La Turquie risque de s'enfoncer plus dans le bourbier syrien

  • Photographie prise le 21 juillet 2015 à Gaziantep, lors des funérailles des victimes de l'attentat suicide qui a frappé, la veille, la ville de Suruç, proche de la frontière syrienne
    Photographie prise le 21 juillet 2015 à Gaziantep, lors des funérailles des victimes de l'attentat suicide qui a frappé, la veille, la ville de Suruç, proche de la frontière syrienne AFP - BULENT KILIC
  • Funérailles des victimes de l'attentat suicide qui a frappé la ville de Suruç, proche de la frontière syrienne, le 21 juillet 2015 à Gaziantep
    Funérailles des victimes de l'attentat suicide qui a frappé la ville de Suruç, proche de la frontière syrienne, le 21 juillet 2015 à Gaziantep AFP - BULENT KILIC
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Centre Presse Aveyron

L'attentat sanglant ayant frappé lundi la Turquie et portant la marque du groupe Etat islamique (EI) pourrait être le signe précurseur de plus d'attaques dans ce pays et pousser Ankara à s'impliquer dans la lutte antijihadistes en Syrie voisine, selon les experts.

Au moins 32 personnes ont été tuées lorsqu'un kamikaze présumé de l'EI s'est fait exploser à un rassemblement de jeunes proches de la cause kurde dans la ville turque de Suruç, près de la frontière de la Syrie en guerre depuis plus de quatre ans.

"Jusqu'à présent, et même sans revendication de l'EI, ce groupe est l'auteur le plus probable de l'attentat", affirme à l'AFP Charles Lister, analyste au Brookings Doha Centre.

"Pour le moment, tout semble pointer du doigt l'EI: la manière d'attaquer, la cible spécifique et les implications politiques de l'attentat", ajoute-t-il.

L'EI a été rapidement désigné comme coupable par Ankara qui, pour la première fois, a accusé directement l'organisation ultraradicale de perpétrer un acte terroriste sur son sol.

Les jeunes victimes rassemblées dans le centre culturel de Suruç préparaient une mission d'aide à Kobané, ville syrienne frontalière devenue un symbole de la lutte antijihadistes après que les combattants de l'EI en ont été chassés par les miliciens kurdes syriens en janvier.

Depuis ce succès, les kurdes syriens sont parvenus à grignoter progressivement le territoire contrôlé par l'EI, notamment avec l'appui des frappes de la coalition internationale dirigée par Washington commencées en septembre. Mais l'EI a lancé une contre-offensive, attaquant de nouveau Kobané, Hassaké et Qamichli (nord).

- Recrudescence des attaques -

Pour les analystes, l'attentat pourrait renforcer la volonté d'Ankara de combattre en territoire syrien l'organisation jihadiste qui contrôle de larges pans de territoires en Syrie mais aussi en Irak, pays également voisin de la Turquie.

"Cela va encourager la Turquie à s'impliquer plus dans la lutte anti-EI, avec la possibilité d'envoi de troupes au sol", d'après Max Abrahms, un expert du "terrorisme" et professeur à la Northeastern University aux Etats-Unis.

M. Abrahms estime que les rafles des forces de sécurité durant lesquelles des dizaines de membres et partisans de l'EI en Turquie ont été arrêtées sont des "mesures sérieuses même si elles sont tardives".

"Le fait que ces mesures aient été suivies d'une attaque présumée de l'EI contre la Turquie n'est pas du tout surprenant", selon lui.

Selon M. Lister, le risque est qu'il y ait davantage d'attaques sur le sol turc. "La véritable inquiétude est que cet attentat pourrait être le déclencheur d'attaques plus fréquentes et d'incidents similaires".

Ces dernières années, la Turquie a été vivement critiquée d'avoir fermé l’œil sur l'utilisation par l'EI de sa frontière pour faire passer combattants et armes en Syrie.

- Une attaque 'contre les kurdes' -

Le principal objectif d'Ankara dans le conflit syrien a été dès le départ l'éviction du pouvoir du président Bachar al-Assad et l'endiguement des groupes pro-kurdes en Turquie.

Celle-ci a exprimé à plusieurs reprises sa crainte de voir émerger en Syrie une région autonome tenue par les milices kurdes proches du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui mène la rébellion sur son sol depuis 1984 et classé "organisation terroriste".

La Turquie a même été alarmée par la montée en puissance des miliciens kurdes de Syrie, ne cachant pas sa déception face à leurs victoires contre l'EI.

Aaron Stein, analyste auprès de l'Atlantic Council, voit dans l'attentat un "débordement de la bataille entre les Kurdes et l'EI" en Syrie. "Il s'agirait plus d'une attaque contre des Kurdes (turcs) soutenant la cause de Kobané" plutôt qu'une attaque contre la Turquie.

"Nous constatons une recrudescence de la violence contre les Kurdes en Turquie", dit-il.

Source : AFP

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