Espagne: les députés s'apprêtent à voter l'abdication du roi

  • Le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy parle le 11 juin 2014 à Madrid devant les députés, appelés à donner leur feu vert à l'abdication du roi Juan Carlos
    Le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy parle le 11 juin 2014 à Madrid devant les députés, appelés à donner leur feu vert à l'abdication du roi Juan Carlos AFP - Dani Pozo
  • Le prince Felipe et la princesse Laetizia, le 9 juin 2014, avant un diner en l'honneur du président mexicain au Palais royal de Madrid
    Le prince Felipe et la princesse Laetizia, le 9 juin 2014, avant un diner en l'honneur du président mexicain au Palais royal de Madrid Pool/AFP - Daniel Ochoa de Olza
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AFP

Les députés espagnols s'apprêtent à donner mercredi leur feu vert à l'abdication du roi Juan Carlos, ouvrant la voie, malgré les appels à un référendum, à l'avènement du futur souverain, Felipe VI, qui hérite d'une monarchie en pleine turbulence.

Le chef du gouvernement de droite, Mariano Rajoy, a ouvert la session en défendant "la continuité des institutions", "la monarchie comme le meilleur symbole de l'unité de l'Etat".

Le chef de l'opposition socialiste, Alfredo Perez Rubalcaba, a lui aussi appelé à voter le texte, exprimant sa "fidélité" à la Constitution de 1978, qui, après la dictature franquiste, a fondé l'Espagne démocratique, "ouvrant un chemin de paix et de cohabitation qui nous a menés jusqu'ici".

Selon un scénario inédit depuis le retour de l'Espagne à la démocratie, le nouveau roi âgé de 46 ans, épargné par la chute de popularité qui frappe la Couronne, prêtera serment le 19 juin, une fois la loi votée par le Sénat deux jours plus tôt.

Mercredi, le texte doit être approuvé par environ 86% des députés, principalement ceux du Parti populaire de Mariano Rajoy et du Parti socialiste.

Malgré cette majorité écrasante, des voix dissonantes s'élevaient dans l'hémicycle, notamment celles des écolo-communistes d'Izquierda unida ou des indépendantistes catalans d'ERC, qui réclament un référendum sur l'avenir de la monarchie.

"En Espagne, nous nous appuyons sur une monarchie parlementaire résolument démocratique", leur a répondu Mariano Rajoy.

D'autres partis ont prévu de s'abstenir, dont les nationalistes conservateurs catalans de CiU et basques du PNV.

Mercredi, le représentant d'Izquierda Unida Cayo Lara a dénoncé la succession en cours, qu'il a qualifiée de "sang neuf pour une dynastie en décrépitude", tandis que les députés de son groupe levaient des pancartes demandant un référendum.

- Un pays qui doute -

Car au-delà des voix, minoritaires au Parlement, qui demandent le retour à une république, la crise économique qui sévit depuis 2008, les scandales qui ont entaché la fin de règne de Juan Carlos et les affaires de corruption visant les partis politiques ont poussé les Espagnols à douter de leurs institutions et à réclamer une plus grande participation en politique.

Dans ce paysage complexe, ceux qui demandent un référendum pour pouvoir décider de qui sera leur chef d'Etat, un président ou un roi, ne remettent pas forcément en cause la monarchie, associée en Espagne à la nouvelle ère démocratique après la dictature franquiste, comme en témoignait un sondage publié dimanche par le quotidien de centre-gauche El Pais.

62% des personnes interrogées souhaitaient un référendum. Mais s'ils devaient se prononcer, 49% disaient qu'ils choisiraient une monarchie avec Felipe pour roi, contre 36% se prononçant pour une république.

Selon un autre sondage publié lundi par El Mundo, de centre droit, 55,7% des Espagnols soutiennent la monarchie et 72,9% pensent que Felipe ferait un bon roi.

La seconde république espagnole, proclamée en avril 1931, avait été balayée en 1939 par la dictature franquiste, après trois ans de guerre civile. La monarchie a été rétablie après la mort de Francisco Franco le 20 novembre 1975.

Juan Carlos, alors monté sur le trône, a construit sa légitimité en conduisant la transition du pays jusqu'à l'approbation en 1978, par référendum, de l'actuelle Constitution.

Mais les plus jeunes, qui n'ont pas connu cette époque, sont nombreux à s'interroger sur le bien-fondé de la monarchie.

Populaire, mais à la tête d'une institution contestée, Felipe aura donc une marge de manoeuvre étroite pour redorer l'image de la Couronne et maintenir une unité nationale malmenée par les séparatismes basque et catalan.

En signe d'avertissement, sitôt annoncée le 2 juin, l'abdication imminente de Juan Carlos, des milliers de manifestants étaient descendus dans les rues en criant "L'Espagne, demain, sera républicaine".

Le lendemain, dans son premier discours de futur roi, le prince héritier promettait de "mettre toutes ses forces" au service d'une Espagne "unie, diverse".

Confrontée à un délicat exercice d'équilibre entre la nécessaire solennité de l'événement et le contexte de crise qui l'entoure, la Maison royale a fait savoir que Felipe VI prêterait serment devant le Parlement, comme le veut la tradition espagnole.

Mais au contraire de l'avènement de Juan Carlos le 22 novembre 1975, l'investiture se déroulera en l'absence d'invités étrangers, et aucune célébration religieuse n'est prévue.

Source : AFP

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