Patric Roux : «Défendre le français passe par la défense de l’occitan»

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    Patric Roux. Archives JAT
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Lola Cros

Entretien. L'Etat vient d'entériner la création d’un «office public de la langue occitane», promise par François Hollande dans sa course à la présidentielle. Pour Centre Presse, Patric Roux décrypte cette actualité et ses enjeux.

Après trois années de batailles en coulisses, médiatisées en mai dernier à l'occasion de la grève de la faim du conseiller régional aquitain David Grosclaude, l'Etat vient d'entériner la création d’un «office public de la langue occitane», promise par François Hollande dans sa course à la présidentielle.

Président de l’Estivada et fervent militant, Patric Roux se souvient de ce vendredi 5 juin, date à laquelle leur est parvenue une lettre officielle, cosignée des ministres de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, et de la Culture, Fleur Pellerin. Pour Centre Presse, il décrypte cette actualité et ses enjeux.

Comment accueillez-vous ces deux nouvelles consécutives ?

C’est une très grande victoire, une grande satisfaction pour nous. Par «nous», j’entends le mouvement occitan mais également toutes les personnes qui se sont senties concernées par nos revendications, et nous nous sommes rendu compte que nous rassemblions bien au-delà du mouvement occitan.

Il ne s’agit, pour le moment, que d’engagements de la part du gouvernement.

Il y a des mots, il va maintenant falloir qu’il y ait des actes. Déjà, je trouve dommage d’avoir perdu tant de temps. Il y a eu beaucoup de rendez-vous manqués lorsque les deux chambres parlementaires étaient de la même majorité, c’était le moment parfait. Mais si François Hollande va au bout de cette logique, nous pourrons tourner la page de plusieurs siècles de mépris vis-à-vis de l’Occitanie.

Concrètement, à quoi va servir cet «office public de la langue occitane» ?

Il s’agira d’un établissement public, avec son corps administratif et sa présidence. L’office permettra d’élaborer les cadres d’une politique linguistique dans nos régions, de doter ces dernières d’un outil capable de sensibiliser à la question de l’enseignement occitan. Ce que faisaient, jusqu’à présent, les militants. Il en existe en Bretagne, au Pays basque. Pourquoi l’Occitanie y échapperait-elle? À nous de nous mettre au travail pour répondre à une nouvelle question: «Et maintenant, comment on avance?»

Et la charte européenne pour les langues régionales ?

En réalité, la charte ne va pas changer grand-chose dans l’immédiat. En soi, sa ratification n’est pas une politique mais il s’agit d’un cadre qui permettra des politiques linguistiques. C’est un point éminemment symbolique, notamment pour faire entrer les langues régionales dans l’espace public, dans les documents administratifs.

Que répondez-vous à ceux qui voient en cette charte un affaiblissement de la langue française et de l’unité nationale ?

Je réponds en rigolant. Aujourd’hui, dire cela c’est penser la France pour ce qu’elle n’est plus, comme une puissance mondiale dont la langue serait le vecteur de puissance. La France a perdu de sa superbe, sa langue s’est considérablement affaiblie. Ne pas défendre l’occitan sous prétexte que c’est une langue régionale, qui ne servirait à rien, c’est ne pas défendre le français. Aujourd’hui, défendre le français passe par la défense de l’occitan, et vice versa. 

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