L'"amère expérience" européenne de réfugiés afghans rentrés au pays

  • Abdul Ghafour Aryan, un afghan de 24 ans, le 1er mars 2016, a vécu un cauchemar dans un centre de réfugiés au nord-est de Francfort et a préféré rentrer en Afghanistan
    Abdul Ghafour Aryan, un afghan de 24 ans, le 1er mars 2016, a vécu un cauchemar dans un centre de réfugiés au nord-est de Francfort et a préféré rentrer en Afghanistan AFP - WAKIL KOHSAR
  • Abdul Ghafour Aryan, un afghan de 24 ans, le 1er mars 2016, a vécu un cauchemar dans un centre de réfugiés au nord-est de Francfort et a préféré rentrer en Afghanistan
    Abdul Ghafour Aryan, un afghan de 24 ans, le 1er mars 2016, a vécu un cauchemar dans un centre de réfugiés au nord-est de Francfort et a préféré rentrer en Afghanistan AFP - WAKIL KOHSAR
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Centre Presse Aveyron

Mohammed Asif visait "une vie confortable" en Allemagne. Las, son périple homérique jusqu'en Europe et deux mois cauchemardesques dans des centres de réfugiés ont convaincu cet Afghan de rentrer à Kaboul, malgré les violences et le chômage.

"Je pensais que mon rêve allait se réaliser en Europe", explique Mohammed Asif. Ce rêve, ils sont nombreux à le poursuivre pour fuir la guerre et un horizon économique calamiteux.

L'an dernier, plus de 1,25 million d'étrangers ont déposé une demande d'asile dans l'UE, soit le plus haut niveau jamais enregistré selon l'Office européen de statistiques. Les Syriens sont les plus nombreux et les Afghans en deuxième position avec 178.230 demandes.

Sur la corde raide financièrement, Mohammed Asif Nouri, diplômé en économie de 26 ans, a pris la route de l'exode à la fin de l'année dernière.

Il raconte un périple éprouvant qui l'a mené de Kaboul à Francfort-sur-le-Main (Allemagne) en passant par l'Iran, la Turquie, la Grèce, la Macédoine, la Serbie, la Croatie, la Slovénie et l'Autriche.

"Le plus dur a été de passer d'Iran en Turquie", dit-il. "Il y avait dans notre groupe un garçon afghan grassouillet qui avait du mal à marcher en montagne. Les passeurs lui ont donné un coup de pied, il a dévalé la pente et on n'a jamais retrouvé son corps".

Balloté d'un centre de réfugiés à l'autre, de Francfort à Hambourg, de Hambourg au land de Saxe-Anhalt, Mohammed Asif a côtoyé des Syriens, des Irakiens et une constante: "Le nationalisme européen".

"Les Européens pensent que nous allons détruire leur culture", avance-t-il. Et de raconter comment un Allemand auquel il demandait son chemin l'a d'abord sommé de s'écarter de trois mètres avant de lui répondre "en allemand, alors que 99% des Allemands parlent anglais".

Et la méfiance envers les migrants s'est encore accrue après la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne où des femmes ont été agressées par des hommes présentés par les autorités comme étant majoritairement originaires d'Afrique du Nord.

Au bout de deux mois, Mohammed Asif en a eu assez. Il est rentré en Afghanistan grâce à l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), sans attendre que sa demande d'asile soit examinée.

"L'Europe a été une expérience amère pour moi", lâche-t-il.

- 'Ici, l'avenir est trop sombre' -

Un cauchemar que son compatriote Abdul Ghafour Aryan, 24 ans, a lui aussi vécu dans un centre de réfugiés. Il a passé trois mois à Fulda, au nord-est de Francfort, après un voyage pour lequel il a payé 7.500 dollars.

"Dans le camp, les toilettes étaient sales et à tous les repas on n'avait droit qu'à de la confiture et du beurre", explique Abdul Ghafour.

Et puis il y a cette impression d'avoir été traité en réfugié de seconde classe. Les Syriens avaient droit à des cours d'allemand, mais pas les Afghans, assure-t-il. "Les Allemands devraient savoir que l'Afghanistan est en guerre, tout comme la Syrie. Nous devrions être traités de la même façon".

Abdul Ghafour a profité d'un vol pour Kaboul organisé il y a une dizaine de jours par l'OIM. 135 réfugiés afghans au total ont alors décidé de rentrer. Un retour salué par le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas de Maizière.

Selon l'OIM, 1.000 migrants afghans ont demandé à quitter l'Allemagne. Le nombre de ceux qui ont déjà franchi le pas a fortement augmenté entre 2014 et 2015, passant de 92 à 304.

"Quitter son pays, c'est surtout difficile pour les jeunes hommes seuls à cause de la séparation familiale", note Jochen Oltmer, spécialiste des mouvements de migration à l'université d'Osnabrück (Allemagne). "Ils se rendent compte que faire venir leur famille dans le pays d'accueil va prendre plusieurs années, alors certains abandonnent".

Ni ce constat, ni l'appel du président du Conseil européen Donald Tusk aux migrants économiques à ne pas venir en Europe ne sauraient décourager Nomyalay Saïd. Cet ancien interprète des forces américaines en Afghanistan n'a pas de travail et passe ses journées dans un parc de Kaboul. Si ses recherches n'aboutissent pas bientôt, le jeune Afghan va contacter un passeur "pour aller en Europe".

"Ici, l'avenir est trop sombre", dit-il.

Source : AFP

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