Espagne: Podemos, l'allié de Syriza, oppose "privilégiés" et "humiliés"

  • Le leader de Podemos, Pablo Iglesias, lors de la manifestation de Madrid, le 31 janvier 2015
    Le leader de Podemos, Pablo Iglesias, lors de la manifestation de Madrid, le 31 janvier 2015 AFP - Tom Gandolfini
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Centre Presse Aveyron

A quelques semaines de ses premiers rendez-vous électoraux, l'allié espagnol de Syriza, Podemos, qui a organisé samedi un grand meeting à Madrid avec des discours opposant "privilégiés" et "humiliés", avance peu de propositions concrètes.

"Pablo Iglesias et son parti Podemos ont sans nul doute obtenu un succès lors du rassemblement à la Puerta del Sol", a concédé dimanche le quotidien espagnol de centre droit El Mundo, ouvertement opposé à la formation antilibérale créée il y a tout juste un an.

Moins d'une semaine après la victoire aux élections législatives en Grèce de Syriza, parti de la gauche radicale, au moins 100.000 personnes ont répondu présent à la "grande marche pour le changement" organisée samedi par Podemos, selon la police.

Une sorte de lancement de campagne électorale pour le parti qui caracole en tête des sondages, devant le PSOE (Parti socialiste) et parfois même le Parti populaire (PP, droite) au pouvoir avant une année aux rendez-vous nombreux : régionales en Andalousie en mars, municipales et régionales dans d'autres régions en mai, puis à nouveau en Catalogne, et enfin en novembre, pour des législatives au cours desquelles le chef du gouvernement Mariano Rajoy mettra en jeu sa réélection.

Podemos avait soigné les détails, ayant recours aux réseaux sociaux pour mobiliser un maximum de sympathisants, venus de toute l'Espagne, et faisant en sorte que la marche s'achève sur la Place de la Puerta del Sol, vite bondée.

En 2015, "Nous gagnerons les élections face au PP", a assuré le chef du parti Pablo Iglesias, âgé de 36 ans, suscitant l'enthousiasme parmi la foule. Un peu plus tôt M. Iglesias, le numéro deux du parti Inigo Errejon, 31 ans, et le numéro trois Juan-Carlos Monedero (52), tous issus du milieu universitaire, avaient décrit une Espagne où seuls deux camps existent : ceux "d'en haut" et ceux "d'en bas". Les "puissants" et les "travailleurs". Les "privilégiés" et le reste, ceux qui ont trimé pour "construire un pays où personne n'a froid".

Un peuple qui a subi "l'humiliation et l'appauvrissement", et reprendra son destin en main, a résumé Pablo Iglesias.

- Ressort émotionnel -

"Il faut des rêveurs courageux pour défendre ceux d'en bas. Il faut davantage de Quichotte", a insisté Pablo Iglesias en s'emparant du célèbre personnage de Cervantès.

Podemos, issu du mouvement des "Indignés" né le 15 mai 2011 dans ces mêmes rues du centre historique de Madrid pour dénoncer la haute finance et la corruption, accusées d'être responsables de la misère des Espagnols (23% de la population active est au chômage), avait averti qu'au cours de cette "marche" aucune demande concrète ne serait formulée.

"Les discours n'étaient pas politiques. Il s'agissait de messages destinés à susciter l'émotion auprès d'un peuple déjà acquis", notait dimanche le journal catalan El Periodico.

Ignacio Urquizu, enseignant en sociologie issu de la même université que Pablo Iglesias, la Complutense de Madrid, est parvenu à la même conclusion.

Il est arrivé que l'on reproche au mouvement des "Indignés" son manque de propositions et "c'était une critique injuste puisqu'il ne s'agissait que d'un mouvement citoyen de protestation. Mais Podemos aspire au pouvoir dans notre pays et fait preuve de la même faiblesse", a-t-il écrit dimanche dans le quotidien El Pais.

Podemos, qui reste vague sur son programme - inspiré du socialisme chaviste (d'Hugo Chavez, président du Venezuela de 1999 à 2013) ou de la gauche du Nord de l'Europe - et refuse même d'être officiellement classé à gauche, s'est cantonné encore samedi à faire une liste de promesses très générales : lutter contre la "troïka" (BCE, UE, FMI) qui dirige les finances européennes, la corruption, les inégalités, et en faveur de l'amélioration de la santé publique et d'une restructuration de la dette publique espagnole (96,8% du PIB).

Le parti semble répondre aux aspirations de nombreux Espagnols qui ont besoin "d'espoir" et assurent ne vouloir "ni du Parti populaire, ni du Parti socialiste", usés par plus de 30 ans d'alternance au pouvoir.

"Les électeurs ne lisent pas des programmes de 400 pages", avait rappelé avant la manifestation le politologue Jose Ignacio Torreblanca, du Conseil européen de relations extérieures, un groupe de réflexion, avant de rappeler que dans les années 1980 c'est aussi de cette manière que le jeune PSOE était arrivé au pouvoir, avec le même slogan : "Pour le changement".

Source : AFP

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