Patrick Bounhol, l'enfant terrible du Lévezou et de l’artisanat

  • La société "Les couvreurs du Lévezou", cogérée par Patrick Bounhol et son frère, est basée au hameau de Girman, à deux pas de la maison familiale.
    La société "Les couvreurs du Lévezou", cogérée par Patrick Bounhol et son frère, est basée au hameau de Girman, à deux pas de la maison familiale. My.L
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Myriam Laffont

Bâtiment. Après avoir tagué les routes, il manifeste aujourd'hui à Rodez avec les artisans du bâtiment. En tête du cortège, l’impétueux président de la Capeb, Patrick Bounhol. Portrait d’un jusqu’au boutiste dévoré par les convictions.

"J’avais les cheveux longs et j’étais un peu plus excité, je les ai donc un peu bousculés…" En 1982, fraîchement inscrit à la chambre de métiers, lesté de son CAP de couvreur passé fièrement à 20 ans en candidat libre, Patrick Bounhol n’a pas un très bon souvenir de son premier contact avec la Capeb. Le jeune couvreur chevelu et excité aime déjà que ça le fasse vite et efficace ; les atermoiements, ça l’agace. Sa rencontre, la même année, avec Jean Lardin, le président de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment, balaiera cette unique anicroche et signera l’engagement militant à la vie, à la mort de Patrick Bounhol pour les gars du bâtiment.

"Pour vivre heureux, vivons caché"

"On a une seule vie, il faut la dépenser à fond et défendre ceux qui sont dans la merde Je me souviens comme si c’était hier de ce que me disait mon grand-père, Roger Barthes, rescapé d’un camp et virulent bénévole:” Tu sais, Patrick, la vie ce n’est pas le pour vivre heureux, vivons caché”.La vie, c’est aussi ce sombre jour de 1975, cette tuile déterminante dans le parcours du chevelu excité. Couvreur comme son père l’était, le "papa" de Patrick, Roland, tombe d’un toit. Jambe fichue, indemnités à la portion congrue, trois ans d’hospitalisation et de rééducation à Montpellier. "On a souffert"dira sobrement celui qui est connu comme le loup blanc pour ses frasques viriles et sa tchatche. 

Le choc des forts en gueule et carrure

Aujourd’hui, le cheveu plus court, le regard toujours aussi bleu perçant, à peine un peu moins excité, le vigoureux quinquagénaire applique au pied de la lettre les règles de vie de ses aïeux : vivre à fond dans le respect et le souci de l’autre. L’artisan de sa vie et de la vie des autres file à découvert et brûle par les deux bouts ses convictions et sa nature. La diplomatie et les ronds de jambe intrigants ? Non, merci, le bonhomme n’est pas là "pour faire semblant", le bonhomme est là "pour construire".

La route est bien sûr jalonnée d’acrimonies et de critiques violentes. Bounhol, on aime ou on aime pas, entre-deux interdit, ça passe ou ça casse. Les amis de la veille ennemis d’aujourd’hui, et vice versa. "Vous savez quel est mon surnom ? L’enfant terrible du Lévezou!" S’en délecte-t-il seulement ? Pas sûr. La mère Bounhol, aux fourneaux de la maison familiale de Girman, acquiesce: le petit, il a toujours été comme ça, entier, intenable. Sur le Lévezou, après notre rencontre, nous croiserons un autre de ces forts en gueule et carrure qui avouera avoir frôlé plus d’une fois dans le passé le pugilat avec Bounhol pour aujourd’hui, l’apprécier, excès compris.

Coup de poing

"Vous ne risquez rien. Dites bien aux gendarmes que c’est le président de la Capeb qui a commandité ces actions. Vous affolez pas, on continue !" Après une énième nuit à taguer les routes du "Attention, ça va péter !", certains troupiers se sont fait interpeller et viennent au rapport, par smartphones interposés. Déterminé, le président rassure et mobilise ses troupes fébriles. Artisan messager dans les écoles pendant une quinzaine d’années, Patrick Bounhol sait comment transmettre la bonne parole.

Galvanisés, une soixantaine d’artisans se sont constitués ces derniers jours en commando illicite pour la relayer de nuit sur les bitumes. Mais, sur cette action coup-de-poing, l’enfant terrible n’aurait-il pas franchi la ligne blanche, ne se grillerait-il pas ? "Je sais bien que parfois je dérange, mais..." Mais c’est plus fort que lui, dévoré et emporté par une rage de faire. Celui qui a choisi de monter sur les toits pour tutoyer de plus près la liberté n’est pas seul. "Il me semble que là-haut, il y a des gens qui me portent..." Le père, le grand-père, le frère, qui reposent au cimetière "entre terre et lauze, sans croix. Ces gens, là-haut, me disent :”Continue”. Mais stop, vous allez me faire chialer."

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