Il juge que les voitures roulent trop vite... et sort sa hachette

Devant ces faits "stupéfiants", Bernard Salvador, vice-procureur de la République, tombe des nues. Car "nous ne sommes pas dans un quartier chaud d’une grande métropole, dans le Bronx ou un autre quartier de Chicago", mais à Saint-Parthem.

Coups de poing, coups de pied et coups de hachette

Et d’observer que "tout peut arriver dans cette bonne ville de l’Aveyron". Le magistrat du parquet, mardi, lors de l’audience du tribunal correctionnel de Rodez, se trouve alors devant un célibataire âgé de 31 ans, sans emploi, jugé en comparution immédiate. Vendredi, à 23 heures, lors d’une soirée "un peu trop arrosée", reconnaît le prévenu lui-même, celui-ci sort de chez lui et se poste au milieu de la route, se mettant en tête de faire ralentir les voitures qui traversent son village. "Parce que j’estimais qu’elles roulaient trop vite", dit-il.

Une situation "qui vous agaçait depuis le 15 mars", précise la présidente Blandine Arrial. "Il n’y a plus de lumière dans la rue depuis plusieurs mois", ajoute, du coup, le mis en cause. "J’ai trois chiens; c’est ma famille", explique-t-il, redoutant qu’un jour ses fidèles compagnons se fassent écraser. Le trentenaire stoppe la première voiture; la conductrice, effrayée, repart; le prévenu tape sur une vitre latérale qui vole en éclats. Deuxième voiture: le conducteur s’arrête et baisse sa vitre; il reçoit trois coups de poing. Un autre véhicule a droit à un coup de pied. Le prévenu remonte ensuite chez lui, et s’empare d’une hachette avant de redescendre dans la rue. "Pour intimider les gens", confesse-t-il. Un 4x4 arrive. Voyant cet énergumène armé, l’automobiliste accélère; sa voiture reçoit un violent coup de cette petite hache.

Bernard Salavador : "La loi, maintenant, il va la subir"

Même s’il tente de justifier son geste, l’habitant de Saint-Parthem reconnaît que "dès (qu’il est) alcoolisé, (il) pète les plombs". Et d’ajouter que les faits du 21 mars lui ont "vraiment fait prendre conscience de (son) problème d’addiction à l’alcool". Certes, mais le ministère public n’oublie pas que les automobilistes qui se sont retrouvés sur son chemin ont été victimes d’"une véritable agression". Bernard Salavador estime que le prévenu, "repentant", voire "penaud" devant ses juges, "a voulu faire la loi (ce soir-là). Et la loi, maintenant, il va la subir".

Il requiert à son encontre, dans la foulée, de quatre à cinq mois de prison, dont un mois ferme, avec sursis et mise à l’épreuve; il laisse le tribunal décider de l’opportunité de le maintenir en détention. "Il s’excuse !" insiste à son tour l’avocate de la défense, Me Anne-Lou Breussin. Elle explique ensuite que "ses animaux font réellement partie de sa famille", et qu’il les considère comme "des êtres chers". Plaidant pour obtenir une peine avec sursis et mise à l’épreuve, le conseil de cet individu sans emploi rappelle que son client "fait tout pour s’en sortir", et que la prison aurait sur lui "un effet néfaste".

Le tribunal condamne le prévenu à six mois de prison, dont quatre avec sursis et mise à l’épreuve durant deux ans. Il a également obligation de se soigner, travailler, indemniser les victimes et payer une amende de 200 €. Le trentenaire échappe au mandat de dépôt; il quitte libre le tribunal; sa peine pourrait être aménagée.