Et les juges ont décidé de projeter les images de la mise en cellule

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Ph. R.

Justice. Garde à vue mouvementée et séance vidéo : la dernière audience correctionnelle à Rodez était quelque peu atypique...

Au baccalauréat de philosophie, la compréhension de textes fait partie des choix proposés aux candidats. Au tribunal, vendredi, lors d’une comparution immédiate, les magistrats étaient en quelque sorte invités à un examen de compréhension d’une vidéo. Celle en l’occurrence issue d’une caméra fixe de surveillance d’une des cellules de garde à vue du commissariat de Rodez. Sans l’option son. Et, comme au bac, c’est presqu’une première, juges, procureur, avocat des parties civiles et avocat de la défense ont découvert pour la première fois les images lors de l’audience. Les juges ayant décidé de faire sauter les scellés posés sur les disques pour tenter d’y voir plus clair. Ce qui, au passage valu quelques passes d’armes entre toutes les parties.

Jusqu’à cinq policiers dans la cellule

La tension était palpable dans la salle d’audience, d’autant que le prévenu était plutôt à l’aise à l’oral. Le procureur et l’avocat de la défense ont même avoué, à l’issue de la projection, avoir eu un peu peur de ce qu’ils allaient visionner.

Sur ces images, donc, on voit un prévenu placé en cellule, lors d’un placement en garde à vue pour une histoire non éclaircie de menaces de mort, et qui s’était présenté de lui-même au commissariat, avoir maille à partir avec un, deux, trois, puis jusqu’à cinq policiers. Le tout se déroulant sur un peu plus de dix minutes.

Restait aux magistrats à interpréter ces images muettes, à partir desquelles ils allaient fonder une grande partie de leur jugement concernant ce prévenu âgé de 21 ans, déjà bien connu de la justice, avec pas moins d’une quinzaine de mentions (forcément mauvaises) au casier judiciaire.

« Il est son propre ennemi »

Pour le procureur Delpérié, « c’est une résistance violente à des policiers qui a finalement duré un long moment. J’ai eu peu de voir partir une gifle ou un coup de poing de la part d’un policier tant cela durait ». Et de poursuivre à propos du prévenu : « Il est son propre ennemi. À ce jeu, il ne gagne rien, si ce n’est des mois de prison ». Il a requis trois mois de prison assortis d’un mandat de dépôt.

L’avocat de la défense, Me Galandrin, y alla donc, ensuite, de son interprétation. « À un moment, on ne voit même plus son client. On croirait une mêlée de rugby, et c’est lui le ballon avec ses 45 kilos tout mouillés. Moi aussi j’ai été rassuré après avoir vu ces images. Il aurait pu cracher sur les policiers, les frapper... mais on ne voit rien de tout cela » . Et de plaider la relaxe : « Je comprends que ce soit compliqué pour vous de prononcer une relaxe, mais à la vue de cette vidéo... »

Et d’insister en cas de condamnation pour que son client puisse aménager sa peine et ne pas passer directement par la case prison. Une perche tendue que les juges saisiront, condamnant le prévenu à quatre mois de prison, soit un mois de plus que la peine requise par le procureur. Le prévenu devra en outre verser 500 euros à chacun des trois policiers qui s’étaient constitués partie civile.

À l’issue de l’audience, un policier mettait une bonne note à cette audience : « C’est rare de voir ce qu’il se passe dans les cellules. Là, tout le monde a pu voir que le métier n’est pas toujours facile ». Une interprétation unanime.
 

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