout de souffle. On a l’impression d’être les seuls à en avoir conscience. C’est un sacré chantier, mais il faut arrêter de vouloir rapetasser le système sans écouter les professionnels. On a encore l’impression que le monde politique veut arriver à régler le problème sans l’avis des professionnels. 

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