Affaire Wilson aux assises de l'Aveyron : Jean-Louis Cayrou face à ses contradictions

  • Jacques Lévy est l'avocat de Jean-Louis Cayrou.
    Jacques Lévy est l'avocat de Jean-Louis Cayrou. José A. Torres / Centre Presse Aveyron
Publié le , mis à jour
Philippe Henry

Justice. Au troisième jour du procès, l’accusé s’est longuement expliqué sur les faits.

Durant une grande partie de l’audience de mercredi matin -la matinée étant réservée au compte rendu des experts sur l’analyse des indices ADN- Jean-Louis Cayrou a pu donner sa version des faits de ce crime qu’il nie toujours catégoriquement.

"Je me relève avec les mains poisseuses"

Le jardinier s’est longuement expliqué sur cette soirée du 17 août 2012, date à laquelle a disparu l’Anglaise Patricia Wilson. Sur un ton calme et posé, Jean-Louis Cayrou raconte à la barre du tribunal, face au président Cayrol, comment et pourquoi il se rend chez Patricia Wilson ce soir-là. Il veut ainsi simplement l’inviter à Najac, où se tient la traditionnelle fête votive. Sur le chemin qui mène à la maison de Patricia Wilson, il affirme croiser un C15 blanc: "J’ai eu peur qu’il me casse le rétroviseur, je me serre sur le bas-côté, je vois que c’est un C15 blanc avec derrière un bout de bâche noire qui traîne."

"Il est à peu près 21h50 et je vais taper à la porte. Je crie. Pas de lumière, c’est bizarre. C’est fermé à clé", poursuit-il, d’un ton neutre. Puis, il se rend dans la buanderie, le grenier de la maison, là où les enquêteurs vont trouver d’importantes traces de sang. Entre-temps, Jean-Louis Cayrou décrit avoir tenté d’allumer la lumière qui ne fonctionne plus puisque le courant de la maison a été coupé. Il dit butter sur des objets au sol. Il comprend alors qu’il ne s’agit pas de Patricia. "Je continue à me demander ce qu’il s’est passé là. Je me relève avec les mains poisseuses." Ce qu’il croyait être de la lessive liquide est en réalité du sang. Celui de Patricia Wilson.

Devant le tribunal, Jean-Louis Cayrou confie être allé chercher une lampe frontale dans sa voiture. Puis, il décide de fouiller la maison à la recherche de la victime. "Je me dis qu’il faut que je sorte de cette maison, j’étouffe, j’ai du mal à réfléchir", plaide Jean-Louis Cayrou qui quitte peu après l’endroit du crime et rentre chez lui, dans sa caravane à Campels. Devant les juges, il donne cette version des faits durant un peu plus d’une heure trente. Se contredisant bien des fois, ajoutant de nouveaux éléments par rapport à ses précédentes déclarations.

"Vous n’avez pas entendu? Je suis in-no-cent!"

Pourquoi tant de versions contradictoires l’interroge le président Régis Cayrol ? "J’ai eu peur. Vous connaissez, la poule qui chante c’est la poule qui a pondu l’œuf. C’est moi qui a trouvé le sang on va dire que c’est moi le coupable", répond Cayrou. "Ne pensez-vous pas que cette peur qui vous empêche d’agir peut porter un autre nom?", le questionne le président. "Je suis terrorisé? -Non, c’est de la lâcheté", assène Régis Cayrol. L’avocate générale, Manon Brignol, après avoir démonté les théories du complot de Jean-Louis Cayrou, l’interpelle: "J’ai une dernière question. J’aimerais savoir ce que vous avez fait du corps de Mme Wilson?".

Jean-Louis Cayrou, déstabilisé, tapote sur le micro. "Il marche bien? Vous n’avez pas entendu? Je suis in-no-cent, in-no-cent!". "Réfléchissez bien. Vous avez encore six jours pour nous dire la vérité", lui rétorque l’avocate générale. À l’issue de cette confrontation, Me Jacques Levy son avocat, n’aura qu’une phrase: "Il n’y a rien de pire pour un avocat que de défendre un innocent car il se défend très mal et fait tout ce qu’il ne faut pas faire".

Lire aussi

Huit traces ADN de Cayrou dans le grenier

La matinée de mercredi a été consacrée à la lecture des rapports des experts en traces ADN. Le premier appelé à la barre, Laurent Tamisier, expert en empreintes digitales à l’Institut de recherches criminelles de la gendarmerie nationale, explique que dix objets ont été saisis avec des traces ensanglantées dans le grenier de la maison de Patricia Wilson. Neuf traces sont exploitables par les enquêteurs. Huit vont révéler les empreintes de Jean-Louis Cayrou, une de ces traces n’est pas exploitable. "Il y a une empreinte qui n’est pas identifiée. Je veux bien insister là dessus", a d’ailleurs fait remarquer son avocat, MLévy.

Ensuite, le Pr Doutremepuich, du laboratoire d’hématologie médico-légale de Bordeaux, énumère les indices prélevés sur la scène de crime et commente leur résultat. Le plus intéressant est sans doute que l’ADN mélangé de Patricia Wilson et de Jean-Louis Cayrou est retrouvé, dans la voiture de ce dernier, sur quatre objets différents: sur une éponge, un tissu, une corde et un cric. "Nous avons trois mélanges avec le profil de Jean-Louis Cayrou et des caractères inconnus sur objets prélevés dans la voiture", confirme le PDoutremepuich.

Confronté à ces éléments, Jean-Louis Cayrou nie toute implication dans la disparation de Patricia Wilson. Il va même clamer: "Je n’ai pas honte de dire qu’il y a eu manipulation", alors que l’avocate générale l’interroge sur la présence de sang dans le coffre de sa voiture. Puis il poursuit: "Ils n’ont rien dans le dossier, comme l’araignée tisse sa toile, ils ont monté leur piège". « Ils » englobe aussi bien les forces de l’ordre, que les avocats ou les magistrats, selon Jean-Louis Cayrou.

Voir les commentaires
Sur le même sujet
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?