Zimbabwe: vers une victoire par K.O. de Mugabe avec l'aval des observateurs

  • Le Premier ministre Morgan Tsvangirai, le 1er août 2013 à Harare
    Le Premier ministre Morgan Tsvangirai, le 1er août 2013 à Harare AFP - Alexander Joe
  • Le président zimbabwéen Robert Mugabe vote à Harare, le 31 juillet 21013
    Le président zimbabwéen Robert Mugabe vote à Harare, le 31 juillet 21013 AFP - Alexander Joe
  • Zimbabwe: Mugabe pourrait remporter les trois quarts des voix
    Zimbabwe: Mugabe pourrait remporter les trois quarts des voix AFP - Farai Mugano
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AFP

Le président zimbabwéen Robert Mugabe, au pouvoir depuis 33 ans, se préparait vendredi à une victoire électorale écrasante sur son rival Morgan Tsvangirai avec l'aval des observateurs africains, malgré de sérieux doutes quant à l'honnêteté du scrutin.

Le résultat officiel de ce premier tour de la présidentielle n'est théoriquement pas attendu avant lundi. Mais les premiers chiffres des législatives donnent au parti de M. Mugabe, plus vieux chef d'Etat africain au pouvoir depuis l'indépendance en 1980, un score presque soviétique.

Son propre camp a affirmé que "le président devrait avoir de 70 à 75%" à la présidentielle. Un haut responsable de la Zanu-PF, membre du bureau politique, a indiqué à l'AFP avoir obtenu "la super majorité et déjà dépassé les deux tiers" à l'Assemblée, un score dont le décompte officiel de la Commission électorale s'approchait en début de soirée.

Selon les derniers résultats officiels portant sur 186 sièges, la Zanu-PF aura en effet au moins 137 sièges sur 210 à l'Assemblée où le MDC de Morgan Tsvangirai, le rival de Mugabe, était majoritaire depuis 2008.. Une majorité des deux tiers permettrait à M. Mugabe de modifier la Constitution, un texte relativement libéral tout juste adopté en mars.

Privé de victoire en 2008 par la violence des partisans de M. Mugabe, Morgan Tsvangirai n'était cependant pas prêt de s'incliner après une élection qu'il a qualifiée d'"énorme farce".

Organisé à la va-vite, le scrutin a vu notamment de nombreux électeurs absents des registres ou inscrits ailleurs que dans leur bureau habituel, notamment dans les villes. Les listes n'ont été publiées que la veille du vote, rendant impossible une vérification ou des recours.

Mince marge de maneuvre

Vendredi, le MDC de M. Tsvangirai a annoncé qu'il "rejetait ces élections et ses conséquences, ce qui inclut le gouvernement qui en résultera", renvoyant poliment la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) à ses contradictions.

"Nous avons examiné la déclaration de la mission des observateurs de la SADC nous suppliant d'accepter les résultats de l'élection. Nous rejetons cet appel pour la raison que même la SADC n'a pas réussi à entériner l'élection comme honnête", a expliqué un porte-parole du MDC.

Le parti doit préciser sa stratégie lors d'une conférence de presse samedi.

La marge de manoeuvre du camp Tsvangirai est cependant mince. Désuni, il est affaibli par quatre ans de cohabitation relativement impuissante avec M. Mugabe et sa volonté d'en découdre par la résistance passive n'a rencontré jusqu'à présent aucun écho populaire.

La SADC est l'organisation régionale qui a piloté les efforts de médiation pour éviter une guerre civile en 2008, imposant M. Tsvangirai comme Premier ministre et exigeant au passage une démocratisation des médias et de l'armée qui ne s'est pas matérialisée.

En l'absence d'observateurs occidentaux, elle porte la lourde responsabilité de défendre la démocratie pour le compte des Zimbabwéens et de la communauté internationale, sans céder à la tentation de prolonger la "pax Mugabe" pour éviter de nouvelles violences.

"Les élections, compte tenu des circonstances, se sont bien passées et il n'y a pas de raison de les annuler", a déclaré le chef de sa mission, le Tanzanien Bernard Membe.

"Nous disons que cette élection a été libre, très libre même... Nous n'avons pas dit qu'elle était honnête, simplement parce la question de l'honnêteté est vaste et nous ne voulions tirer aucune conclusion à ce stade", a-t-il ajouté.

"Mesures populistes assez radicales"

Moins nuancé, son homologue de l'Union africaine, l'ex-président nigérian Olusegun Obasanjo, a salué une élection dans l'ensemble "libre, honnête et crédible".

"A long terme, la région paiera probablement le prix pour avoir acquiescé à ce type d'oppression à laquelle nous assistons au Zimbabwe depuis trop longtemps", a commenté Jakkie Cilliers, directeur de l'Institut des études de sécurité (ISS) de Pretoria.

Le Zimbabwe se remet à peine d'une décennie de récession marquée par une inflation galopante et le départ à l'étranger de plusieurs millions de personnes.

Une victoire de M. Mugabe pourrait changer la donne. "C'est le retour à une volatilité extrême", a estimé Iraj Abedian, PDG de Pan African Investments à Johannesburg. "Nous pouvons nous attendre à des mesures populistes assez radicales, qui auront des conséquences énormes."

Après les terres agricoles et les mines, les banques et les sociétés financières pourraient selon lui être les prochaines cibles d'un nouveau gouvernement Mugabe cherchant à étendre son programme d'"indigénisation" visant à redistribuer les actifs à des Zimbabwéens noirs.

"Ce serait provoquer le chaos, mais la Zanu-PF et Mugabe semblent aimer ça."

En 2008, Morgan Tsvangirai était arrivé en tête du premier tour de la présidentielle, mais des partisans de M. Mugabe s'étaient déchaînés sur leurs adversaires, faisant environ 200 morts.

M. Tsvangirai s'était retiré entre les deux tours pour éviter un bain de sang généralisé. Il s'était ensuite associé au président à la demande des pays voisins, et était devenu un Premier ministre, salué pour son esprit de paix mais politiquement relativement impuissant.

Source : AFP

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