Paul Astruc, pionnier du théâtre amateur local en Aveyron

  • Paul Astruc, un figure du théâtre amateur en Aveyron.
    Paul Astruc, un figure du théâtre amateur en Aveyron. Salima Ouirni/Centre Presse
Publié le , mis à jour
Salima Ouirni

Paul Astruc est connu, en Aveyron, pour avoir fondé une compagnie de théâtre amateur, les Comédiens au Chariot, à une époque où le département ne disposait pas de grand-chose en matière de rayonnement culturel.

Il fait partie des gens d’ici. De ces personnages dont on dit volontiers: "C’est un monument". Pourtant, à 88 ans ("un âge à peine avouable", dit-il), Paul Astruc, l’initiateur "du théâtre à Rodez et dans ses campagnes", ne se voit pas du tout de cette façon-là.

"Il ne faut pas croire ce que disent les gens. Ils ont toujours cru que j’étais professeur, parce qu’à une époque, je côtoyais les profs. Mais, à vrai dire, je n’ai même pas le bac. Je l’ai raté; j’étais un piètre étudiant, je passais ma vie à rêvasser".
Cet élève qui passait son temps à rêver a pourtant marqué le théâtre amateur aveyronnais, puisqu'il a tout simplement inventé la compagnie de théâtre amateur Les comédiens au Chariot. Une compagnie qui existe toujours et qui a formé des générations d’acteurs durant plus de 50 ans.
"Je suis né à Montpellier. Quand je suis venu à Rodez, en 1951, je ne connaissais personne. Grâce à Marie-Thérèse, mon épouse sans qui je n’aurais jamais fait tout ce que j’ai fait, j’ai connu des personnalités du monde littéraire, comme le poète Jean Digot", se souvient Paul Astruc.

Fonder une famille ou une compagnie ?

De fil en aiguille, de rencontres en rencontres, Paul Astruc a trouvé sa voie, celle du théâtre. "Je voulais fonder une famille, j’ai fondé une compagnie", dit-il en riant.
Avec Marie-Thérèse, qu’il connaissait depuis l’âge de 13 ans, il aura eu trois enfants tout de même. "Depuis son décès, je me rends compte qu’elle les a élevés toute seule. Elle a beaucoup fait pour le théâtre aussi. Elle faisait pratiquement tous les costumes et accueillait les personnes seules, celles qui arrivaient à Rodez et qui ne connaissaient personne. On l’appelait la maman du théâtre. Pour moi, c’était l’âme du théâtre", confie le fondateur des Comédiens aux Chariots.
Des confidences qui sonnent comme un hommage à celle qui l’a accompagné durant toute une vie. Celle qui "a participé à l’épanouissement de la troupe. Elle travaillait dans l’ombre, toujours dans les coulisses". Jusqu'au jour où il l’a révélée à elle-même: elle est montée sur les planches à son tour, rattrapée par la passion de son époux (ils se sont mariés en 1949).

Rien pour les amateurs

Et de se souvenir: "À l’époque, il n’y avait rien à Rodez pour le théâtre amateur et les troupes comme la nôtre. Pour les professionnels, il y avait le Palace, l’ancien cinéma le Royal qui avait une capacité de 900 places et une scène de théâtre. Il y avait aussi un théâtre, à l’italienne à l’emplacement actuel du commissariat. Il était désaffecté et comme nous n’avions pas de local de répétition, nous avions trouvé un moyen de nous y introduire pour répéter la nuit. Un jour, nous avons été dénoncés par quelqu'un. Le maire de l’époque, M. de Lapanouse, m’a fait convoquer pour me tirer les oreilles. Nous n’y sommes plus revenus, mais, auparavant, comme nous n’avions pas d’argent, nous avons pris soin de découper du tissu, de la toile de jute, de prendre les décors pour notre compagnie", raconte Paul Astruc, en s’amusant de leur comportement de l’époque. Mais nécessité faisait loi...

Molière en modèle

Petit à petit, dans les années 60, Paul Astruc, qui ne jouait qu’à Rodez, a voulu exporter le théâtre dans les campagnes. "Je voulais faire connaître un théâtre populaire, mais de qualité. Je voulais faire découvrir aux campagnards qui ne connaissaient pas le théâtre du beau texte et du solide. Mon modèle, c’était Molière".
Et tout comme le génie de la comédie française, Paul Astruc et sa compagnie de saltimbanque ont sillonné la campagne aveyronnaise et les places des principales villes, entre 1952 et 2000, pour faire découvrir les plus grands auteurs du théâtre, mais également ses propres créations.

Soixante pièces en cinquante ans

En un demi-siècle, il aura monté soixante pièces de répertoire dont une dizaine de créations du Chariot. Et, en 2000, Paul Astruc décroche. Le rideau se baisse sur une longue carrière d’acteur amateur. Aux amateurs de la scène vivante, il laisse en héritage une histoire locale flamboyante, des décors, des archives et une salle de répétition qu’il aurait souhaité avoir à l’époque de ses débuts. Il laisse l’association des Comédiens au Chariot.
 

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