Des lentilles sur le Larzac : "quelle drôle d'idée" !

  • Jean-Marc et Hervé Brun sont des touche-à-tout. Après le blé, l’orge et les graines germées, ils s’attaquent aux lentilles.
    Jean-Marc et Hervé Brun sont des touche-à-tout. Après le blé, l’orge et les graines germées, ils s’attaquent aux lentilles. Repro CP
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Victor Guilloteau (ML)

Terroir. Aux Liquisses, sur le plateau du Larzac, Hervé et Jean-Marc Brun cultivent depuis un an des lentilles vertes en bio.

Appelez-les "Perles vertes bio du Larzac". Sur les sols arides et calcaires du plateau, aux Liquisses Hautes et Basses, sortent de terre les premières lentilles du Larzac. Voilà un an que les frères Hervé et Jean-Marc Brun, à la tête du Gaec des Liquisses, cultivent leur production en agriculture biologique dans la plus grande confidentialité.

"Quelle drôle d'idée"

"Quelle drôle d’idée", entendent souvent les deux frangins, 52 et 53ans, lorsqu’ils partagent leur expérience. "On passe un peu pour des marginaux du système, admettent-ils en souriant. On nous pose des questions. Le plus souvent, ça fait sourire. Les gens sont restés sur l’image de nos grands-parents qui triaient les lentilles à la main."

"Notre père la cultivait. On a voulu la remettre au goût du jour"Il faut dire que les lentilles, cultivées pour leurs graines riches en éléments nutritifs, souffrent ces dernières années d’un déficit d’image. Leur commercialisation, le plus souvent en conserve, n’y est certainement pas étrangère. En France, la verte du Puy bénéficie pourtant d’une AOC depuis 1996. Dans le Berry, elle est Label Rouge depuis 1966. Mais sur le Larzac, c’est une grande première.

"Remettre les lentilles au goût du jour"

Dans leur exploitation familiale, les frères Brun sont plus habitués à produire du blé et de l’orge. Il y a encore quelques années, ils engraissaient 3000agneaux par an. Depuis 1995, ces touche-à-tout ont diversifié leur activité en fabriquant, sous la marque Germ’Tonic, des graines germées, un complément alimentaire pour animaux pour lequel ils ont déposé un brevet de fabrication. "Nous cultivons des graines germées depuis 20ans. Mais ça ne peut pas durer indéfiniment. Nous avons souhaité nous diversifier une nouvelle fois", explique Jean-Marc Brun.

Et puis, cette affaire de lentilles, c’est aussi une histoire de famille. "Notre père faisait des lentilles. Elles étaient bonnes. On s’est dit, pourquoi pas les remettre au goût du jour." Encore fallait-il vendre ces Perles vertes bio du Larzac, marque que les Brun se sont empressés de déposer. Séduit, Artimat distribution, leader régional du commerce en gros de fournitures alimentaires, a sauté sur l’occasion l’été dernier. Le patron Christian Artières a vu là "l’opportunité de séduire les restaurateurs et les collectivités avec un nouveau produit, quelque chose d’ici".

Résultat : cinq tonnes des premières récoltes d’Hervé et Jean-Marc se sont écoulées dans les restaurants, cantines et maisons de retraites du département. "On reste sur l’Aveyron et l’Hérault", précise d’ailleurs M. Artières. Il se trouve en effet que même à Mende, le marché est inondé par la "petite verte du Puy". Et difficile d’aller détrôner la reine...

"On dirait du caviar !"

Pour séduire sa clientèle, Artimat mise sur un produit "nouveau", "terroir", "cultivé en bio". Sur leurs 4 hectares de production, les frères Brun font pousser leurs «perles» sans produits chimiques, avec de l’engrais bio. "On ramasse même avec une moissonneuse achetée au Puy-en-Velay, glisse Hervé. Le secret, c’est de ne pas cultiver sur des terres trop riches en eau. On sème en avril, on récolte en août, mais on ne peut commercialiser qu’en décembre." Les lentilles sont en effet triées et ventilées pour éliminer la bruche, un nuisible qui ressemble comme deux gouttes d’eau à la légumineuse.

Une fois dans l’assiette, la lentille verte se décline à toutes les sauces. Demandez son avis au chef du Château de Creissels, David Lassauvetat, lequel proposait dernièrement une dégustation. Examen de passage réussi pour la "perle verte". "On dirait du caviar", s’étonne le cuistot. Il n’est pas dit que la "perle" reste rare bien longtemps...

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