"L'Aveyron n'est pas un désert médical"

  • Le docteur Didier De Labrusse est confiant pour l'avenir.
    Le docteur Didier De Labrusse est confiant pour l'avenir. Centre Presse
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Christophe Cathala

Président de l'Ordre des médecins, le docteur Didier de Labrusse est optimiste pour l’avenir de la médecine générale en Aveyron. Pour pallier les départs à la retraite des praticiens déjà installés, des solutions existent expliquent le président de l'Ordre, pour peu que l’on sache se mobiliser intelligemment pour convaincre les jeunes.

Dans le domaine de l’accès aux soins de premiers recours, les Aveyronnais sont-ils en danger ? En d’autres termes, la médecine générale offre-t-elle un maillage territorial suffisant pour rassurer les populations ? "Un désert médical, c’est un praticien tous les 30 km. C’est le cas en Thiérache ou en Picardie, où les infirmiers notamment en sont rendus à sillonner le pays en camionnette comme entre les deux guerres. Nous n’en sommes pas là en Aveyron" : pour Didier de Labrusse, toubib à Saint-Chély-d’Aubrac et président du conseil départemental de l’Ordre des médecins, notre département n’est pas un désert.

Trop de paperasse

Reste à savoir si les professionnels sont toujours aussi disponibles qu’on le souhaiterait comme en témoignent, en zones rurales surtout, de longues attentes dans l’antichambre des cabinets. "Il existe en effet un déficit entre le nombre de médecins et la consommation médicale en tant que telle. Mais utilise-t-on les médecins comme il le faut? Sur quinze minutes de consultation en moyenne, six minutes sont consacrées au diagnostic, le reste, c’est de la paperasse... Avoir une secrétaire, c’est une heure et quart de travail gagné par jour. Encore faut-il pouvoir la payer..."

D’accord, globalement l’Aveyron s’en sort plutôt bien. Mais demain ? Pour Didier de Labrusse, le risque demeure. "Les pouvoirs publics n’ont que deux raisonnements : il y a tant de départs à la retraite prévus donc tant de postes de formation ouverts aux médecins généralistes. Or, selon une enquête du conseil national de l’Ordre sur les cinq dernières années, seuls 8,5% des médecins généralistes ainsi formés s’installent en libéral. Les autres diplômés vont, notamment, dans les hôpitaux, ou choisissent le salariat au sein d’organismes ou d’entreprises. Si l’on ajoute à cet état de fait de nouvelles contraintes telles que l’obligation de s’installer sur un territoire donné, combien restera-t-il, sur ces 8,5%, de médecins libéraux à ouvrir un cabinet?".

Des repoussoirs à l’installation
Pourquoi cette appréhension à se lancer dans la bataille chez les jeunes médecins diplômés? Selon une enquête réalisée récemment par l’Isnar-MG (Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale), les conditions et les temps de travail difficiles à réguler, le peu de considération des caisses de sécurité sociale et la surmédiatisation de la mésestime des médecins en cas de problème sont, notamment, autant de freins à l’installation.

"La médecine de premier recours réunit toujours toutes les fautes, confirme Didier de Labrusse. Cela fait 40 ans que j’entends parler du médecin comme étant “responsable” de prescrire des médicaments inutiles, de contrarier la démographie médicale, etc. En parallèle, la médecine subit un blocage des prix. Et l’on ne trouve rien de mieux en haut lieu que de créer un “secteur 2”, c’est-à-dire 2,5 fois le tarif de la sécu pour “aider” les praticiens. Mais certainement pas les patients. Est-ce honnête et normal?"

Incitations financières Vs formation

Des aides, souvent assorties d’obligations, la profession, jalouse de sa liberté, n’en cherche pas. Elle souhaite pouvoir avant tout choisir son lieu d’installation. "Aux médecins installés de donner l’exemple aux jeunes : les endroits privilégiés en terme de démographie médicale sont ceux où les professionnels de santé ont retroussé leurs manches pour travailler... et donner envie aux jeunes de les rejoindre", explique le Dr de Labrusse qui, dans son Nord-Aveyron est devenu optimiste face à "la multiplication des efforts et synergies entre élus, médecins et organismes". Et a accueilli, comme d’autres de ses confrères, des étudiants et jeunes diplômés: "En Nord-Aveyron, on est tous maîtres de stage ou presque. En 2012, on a installé trois médecins. Deux sont partis à la retraite et nous avons huit engagements de service public, des étudiants qui ont une bourse et s’engagent à venir dans des zones défavorisées pendant un temps donné. Pourquoi? Parce qu’ils ont fait des stages ici. Et ils ont vu la qualité de vie dont ils pouvaient bénéficier. C’est cela qui fonctionne".

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