A Gaza, le double blocus impose une diète draconnienne aux Palestiniens

  • Un Palestinien attrape des sacs lors d'une distribution de nourriture de l'ONU à Gaza, le 17 septembre 2013
    Un Palestinien attrape des sacs lors d'une distribution de nourriture de l'ONU à Gaza, le 17 septembre 2013 AFP/Archives - Mahmud Hams
  • Un homme transporte de la nourriture de la chaîne KFC dans un tunnel entre la bande de Gaza et l'Egypte, le 13 mai 2013
    Un homme transporte de la nourriture de la chaîne KFC dans un tunnel entre la bande de Gaza et l'Egypte, le 13 mai 2013 AFP/Archives - -
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AFP

C'était le coup de publicité de l'année à Gaza: la livraison de fast-food sous la frontière avec l'Egypte. Depuis, les tunnels de contrebande ont été condamnés et les commandes ont chuté, comme l'ensemble de l'économie du territoire palestinien sous blocus israélien.

Dans la zone frontalière de Rafah, la poussière soulevée par le fourmillement d'activité est retombée après la démolition de centaines de tunnels par l'armée égyptienne, à la suite de la destitution du président islamiste Mohamed Morsi le 3 juillet.

Sous les bâches abritant les entrées de tunnels à l'abandon, quelques rares équipes s'affairent à creuser de nouvelles voies - "pour l'avenir".

"L'avenir... Est-ce qu'il y a un avenir pour les tunnels? Pas avec Sissi (le général Abdel Fattah al-Sissi, homme fort de l'Egypte)", soupire un membre de la police des frontières du gouvernement du Hamas, au pouvoir à Gaza, sous le couvert de l'anonymat.

Le trafic de carburant égyptien subventionné s'est effondré, d'environ un million de litres par jour en juin, à 10.000 à 20.000 litres par semaine actuellement, selon le dernier rapport hebdomadaire du Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU(Ocha).

Cette pénurie a provoqué l'arrêt le 1er novembre de l'unique centrale électrique, qui assurait près de 30% des besoins du territoire palestinien, où les coupures de courant atteignent désormais 16 heures par jour.

Faute d'électricité, des stations de traitement des eaux ont cessé de fonctionner et les égouts ont commencé cette semaine à déborder dans les rues de plusieurs quartiers de la ville de Gaza.

Un des associés de l'entreprise de livraison Al-Yamama, qui s'est illustrée en mai en acheminant des commandes de Kentucky Fried Chicken(KFC)du Sinaï égyptien à ses clients à Gaza, parle de cette période comme d'un "Âge d'or" enfui.

"Malgré le prix élevé à cause du transport, les gens en achetaient pour avoir quelque chose qui n'existe pas ici", raconte Haïtham al-Chami, l'un des gérants, âgé 29 ans.

"C'était un défi", explique-t-il, "montrer que Gaza, ce n'est pas que la guerre et la mort. Nous aimons la vie, mais nous n'avons rien. Le KFC, ce n'est rien, bien sûr, mais il n'y en a pas à Gaza".

"Ketchup et mayonnaise"

L'opération, largement promotionnelle, n'a duré qu'un mois, jusqu'à son "interdiction pour des raisons sanitaires" par les autorités de Gaza, au nom de la protection des consommateurs, avant même la destruction des tunnels, précise Haïtham al-Chami.

Depuis, c'est tout le carnet de commandes de la société Al-Yamama qui subit les retombées, avec "250-300 livraisons quotidiennes ces jours-ci, contre 500 il a cinq mois", ajoute-t-il.

Selon l'économiste palestinien Omar Chaabane,"Gaza est une société moderne, les gens connaissent tous ces produits, le Nescafé, le cappuccino, etc.".

"Maintenant nous sommes devenus une société sous assistance, nous dépendons de l'aide humanitaire internationale pour la nourriture", déplore-t-il.

"Le siège a détruit le secteur productif industriel, il a empêché toute exportation de Gaza, à part cinq ou six articles", rappelle-t-il.

Après la capture en juin 2006 d'un de ses soldats - libéré en 2011 - Israël a imposé un blocus à Gaza, renforcé en juin 2007 lors de la prise de contrôle de l'enclave par le Hamas.

"Nous ne souffrons pas à cause du manque de pluie ou de nourriture, c'est une catastrophe d'origine humaine", remarque Omar Chaabane, directeur du groupe de réflexion Palthink, à Gaza.

"Nous sommes un otage kidnappé par quatre ravisseurs", résume-t-il, incriminant à la fois Israël, le Hamas, l'Autorité palestinienne, qui gouverne la Cisjordanie, et la communauté internationale.

Dans un tribune en octobre, le négociateur palestinien Mohammad Chtayyeh insistait aussi sur la prépondérance des causes politiques, rejetant le mirage d'une "paix économique" chère à l'émissaire du Quartette (Etats-Unis, Russie, Union européenne, ONU) Tony Blair.

"Ces dernières années, certaines parties internationales ont tenté de convaincre le monde que les solutions consistaient à enlever un barrage ou autoriser le ketchup et la mayonnaise à Gaza", écrivait-il, "mais ce dont la Palestine a besoin, c'est la fin de l'occupation israélienne".

Source : AFP

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