Une réforme électorale qui contrarie la démocratie

  • COTE URNE ELECTION
    COTE URNE ELECTION PIXROD José A. Torres
Publié le
Christophe Cathala

1000 habitants. C’est le seuil à partir duquel s’impose une réforme du scrutin qui rebat les cartes dans les communes, en supprimant le panachage et les candidatures spontanées, et en limitant la présence d’une salutaire opposition.

A un peu moins de 100 jours du premier tour des élections municipales, un constat s’impose: la réforme qui s’applique désormais aux communes de plus de mille habitants -dans lesquelles les candidats sont désormais obligés de présenter des listes complètes et paritaires-, est diversement vécue par les élus.

Liste complète (et paritaire) obligatoire pour les communes de plus de mille habitants. Une révolution qui bride l’émergence des oppositions en supprimant les candidatures isolées...

Les difficultés de la parité

Une liste égale au nombre de conseillers assortie de la parité obligatoire "rend les choses bien plus compliquées qu’elles ne l’étaient jusqu’alors", confie un maire qui a du mal à trouver des femmes pour bâtir son équipe. "Elles n’ont pas toujours envie de s’engager, estiment ne pas avoir la disponibilité requise... Ce n’est pas seulement une affaire de politique". Sentiment partagé du bout des lèvres par de nombreux maires sortants, plus pragmatiques que sexistes.

Une opposition difficile à organiser

Mais ces listes obligatoires ont surtout une autre conséquence sur le fonctionnement démocratique. Candidats isolés ou petits groupes décidés à porter un discours alternatif n’ont d’autres solutions pour exister que d’être assez nombreux pour monter une liste complète. Ce qui n’est pas toujours possible alors que, jusqu’à présent, ils parvenaient à s’immiscer dans un conseil municipal par le jeu du panachage opéré par les électeurs. "Dans les communes rurales, il ne faut pas se faire d’illusion: le maire et ses adjoints décident de tout, les autres élus enregistrent sans jamais guère s’opposer, note un élu du Nord-Aveyron. Avoir des contre-projets qui émergent dans le débat est stimulant. En apportant la contradiction, une opposition, même réduite à un ou deux individus libère la parole de tout le monde. Et c’est comme cela que l’on avance".

Personnalité contre postures politiques

Majorité et opposition n’ont pas le même sens dans les grandes villes où dominent les postures politiques que dans les communes rurales où les affrontements sont guidés par la personnalité des élus. Alors bien sûr, le scrutin à la proportionnelle laisse place à une répartition des sièges entre toutes les listes présentées aux suffrages. "Mais faut-il encore réunir 15 ou 19 candidats, hommes et femmes", déplore un anti-éolien, jusqu’alors élu au conseil d’une commune du Lévezou qui, faute de parvenir à fédérer autour de son opposition, sait qu’il ne pourra plus être élu en mars...

Responsabilités et finances brident les ambitions

La réforme électorale n’est pas la seule à rebattre les cartes. La situation économique de nombreuses communes ne plaide pas en faveur d’un engagement ou du renouvellement d’un mandat. "Quand on voit ce qui échoit au maire en matière de responsabilités toujours plus importantes, aux missions imposées aux élus en matière sociale ou scolaire notamment, on peine à trouver des bonnes volontés", note un édile qui, après trois mandats, jette l’éponge. Dans de nombreuses communes, des maires sortants laissent leur place au terme d’un premier mandat. D’autres rempilent "faute de mieux", pour "poursuivre des projets engagés","parce que personne ne veut prendre le relais" 

Les maires ruraux hésitent

Et la chanson de l’inquiétude pour l’avenir n’a qu’un seul refrain: "Comment vont évoluer nos finances et donc nos projets quand on voit que l’État gèle ou baisse ses dotations, que le conseil général ne peut plus nous accompagner comme avant... Faudra-t-il encore augmenter les impôts?", s’alarme le maire d’un chef-lieu de canton. Alors, ils sont nombreux à hésiter à se représenter, ces maires ruraux. Pas de panique, ils ont encore un peu le temps de la réflexion: les candidatures aux municipales doivent obligatoirement être déposées à la préfecture jeudi 6 mars à 18 heures, dernier délai.

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