Corée du Sud: au festival de Busan, deux films pointent du doigt la perversité du système éducatif

  • Photo non datée fournie par le Festival international de Busan le 30 septembre 2015, montrant une image extraite du documentaire sud-coréen "Reach for the SKY"
    Photo non datée fournie par le Festival international de Busan le 30 septembre 2015, montrant une image extraite du documentaire sud-coréen "Reach for the SKY" BIFF/AFP - BIFF
  • Photo non datée fournie par le Festival international de Busan le 30 septembre 2015, montrant une image extraite du documentaire sud-coréen "Reach for the SKY"
    Photo non datée fournie par le Festival international de Busan le 30 septembre 2015, montrant une image extraite du documentaire sud-coréen "Reach for the SKY" BIFF/AFP - BIFF
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Centre Presse Aveyron

Un "gagnant" pour 99 "misérables losers"... Deux films projetés au Festival international de Busan jettent une lumière crue sur la perversité du système éducatif en Corée du Sud, hyper concurrentiel, et néanmoins encensé à l'étranger.

"Reach for the SKY", un documentaire, et "Quatrième place", une fiction, traitent de sujets différents: l'école et le sport. Mais ces films à l'affiche de la 20e édition du Festival de Busan, qui s'ouvre jeudi en Corée du Sud, racontent une même histoire, celle des travers de la formation sud-coréenne.

Co-réalisé par le Sud-Coréen Choi Woo-Young et le Belge Steven Dhoedt, "Reach for the SKY" suit trois adolescents à un moment critique de leur jeunesse: la période des concours annuels d'entrée à l'université.

Ces tests peuvent leur ouvrir les portes des plus prestigieux campus du pays, garantie d'une belle carrière, parfois aussi d'un beau mariage.

"SKY" ("ciel" en anglais) est un acronyme tiré des noms des trois meilleures institutions du pays: les universités Seoul National, Korea et Yonsei qui ne prennent que 1% des diplômés du secondaire.

L'idée du documentaire était selon Choi de présenter la "face cachée" d'un système éducatif souvent considéré à l'étranger comme un modèle de méritocratie.

- Suicide et dépression -

Sauf que la pression associée à ces concours engendre aussi des résultats beaucoup moins glorieux: dépressions, suicides...

"Certains à l'étranger font l'éloge de notre système éducatif, de l'excellence de nos jeunes en mathématiques et en sciences", relève Choi. "Mais je voulais montrer l'envers du décor: 1% des adolescents sont des gagnants, tandis que les autres se considèrent comme de misérables ratés", dit-il à l'AFP.

Deux des jeunes qui apparaissent dans le documentaire sont des redoublants. Pour leur deuxième tentative à l'examen, ils se sont inscrits dans une boîte à concours. La discipline y est quasi militaire et des caméras surveillent les étudiants 24 heures sur 24.

En Corée du Sud, l'éducation privée est un business qui pèse 27 milliards de dollars et compte aussi ses gourous, tel Kim Ki-Hoonun, professeur d'anglais.

On le voit dans le documentaire au milieu d'un stade géant, dispensant ses conseils à des milliers d'adolescents et de parents béats.

Ce n'est pas un professeur mais un moniteur qui est au centre de "Quatrième place", une fiction sur un jeune nageur, Jun-Ho, et sa mère, rongée par une ambition maladive pour son fils.

Ce dernier ne grimpe jamais sur le podium, aussi engage-t-elle un entraîneur réputé tirer le meilleur de ses protégés, quoi qu'il en coûte.

- La fin justifie les moyens -

Les résultats de Jun-Ho suivent, suscitant la fierté de sa mère. Qu'importe finalement s'il rentre des entraînements avec des marques de coups sur le corps.

Les châtiments corporels ont globalement disparu des salles de classe sud-coréennes. Mais ils demeurent une réalité dans le monde du sport, où les méthodes musclées ont été citées comme une des raisons des remarquables résultats enregistrés par le sport sud-coréen dans les compétitions internationales.

Jung Ji-Woo, le réalisateur, a rencontré des centaines de jeunes, de parents, d'entraîneurs pour préparer ce film, commandé par la Commission coréenne des droits de l'Homme.

La réalité, assure-t-il, est "bien pire" que sa fiction: "Beaucoup de mères savent que leur enfant est battu. Mais pour elles, tout est permis du moment que leur enfant peut, grâce à cela, atteindre rapidement les sommets".

Le film défend la thèse d'une transmission des comportements, puisque Jun-Ho, de plus en plus traumatisé, devient à son tour violent vis-à-vis de son petit frère.

Au final, cette "Quatrième place" est aussi une métaphore de ce qu'il en aura coûté à la société sud-coréenne pour se relever, après la guerre, et se hisser au rang de quatrième économie d'Asie.

"Dans notre société, la fin a toujours justifié les moyens, et cette mentalité est profondément enracinée dans la conscience collective", explique Jung.

"Une telle quête de résultats à tout prix a peut-être aidé notre société à se développer (...) mais il est temps de passer à la prochaine étape, une étape plus civilisée."

Source : AFP

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