RN88: Baraqueville ne croit plus au contournement

Il y a celles qui n’en disent rien mais qui n’en pensent pas moins; il y a ceux qui vous regardent avec un sourire en coin ou qui soupirent profondément au terme de la question; il y a ceux enfin qui à peine la question posée se lâchent, et vous lâchent ce qu’ils ont sur le cœur. En résumé, le contournement de Baraqueville par la RN88 ne laisse personne indifférent dans la cité ségalie.
Initialement programmée en 2015, la mise en service de ce tronçon devrait largement -et une nouvelle fois- être repoussé, l’État ayant souhaité "phaser", les travaux de la section La Mothe-Les Molinières (14,3 km estimés à 120 M€) en trois temps. Du coup, pas grand monde dans le chef-lieu de canton ne croit à l’avènement prochain de ce chantier. Pour les plus anciens, le scepticisme est de mise.
"Du contournement de Baraqueville, on en parlait déjà avant la création du lac (réalisé en 1995 par la municipalité Jaudon, NDLR), se rappelle ce vieux monsieur. C’est un véritable serpent de mer. Maintenant ils ont une excuse en disant qu’il n’y a pas d’argent."

"Ils nous amusent" 

"Cela fait 30 ans que ce n’est pas fait et je ne le vois pas venir... à moins qu’il y ait de l’argent dans les caisses", constate un retraité. Cet autre retraité est encore plus précis: "En 1970-71, cette route avait été étudiée. C’est moi qui en avais fait les jalons en bois. C’est dommage que le contournement n’existe pas, car il faut voir la rue principale l’été ou le vendredi à 18 heures." Et de prédire que "ça se fera un jour peut-être, mais il faudra que les contribuables sortent le portefeuille."
Toutes les personnes interrogées sont d’accord pour dire avec un certain fatalisme qu’ils "l’attendent" mais que "ça fait très long", et qu’elles "n’en verront pas l’aboutissement". Les plus virulentes ne mâchent par leurs mots, comme cet habitant qui lâche en colère "Ils nous amusent !". "Ils feraient mieux de mettre de l’argent sur cette route que sur le musée Soulages", gronde-t-il, pas convaincu du tout lorsqu'on lui répond que cela n’a rien à voir.

Pour cet usager de l’axe routier qui accomplit "50 000 km par an pour le boulot", la "RN88 c’est infernal". "Le vendredi après-midi c’est insupportable. S’il faut attendre qu’il y ait un mort pour agir...". "Le président Malvy (président de la région Midi-Pyrénées) ferait mieux d’investir sur la route que sur la modernisation de la voie ferrée qui n’est empruntée que par deux ou trois 'pelés'." Et de suggérer, peut-être, "de faire appel au privé pour sa construction et d’y mettre un péage". "Quand ils ont voulu construire le viaduc de Millau, ça a été vite fait".

"Humainement et économiquement, c’est une catastrophe"

Cette Naucelloise qui a longtemps travaillé et habité à Baraqueville se lance, elle, dans une comparaison éclairante. "Alors qu’à Naucelle, ça se calme un peu (la sous-section La Baraque Saint-Jean-Naucelle Gare sera terminée fin 2013, alors que l’autre sous-section Naucelle Gare-La Mothe ne le sera que fin 2014), à Baraqueville, humainement c’est une catastrophe, car les gens en ont marre de cette nationale. C’est dangereux pour les piétons." "Économiquement aussi, car les entreprises ne savent pas comment se positionner et vont s’installer ailleurs". Pro contournement, elle ne croit pas un instant que ce dernier se fera au désagrément de la commune: "Les gens qui voudront s’arrêter à Baraqueville s’y arrêteront. La ville deviendra une commune périphérique de Rodez plus agréable à vivre".