Décès de Rémi Fraisse: la piste d'une "grenade offensive" privilégiée

  • Des manifestants anti-aéroport Notre-Dame-des-Landes rendent hommage à Rémi Fraisse décédé lors d'altercations avec des policiers à Sivens, le 27 octobre 2014 à Nantes
    Des manifestants anti-aéroport Notre-Dame-des-Landes rendent hommage à Rémi Fraisse décédé lors d'altercations avec des policiers à Sivens, le 27 octobre 2014 à Nantes AFP/Archives
  • Un manifestant devant la préfecture d'Albi, couché sur les restes de bombes lacrymogènes, le 27 octobre 2014
    Un manifestant devant la préfecture d'Albi, couché sur les restes de bombes lacrymogènes, le 27 octobre 2014 AFP/Archives
  • Des manifestants contre le barrage de Sivens à Albi, le 27 octobre 2014
    Des manifestants contre le barrage de Sivens à Albi, le 27 octobre 2014 AFP/Archives
  • Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve (g) aux côtés du Premier ministre Manuel Valls à l'Assemblée nationale, le 28 octobre 2014
    Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve (g) aux côtés du Premier ministre Manuel Valls à l'Assemblée nationale, le 28 octobre 2014 AFP
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Centre Presse Aveyron

L'enquête sur la mort de Rémi Fraisse, dimanche sur le site du barrage contesté de Sivens (Tarn), privilégie la thèse d'un décès dû à une grenade offensive lancée par les gendarmes après la découverte de traces de TNT sur ses vêtements, a annoncé mardi le procureur.

"On a retrouvé des traces de TNT sur certains scellés provenant des effets vestimentaires de la victime", a annoncé le procureur d'Albi, Claude Dérens. Ces résultats d'analyses "orientent donc l'enquête puisque la mise en œuvre d'un explosif militaire de type +grenade offensive+ semble acquise au dossier".

Le TNT figure en effet "dans la composition des charges des grenades lacrymogènes ou offensives utilisées par les gendarmes", a précisé le procureur.

En résumé, l'enquête "ne peut donc aujourd'hui exclure le rôle de la grenade offensive jetée depuis la redoute où s'étaient retranchés les gendarmes dans la nuit de samedi à dimanche", lorsqu'ils affrontaient des opposants au projet de barrage, à Lisle-sur-Tarn.

- Grenades offensives -

Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a aussitôt annoncé qu'il avait décidé de suspendre l'utilisation des grenades offensives utilisées par la gendarmerie. Une inspection générale doit "déterminer les conditions d'utilisation de ces projectiles dans le cadre des opérations de maintien de l'ordre", a-t-il dit.

De nombreuses questions se posent encore sur les circonstances de la mort de Rémi Fraisse, 21 ans. Selon les résultats de l'autopsie communiqués lundi, le jeune Toulousain avait été victime d'une explosion, qui avait provoqué un arrachement important d'une partie du haut du dos. Sa mort avait été instantanée.

Mardi, un opposant au projet de barrage évoquait l'hypothèse qu'une grenade ait pu se retrouver coincée entre le dos de Rémi et son sac à dos avant d'exploser.

- Appel au calme des parents -

Réagissant à la déclaration du procureur, Me Arié Alimi, avocat de la famille de Rémi Fraisse, a déclaré mardi à l'AFP : "L'hypothèse que nous soutenions depuis hier (lundi) se confirme. C'est bien une grenade offensive qui a été délibérément utilisée par les gendarmes dépendant du ministère de l'Intérieur et du ministère public".

L'avocat a confirmé avoir déposé deux plaintes: l'une pour "homicide volontaire" et l'autre pour "violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner". Et il a diffusé une déclaration des parents de Rémi appelant "au calme" lors des rassemblements organisés en hommage au jeune homme, "pour ne pas répondre à la violence par la violence".

- 'Tache indélébile' -

Mardi en fin d'après-midi, une cinquantaine d'opposants au barrage de Sivens se sont rassemblés, silencieusement à Gaillac. "Les déclarations du procureur ne nous surprennent pas, on savait déjà, nous", commentait "Greg", trentenaire. "Ce qui est arrivé à Rémi devait arriver", a-t-il dit, en assurant que les gendarmes avaient fait usage à maintes reprises de grenades à tir tendu sur le site.

Plusieurs autres rassemblements ont eu lieu en France mardi, dans le calme, comme à Bayonne, Montpellier ou encore Montreuil (Seine-Saint-Denis).

Mardi soir, sur Public Sénat, M. Cazeneuve a cependant déclaré à propos de la mort de Rémi Fraisse: "Non, il ne s'agit pas d'une bavure", "on ne peut pas présenter les choses ainsi". Puis, en qualifiant le jeune manifestant de "pacifique", il a dit: "C'est un échec de la société car il y a trop de violence".

Le Défenseur des droits Jacques Toubon a annoncé de son côté avoir décidé de se saisir d'office "de la mort de ce jeune homme", en tant qu'autorité indépendante.

Le procureur d'Albi a par ailleurs annoncé qu'il se dessaisissait du dossier au profit du parquet de Toulouse, car il est du ressort du pôle criminel de Toulouse d'instruire des faits commis par des militaires de la gendarmerie dans le Tarn.

Dans sa première réaction depuis la mort du jeune homme, le président François Hollande a promis mardi "toute la vérité, sur ce qui s'est passé". Prônant "l'apaisement", il a appelé à "une responsabilité que chacun doit avoir, dans son expression" face au décès, une allusion à la charge sonnée par les écologistes.

La députée écologiste Cécile Duflot avait qualifié la mort du manifestant de "tache indélébile sur l'action du gouvernement".

Et le Parti de gauche (PG) de Jean-Luc Mélenchon a réclamé mardi soir la démission du ministre de l'Intérieur, en contestant "la répression depuis plusieurs semaines pour faire passer coûte que coûte un projet absurde, inutile et coûteux".

Le conseil général du Tarn est maître d'ouvrage de cette retenue d'eau. Son président, le socialiste Thierry Carcenac, doit s'exprimer vendredi devant l'assemblée départementale.

"Il va demander à ses collègues du conseil général de suspendre sine die" les travaux, "pour rediscuter avec l'ensemble des parties prenantes au dossier", a assuré mardi soir le sénateur écologiste Jean-Vincent Placé.

Source : AFP

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