Italie: Berlusconi plonge le gouvernement dans une nouvelle crise

  • Le Premier ministre Enrico Letta (d) et le vice-président du Conseil des ministres et ministre de l'Intérieur  Angelino Alfano (g), le 29 avril 2013 au Parlement italien de Rome
    Le Premier ministre Enrico Letta (d) et le vice-président du Conseil des ministres et ministre de l'Intérieur Angelino Alfano (g), le 29 avril 2013 au Parlement italien de Rome AFP/Archives - Andreas Solaro
  • Silvio Berlusconi le 19 septembre 2013 au siège de son parti, le Peuple de la Liberté, à Rome
    Silvio Berlusconi le 19 septembre 2013 au siège de son parti, le Peuple de la Liberté, à Rome Pool/AFP/Archives - Massimo Percossi
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AFP

Pris de panique à l'idée de perdre prochainement son immunité parlementaire, Silvio Berlusconi a ouvert une nouvelle période d'incertitude politique pour l'Italie en poussant les ministres de son parti à démissionner.

"Geste fou", "indigne", "le condamné fait couler l'Italie", "course dans le vide": la presse italienne était unanime dimanche à condamner la décision du Cavaliere alors que la troisième économie de la zone euro peine à sortir de la crise.

"La politique italienne s'est vidée de tout sens et se trouve privée de tout horizon", a déploré le respecté constitutionnaliste Stefano Rodotà.

Même Enrico Letta, à la tête d'un gouvernement de difficile coalition entre la gauche dont il est issu et le centre droit de Berlusconi, en a perdu son habituelle sérénité, évoquant "un geste fou et irresponsable, entièrement destiné à protéger les intérêts personnels" du milliardaire aux prises avec la justice.

Le feu couve depuis la condamnation définitive le 1er août de Silvio Berlusconi à quatre ans de prison (ramenés à un seul en raison d'une amnistie) pour fraude fiscale. En raison de son âge, -il "fête" ses 77 ans justement ce dimanche-, le magnat des médias n'ira pas derrière les barreaux mais il doit choisir dans les jours prochains entre l'assignation à résidence et les travaux d'intérêt général.

Autre perspective humiliante pour le Cavaliere, le Sénat doit se prononcer prochainement sur sa destitution, qui le privera de son immunité parlementaire alors qu'il redoute encore d'autres jugements, dont le procès en appel du Rubygate (prostitution de mineure et abus de pouvoir).

Plus s'approche l'échéance, plus les enchères montent. Jeudi, les parlementaires de son parti, le Peuple de la liberté (PDL) ont signé -mais pas remis- leur démission. Et samedi, ce sont les cinq ministres PDL qui annonçaient leur démission, dont le numéro deux du gouvernement Angelino Alfano, vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur. Officiellement pour protester contre "l'ultimatum" de M. Letta. Ce dernier avait annoncé son intention de poser la question de confiance pour "clarifier" le soutien de son encombrant allié.

Tout devrait se jouer mardi au Parlement.

"Chacun assumera sa responsabilité devant le pays", a dit M. Letta. Son espoir: attirer des parlementaires du centre droit lassés des coups de colère de leur mentor et former une nouvelle majorité pour un "Letta bis".

"Les voix existent déjà. Et ce sont des voix du PDL (...). Depuis hier, beaucoup travaillent déjà à cela. Toute la mouvance centriste est en ébullition pour convaincre +les amis du PDL+ d'empêcher Berlusconi de choisir une voie extrémiste à la Le Pen", écrit la Repubblica (gauche).

Le quotidien turinois La Stampa titre "La chasse aux transfuges pour le grand centre", tandis que le Corrierer della Sera implore : "Modérés, où êtes-vous?".

Les médias se livrent aussi à des calculs savants, tenant compte du soutien inconditionnel de l'ex-chef du gouvernement Mario Monti, et aussi d'éventuels transfuges du Mouvement cinq étoiles (M5S) de l'ex-comique anti-partis Beppe Grillo.

Le président du Conseil devait rencontrer dans la journée le président Giorgio Napolitano, qui joue un rôle d'arbitrage dans les crises.

Ce dernier a déjà par le passé répété qu'il ne souhaitait pas dissoudre le Parlement, tant que la loi électorale ne serait pas modifiée.

A moins d'un retrait de la démission des ministres -en Italie, tout est possible-, le pays pourrait se diriger vers la formation d'un gouvernement chargé uniquement de deux tâches: l'adoption de la loi budgétaire et la réforme de la loi électorale. Avec le parti de Berlusconi relégué dans l'opposition. Auquel cas, celui-ci "se retrouvera isolé, privé du levier qu'il détient sur le gouvernement", commente Stefano Folli, du Sole 24 ore.

En attendant, les yeux seront tournés lundi matin vers les marchés. Le ministre de l'Economie Fabrizzio Saccomani s'est voulu optimiste: "les marchés tiendront compte de beaucoup de paramètres, y compris la conjoncture économique qui s'améliore", a-t-il dit au Sole 24 ore.

En attendant, première conséquence de ces soubresauts, le report éventuel d'une augmentation de la TVA qui devait être discuté vendredi, n'a pu être adopté. L'augmentation d'un point (de 21 à 22%) entrera en vigueur le 1er octobre.

Source : AFP

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