Roumanie: un Premier ministre par intérim, main tendue aux manifestants

  • Manifestation contre la corruption de la classe politique roumaine, le 5 novembre 2015 à Bucarest
    Manifestation contre la corruption de la classe politique roumaine, le 5 novembre 2015 à Bucarest AFP - DANIEL MIHAILESCU
  • Le Premier ministre roumain par intérim,  Sorin Campeanu, le 5 novembre 2015 à Bucarest
    Le Premier ministre roumain par intérim, Sorin Campeanu, le 5 novembre 2015 à Bucarest AFP - DANIEL MIHAILESCU
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Centre Presse Aveyron

Un Premier ministre intérimaire a été nommé jeudi en Roumanie sans pour autant calmer une population excédée par la corruption de la classe politique, après l'incendie meurtrier dans une discothèque de Bucarest.

Le président Klaus Iohannis a nommé le ministre de l'Education Sorin Campeanu à la tête d'un gouvernement par intérim chargé de gérer les affaires courantes jusqu'à la formation d'un nouvel exécutif.

La veille, le Premier ministre social-démocrate Victor Ponta, sous pression depuis plusieurs mois en raison de ses déboires avec la justice, avait fini par démissionner après une grande manifestation populaire dans la capitale.

Le chef de l'Etat conservateur a décidé, chose inédite dans le pays, de faire un geste envers les manifestants, surtout des jeunes, à nouveau dans la rue mercredi et jeudi soir pour crier leur ras-de-bol face à un système politique qu'ils jugent "corrompu et incompétent".

"Je vous ai vus, je vous ai entendus et je tiendrai compte de vos demandes", a déclaré M. Ponta. Il a convoqué en consultation pour la formation d'un nouveau gouvernement "un groupe représentant aussi bien la société civile que ce qu'on appelle +la rue+".

Ces consultations sont prévues vendredi, après un premier round de pourparlers avec les partis politiques.

Jeudi soir, quelque 10.000 personnes, surtout des jeunes, se sont de nouveau rassemblées place de l'Université, haut lieu de la révolution en 1989 contre le régime du dictateur Nicolae Ceausescu, pour une troisième soirée consécutive de mobilisation, selon les gendarmes.

Des manifestations rassemblant au total 7.000 personnes ont eu lieu au même moment dans plusieurs autres grandes villes.

- "Système infâme" -

La tâche s'annonce ardue pour Klaus Iohannis. Les Roumains l'avaient élu il y a un an dans l'espoir qu'il agisse avec fermeté contre la corruption, mal endémique du pays.

Mais pour beaucoup, le drame la semaine dernière dans une boîte de nuit bucarestoise, qui a fait 32 morts et près de 200 blessés, montre que rien n'a changé.

"Justice n'a pas été encore faite. J'ai deux copines qui sont mortes dans l'incendie", a déclaré à l'AFP une manifestante de 24 ans, souhaitant garder l'anonymat.

Les démissions "ne changent pas grand chose. Cela n'apaise pas ma souffrance", a-t-elle ajouté en souhaitant un réel changement de la société roumaine rongée par la corruption.

"J'aimerais qu'on s'organise plus, qu'il y ait des leaders parmi nous, qu'on forme un groupe de gens qui souhaitent sauver ce pays", a proposé une autre participante Ileana Andrei, blogueuse.

Les racines du malaise remontent aux années 1990. "Le vol et de la corruption, cela fait 26 ans qu'on est confronté à ça", a estimé Ciprian Iordache, en référence à la transition post-communiste.

Pour l'éditorialiste Iulian Anghel du quotidien Ziarul Financiar, la démission surprise du gouvernement Ponta intervient trop tard, alors que le mécontentement au sein de la société n'a cessé de croître.

Comparant la Roumanie à un "volcan qui risque d'entrer en éruption à tout moment", l'analyste politique Razvan Orasanu estime lui que la chute du gouvernement Ponta "aura un sens uniquement si la pression populaire contraint les partis politiques à procéder à un changement de génération et à un assainissement en profondeur dans leurs rangs".

"Tous les partis sentent que quelque chose se passe au sein de la société, qu'ils n'ont plus affaire au même électorat qu'avant, et essayent de faire face à ce changement", affirme à l'AFP Corina Rebegea, du Centre d'analyse des politiques européennes (CEPA), basé à Washington.

Mais les manifestants veulent un gouvernement technocrate, et ne font plus confiance à aucune formation politique. "Tous les partis sont pourris", disent-ils.

Source : AFP

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