Une agriculture plus à l’écoute des médecines naturelles

  • Au rucher école de Toizac, Gilles Grosmond évoque les techniques alternatives pour maîtriser la santé de la ruche.
    Au rucher école de Toizac, Gilles Grosmond évoque les techniques alternatives pour maîtriser la santé de la ruche. PR
Publié le
Philippe Routhe

Gros plan. De multiples formations sont aujourd’hui proposées pour soigner autrement les animaux. Ce qui nécessite un changement en profondeur que les agriculteurs sont prêts à adopter.

Petit à petit, les médecines alternatives et naturelles font leur retour dans les champs et les exploitations. Du brumisateur d’huiles essentielles pour prévenir des problèmes de bronches des bovins à l’utilisation de l’homéopathie ou la pratique de l’ostéopathie pour soigner les bêtes en passant, entre autres, par l’observation des animaux, le monde agricole semble marqué par l’envie d’une sorte de retour aux sources, avec en plus le savoir lié aux nombreuses recherches dans le domaine.

Sans doute plus présente dans les exploitations «paysannes», cette méthode d’approche gagne du terrain dans les exploitations dites conventionnelles. Preuve en est le panel de formation proposé actuellement par le centre de formation de la chambre d’agriculture de l’Aveyron. «C’est vraiment un public de plus en plus large qui s’y intéresse», confie Sandrine Viguier, en charge de la formation à la chambre. Et les raisons de cet attrait sont, semble-t-il, multiples, le premier étant la limitation des usages des antibiotiques.

«Ras-le-bol» des antibiotiques

«Les éleveurs en onturs en ont ras-le-bol», résume Gilles Grosmond, brillant vétérinaire dans le Puy-de-Dôme qui, depuis près de quarante ans, axe son travail sur les effets bénéfiques des plantes. Ce n’est cependant que depuis quelques années qu’il note une nouvelle écoute des agriculteurs.

«Il faut dire que la société n’arrête pas de leur faire des reproches et ils ont envie eux aussi d’être vraiment fiers de leur métier comme l’étaient leurs parents ou leurs grands-parents». Pour Hervé Gratien, vétérinaire homéopathe, la raison tient aussi dans «l’échec de la médecine traditionnelle». La tendance liée à la protection de l’environnement et la possibilité de diminuer les coûts pèsent aussi dans la décision des agriculteurs.

«Mais il s’agit bien d’un changement en profondeur», prévient Gilles Grosmond. «Prenons un exemple: un éleveur va vermifuger systématiquement son troupeau et une méthode alternative consiste à développer une activité antiparasitaire au sein du troupeau sur la longueur. Pour cela, il faut adopter une nouvelle approche de la gestion du troupeau». À apprécier le succès des formations proposées, il faut croire que cela fonctionne.

A tel point qu’il est de plus en plus difficile de trouver des formateurs disponibles, tels ceux du GIE zone verte, un groupement de vétérinaire orienté vers des pratiques plus paysannes, auquel fait appel la chambre d’agriculture. Hervé Gratien est un de ceux-là: il a vu le changement de mentalité. «Je vois vraiment ce changement dans le domaine de l’homéopathie. Ce sont plutôt de jeunes éleveurs qui s’y intéressent. Quelque chose se passe actuellement».

«Difficile de revenir en arrière»

«C’est aussi un peu plus enseigné dans les écoles. Au lycée de Bernussou par exemple, le sujet est abordé avec l’agroécologie» confie Sandrine Viguier. «Mais ce n’est pas assez !», poursuit Gilles Grosmond, qui ne cesse d’être sollicité. Au rucher école de Toizac, Gilles Grosmond a passé la journée avec une dizaine d’apiculteurs. Il a évoqué les différentes techniques alternatives pour maîtriser la santé de la ruche.

«Tous les apiculteurs souffrent de la mortalité des abeilles. Il faut alors trouver un équilibre dans la ruche pour la santé de l’abeille», glisse Jérôme de Lescure, président de l’Abeille d’Aveyron. Et naturellement, cette réorientation vers le «naturel» ne peut que le réjouir. Mais il reste cependant mesuré : «Il faudra, je pense, une génération d’agriculteurs pour entrevoir un véritable changement».

Et d’évoquer les utilisations massives de pesticides, une recherche chimique qui avance tel un rouleau compresseur. Mais pour le coup, impossible de dire qu’il n’existe pas de solutions alternatives. Des formations ont été créées en ce sens. «Même si, on en a bien conscience, dans une agriculture de plus en plus structurée, il est de plus en plus difficile de revenir en arrière». Mais c’est peut-être le prix à payer «pour sauver notre agriculture», souffle Hervé Gratien. 

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?