Cyclisme, Etienne Fabre. Un après-midi glacial

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    Cyclisme, Etienne Fabre. Un après-midi glacial archives Jean-Louis Bories / Centre Presse Aveyron
Publié le , mis à jour
Maxime Raynaud

Croisé à maintes reprises depuis son plus jeune âge par le service "Sports" de Centre Presse, Etienne Fabre laisse un souvenir vivace... et un "vide insondable", dans l'esprit de notre journaliste, Maxime Raynaud. Un récit tout en émotion.

C’était un jour de juin 2013. Un de ces après-midis caniculaires où l’on cherche l’ombre comme un refuge. Toutes roues dehors, lui nous attendait sur le parking de Fontanges. Etienne Fabre n’était qu’un gamin de 16 ans mais de sa voix déjà grave, il nous avait excusé du retard. Puis nous avait expliqué qu’il roulait pour "prendre du recul, pour faire le point" et parce qu’il aimait "(se) faire mal".

Champion Midi-Pyrénées juniors, il avait ensuite passé sa tunique verte, blanche et rouge avant une séance photo sans rechigner. Il n’en était qu’aux prémices. Mais dans ce tout premier portrait, capturé sous un saule-pleureur comme on immortalise un premier rendez-vous, il y avait là un signe de ce qui l’attendait, du monde des pros d’AG2R qu’il osait à peine évoquer du bout de ses lèvres charnues.

Etienne Fabre était une tête bien faite et il ne changerait jamais. Avec lui, tout était étudié, quantifié, analysé. Cela pouvait passer pour de l’assurance mal placée mais c’était bien mal le connaître. Ado, il se rêvait dans la roue de son aîné Alexandre Geniez mais il répétait sans cesse "marche après marche".

Depuis ce premier rendez-vous, il n’avait jamais lâché cette prudence, ni cette foi en lui. Pas plus que son sac de cours qu’il trimballait alors sur son vélo, dans les rues pentues de Rodez, pour rejoindre le lycée Foch.

Combattant né

Etienne Fabre était un Aveyronnais pur souche, qui suait le labeur et la modestie jusque sur ses joues toujours rosies. "J’ai le temps", disait-il, sans dévier, plongeant son regard noir dans le nôtre alors qu’on le pressait pour qu’il confesse le péché mignon auquel il aspirait. Celui des grands sur leurs vélos rutilants qu’il regardait avec des yeux de Chimène.

Depuis plusieurs mois, il n’en avait jamais été aussi proche et franchissait invariablement les étapes dans son club de Chambéry tout comme dans sa formation d’ingénieur à l’Insa Lyon. Il n’avait pas oublié son berceau et apprenait à assumer. Ses ambitions comme son tempérament.

Un après-midi tout aussi caniculaire de juin 2015, de retour chez lui, on l’avait convié à tester la côte de Saint-Pierre, juge de paix de l’étape Muret-Rodez du Tour de France. Comme d’habitude, il avait sûrement accepté d’un "OK" grave, chuchoté au bout du fil. Mais tout en haut de ce mur "pas si fou" selon lui, étienne Fabre l’espoir avait été devancé d’un boyau par son "pote" Simon Boutonnet. "Dégoûté", il avait ruminé jusqu’au jus de pomme de récompense. Tout était dit. Ce n’était qu’un test mais en guerrier qui s’affirmait, il avait appris à haïr la défaite.

La dernière fois qu’on l’avait croisé, il nous avait répété combien il aimait la pluie, les pavés, la souffrance. "J’ai adoré !", s’était-il marré, repensant à son premier Enfer du Nord. À 20 ans, Etienne Fabre était un combattant né. Récemment, pour son père Yves, gravement accidenté, il avait confié à des proches penser à tout arrêter. Pour un autre combat. Il s’était finalement résolu à continuer de tourner les jambes. Pour son père, pour le vélo, pour lui. La vie avait continué.

Samedi, elle s’est arrêtée dans les Alpes. Un après-midi glacial. Pour un vide insondable.

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