"Oui" au référendum et reprise des négociations: le pari de Bruxelles contre un "Grexit"

  • Un retraité attend à la sortie de la Banque de Grèce à Athènes, le 29 juin 2015
    Un retraité attend à la sortie de la Banque de Grèce à Athènes, le 29 juin 2015 AFP - Angelos Tzortzinis
  • Chronologie de la crise financière grecque depuis 2010
    Chronologie de la crise financière grecque depuis 2010 AFP - G. Handyside/J. Storey
  • Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker à Bruxelles, le 29 juin 2015
    Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker à Bruxelles, le 29 juin 2015 AFP - John Thys
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Centre Presse Aveyron

Mise sous cloche du système financier, victoire du "Oui" au référendum en Grèce et reprise des négociations: voilà le pari à haut risque des Européens pour empêcher une sortie de la Grèce de l'euro.

La spectaculaire rupture des négociations avec Athènes, ce week-end, a obligé les responsables européens à s'adapter et à tenter le tout pour le tout: jouer le jeu du gouvernement Tsipras en entrant dans la logique du référendum, et faire campagne pour le "oui", en espérant en prime une chute du gouvernement Syriza dans le cas où il serait désavoué.

"On rentre dans une semaine extrêmement compliquée, pour la Grèce comme pour ses partenaires", souligne Philippe Waechter, économiste en chef chez Natixis. "L'avenir du pays est lié au référendum de dimanche. Mais son issue reste incertaine", ajoute-t-il.

Annoncée dans la nuit de vendredi à samedi par le Premier ministre grec Alexis Tsipras, cette consultation, qui doit permettre aux Grecs de valider ou non la dernière proposition d'accord faite à Athènes par les créanciers (UE, FMI, BCE), a surpris les dirigeants européens.

Mais ces derniers en ont pris leur parti et s'invitent dans la campagne électorale, en disant clairement aux Grecs: vous votez pour ou contre votre présence dans l'euro, voire l'Europe.

"Je demanderai aux Grecs de voter +oui+", a déclaré lundi le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, tandis qu' "un +non+ voudrait dire, indépendamment de la question posée, que la Grèce dit +non+ à l'Europe. "L'enjeu (...) c'est de savoir si les Grecs veulent rester dans la zone euro", ou "s'ils prennent le risque d'en sortir", a déclaré de son côté le président français François Hollande.

- Changement de majorité -

Selon un sondage Kapa research pour l'hebdomadaire Vima, réalisé avant l'annonce du référendum, 47,2% des Grecs sont pour un accord et 33% contre, 19,8% ne se prononçant pas. Un second sondage, de l'institut Alco, donne lui aussi l'avantage aux partisans d'un accord avec l'Europe, à 57% contre 29%.

Car les Grecs, déjà préoccupés par la crainte d'un défaut de paiement, sont maintenant pris à la gorge par les mesures de restrictions bancaires appliquées depuis lundi pour éviter un effondrement des banques.

Ces facteurs feront-ils pencher la balance en faveur du "oui"?

Les Européens "ont fait à Tsipras une offre qu'il ne pouvait pas accepter, et l'ont sans doute fait sciemment", assure Paul Krugman, prix Nobel d'économie, dans un billet publié dans le New York Times. D'après l'économiste, "l'ultimatum (des créanciers) était une stratégie pour remplacer le gouvernement grec", qui appelle à rejeter les conditions des créanciers.

L'objectif des Européens, suivant cette pensée, serait de provoquer la chute de Syriza, arrivé au pouvoir en janvier sur la promesse d'une politique anti-austérité. Puis de reprendre les négociations avec un gouvernement technique ou une majorité plus favorable aux propositions des créanciers.

"Le gouvernement s'est engagé à mettre en œuvre le verdict du peuple", a assuré le ministre des Finances, Yanis Varoufakis. Si les Grecs "veulent que nous signons (l'accord), nous le ferons, même avec un remaniement ou une autre configuration au niveau du gouvernement", a-t-il ajouté, laissant entendre qu'en effet le sort de l'équipe dirigeante est en jeu.

- "malaise" et "rejet" -

Le maintien d'Athènes dans la zone euro, dans un tel scénario, impliquerait toutefois selon M. Waechter "de commettre des entorses vis-à-vis de l'orthodoxie financière", pour "trouver des solutions à court terme".

Les gardiens du temple, BCE et FMI, devront se montrer conciliants.

La BCE devra maintenir les banques grecques en vie malgré le défaut de paiement au FMI très probable mardi ou mercredi. Le Fonds lui, "n'a pas de problèmes de trésorerie. Il informera son conseil d'administration que la Grèce n'est pas à jour", estime Nicolas Véron, chercheur à l'institut Bruegel, mais cela prendra du temps.

Si l'incertitude politique se prolongeait en Grèce, cette position serait cependant plus difficile à tenir. Et surtout, rien ne dit que le scénario de Bruxelles, pariant sur l'attachement des Grecs à l'euro et à l'Europe, se vérifiera dimanche.

"L'effort doit venir des Européens", sous la forme d'un engagement "sur une restructuration de la dette" estime Ludovic Subran, chef économiste d'Euler Hermes, qui concède toutefois qu'une concession de cette nature pourrait ne pas suffire à emporter l'adhésion des Grecs.

M. Waechter craint lui que cette pression européenne ne s'avère contre-productive: "On se trouve dans un situation extrêmement compliquée pour les Grecs, les banques sont fermées. Il faut éviter que ce malaise ne se transforme en rejet de l'Europe".

Source : AFP

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