Témoignages. La peintre ruthénoise et son mari Dan, avec une dizaine de participants à ses cours de dessins, étaient au Népal du 6 au 16 avril dernier. L’annonce du séisme et les images qui défilent ne les laissent pas indifférents. Ils racontent.
Un sentiment étrange anime la peintre ruthénoise Sonia Privat et son mari Dan. Il y a une dizaine de jours encore, ils étaient au cœur du tumulte de Katmandou, avec une dizaine d’autres. Partis au Népal pour peindre, ils ont écumé durant douze jours la région, ont noué de belles amitiés, fêté l’entrée dans l’année 2072... Dan et Sonia, pour leur deuxième périple népalais, ont même profité de l’occasion pour se marier une troisième fois. Sonia avait aussi axé son séjour autour de la réalisation de son prochain carnet de voyage. Puis, samedi, il y a eu le séisme. 7,8 sur l’échelle de Richter. Soit presque aussi puissant que celui, dévastateur, de 1934.
"Depuis notre arrivée, on ne dormait déjà pas beaucoup en raison du décalage horaire. Mais depuis samedi, c’est encore plus difficile", glisse Sonia, dans son atelier de peinture. Les images de leur magnifique périple défilent dans leur tête. Tous ceux qui ont réalisé de longs voyages connaissent ce sentiment d’être "toujours un peu là-bas" quelques jours après le retour.
"On essaye d'avoir des nouvelles"
Mais ces images s’entrechoquent avec celles du chaos qui défilent sur les écrans. Comme celle d’un Patan Durbar Square et tous ses temples méconnaissables. Puis il y a, surtout, tous ces gens qu’ils ont croisés là-bas. "On essaye d’avoir des nouvelles, mais c’est très compliqué", dit Sonia, un œil rivé sur le net, l’autre sur sa boîte mail. "Arjun, celui qui a organisé notre séjour, qui a vécu quatre ans à Clermont-Ferrand, a pu nous rassurer. Mais pour l’instant, nous n’avons pas de nouvelles de Prakash et Pankaj, qui nous ont accompagnés dans Katmandou". Elle répond aussi à ceux qui les croyaient encore là-bas quand la terre a tremblé.
Dans un sourire, elle explique ses premières pensées à l’évocation de cette catastrophe. "Ils vont se dire que les Dieux se sont mis en colère. C’est sûr. Mais avec leur tempérament, ils vont aussi vite se mettre à reconstruire, car il faut réhonorer les Dieux". Soudain, tous deux repensent aussi à ces rues noires de monde. "Une des rues principales n’est pas plus large que la rue Neuve à Rodez. Il faut voir la marée humaine ! On y avait d’ailleurs perdu des membres du groupe", raconte-t-elle dans un demi-sourire. "Du coup, je pense que le chiffre avancé aujourd’hui de trois mille morts est encore loin de la réalité... ". "Et puis, le séisme est survenu à midi, à un moment où les gens sont très nombreux aux abords des temples", relate Dan.
"On y retournera"
La conversation, comme un besoin de partager, se déroule autour de la pauvreté du pays, les problèmes-inimaginables ici, de pollution de l’eau- "l’intelligence de ses habitants, mais pris dans leur puissante relation aux Dieux, aux traditions et au système de castes". Tous deux pensent également à ces villages alentours, qui ont également souffert et dont on parle peu dans les médias. Comme Bhaktapur ou Pokhara. Aux trekkeurs qui affrontent les sommets himalayens mais qui sont de plus en plus mal vus. Là-bas, on dit aussi que la montagne s’est mise en colère car elle ne les veut plus...
Dans son prochain carnet de voyages "Des temples et des hommes", Sonia Privat ne fera pas fi de cette catastrophe. "Mais cela reste des temples et des hommes. Ce que j’y ai vécu." Le "sourire népalais" rythmera les pages de son carnet. Ce sourire qui lui fait dire que ce peuple va se relever. Une fois de plus. "Et de toute manière, avec Dan, on y retournera".
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