Municipales en Aveyron : pourquoi les maires raccrochent ?

  • S'ils revendiquent leur droit au repos, les maires passent la main avec plaisir et le sentiment du travail accompli.
    S'ils revendiquent leur droit au repos, les maires passent la main avec plaisir et le sentiment du travail accompli. José A. Torres
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centrepresseaveyron.fr

On les dit fatigués, stressés, à deux doigts de la dépression... En Aveyron, les maires seraient-ils au bout du rouleau ? A quelques heures de la date limite du dépôt des listes pour les municipales. Rencontre avec ceux qui passent la main.

Selon un sondage publié en février 2014, ils seraient environ un tiers à renoncer à se représenter aux prochaines élections municipales. Si en Aveyron, beaucoup repartent faute de trouver un volontaire susceptible de prendre le relais, pour ceux qui se sont déterminés, le choix est clair. 

Élu depuis 31 ans, dont  20 ans en tant que maire de Cransac, Jean-Paul Linol ne briguera pas de nouveau mandat. S’il fait valoir son "droit au repos", le choix de sexagénaire est avant tout lié à des problèmes de santé. "Rien de grave" reprend l’édile du Bassin mais la lassitude à fait son œuvre. "Le quotidien du maire me bouffe. Tous ces tracas, ces contrariétés, les doléances des administrés qui estiment avoir davantage de droits que de devoirs, tout cela m’est devenu difficile à supporter et je ne veux pas y laisser ma peau".

Cheville ouvrière du renouveau du Thermalisme dans sa cité, lui qui d’avis d’administrés laissera un très grand vide, ne regrette rien. "C’est une fonction exigeante, il faut travailler au quotidien, être là en permanence, sinon le train passe..." Et si comme 54% des maires de villes de moins de 10 000 habitants, il estime que sa fonction l’a rendu heureux, il est tout autant satisfait du travail accompli. "Je pars avec des regrets mais avec la satisfaction du travail accompli..."

À Coussergues, Jean-Fabre, président du Stade Toulousain pendant 10 ans, et maire de la commune depuis 2001, a lui aussi décidé de passer la main. "Il est temps. Je crois qu’il n’est pas bon d’être maire à vie, c’est selon moi une question d’éthique. Nous ne sommes pas propriétaires d’une fonction, cela a toujours été très clair pour moi".

S’il reconnaît les contreparties liées au mandat, "le côté contraignant de la charge", tous ces petits désagréments restent pour lui anecdotiques. "On peut rencontrer des pressions, faire face à des mécontentements, des difficultés. C’est la règle du jeu. Que ce soit dans une association, un club sportif, une mairie, il faut accepter certaines choses." Dans son cas, ces petites choses n’ont jamais terni le tableau. La "faute" à son équipe municipale, une "très bonne équipe" sur laquelle il a pu compter tout au long de ses deux mandats. "Avec une bonne équipe, et j’insiste sur ce point, on peut faire beaucoup pour sa commune" estime ce "grand optimiste de nature" pour qui "participer à la vie locale" et "faire avancer les dossiers" compensent largement le reste.

A Saint-Rémy dans l'ouest du département, Jean-Pierre Pouzoulet a, comme il l'avait annoncé en 2008, décidé lui aussi de laisser sa place. Après 32 ans en tant qu'élu, et un mandat de maire, l'heure est pour lui venue de passer la main. Non sans un petit pincement au coeur. "Les maires ont une vraie utilité, c'est un mandat merveilleux que j'ai exercé avec beaucoup de plaisir. Néanmoins, je reste persuadé que nul n'est indispensable". 

Un tableau idyllique qui tranche avec son amertume vis-à-vis de la gestion "au fil de l'eau" du dossier de l'intercommunalité. Voulue pour rationaliser la vie politique locale en réduisant au maximum le "mille-feuille" administratif, cette réforme est loin d'être aboutie en Aveyron. Or pour le maire sortant,  il en va de la survie des communes rurales. "Comment des villages voisins qui se battent pour conserver leurs écoles peuvent ensuite partager une vision économique commune", s'interroge l'élu qui en restera là. "Comme disent les pêcheurs, je range les gaules. Tout ce que j'espère c'est que ce dossier avance".

A Nauviale, Serge Volte a décidé de faire sien, le conseil de Jean-Pierre Jupin, l'ancien président de la communauté de communes de Marcillac : "Passé deux mandats, on n'amène plus rien". Dans son cas, le premier, pris en cours de route suite du décès de Gabriel Panassié en 2002, n'a pas été une partie de plaisir. "Personne ne s'est bousculé au portillon. Alors j'y ai été pour le bien du village. Cela a été dur, inattendu, brutal", concède celui qui se représentera cependant en 2008. "Nous avions lancé d'énormes travaux, je ne pouvais pas laisser ça derrière moi !"  Des regrets ? "Aucun", conclut Serge Volte. "Les gens ont une mauvaise image de la vie publique. L'engagement fait peut-être peur. Mais si mon premier mandat a été terrible, je ne regrette rien de rien. Humainement c'est formidable. Cela mérite d'être vécu !"

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