Loi travail: Valls dégaine le 49-3 face à une "conjonction d'oppositions", motion de censure jeudi

  • Le Premier ministre Manuel Valls devant l'Assemblée le 10 mai 2016
    Le Premier ministre Manuel Valls devant l'Assemblée le 10 mai 2016 AFP - Eric FEFERBERG
  • La ministre du Travail Myriam El-Khomri arrive à l'Elysée à Paris pour un conseil des ministres extraordinaire, le 10 mai 2016
    La ministre du Travail Myriam El-Khomri arrive à l'Elysée à Paris pour un conseil des ministres extraordinaire, le 10 mai 2016 AFP - DOMINIQUE FAGET
  • Le député européen et candidat à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon lors d'une conférence sur la mondialisation à Montréal au Canada le 23 avril 2016
    Le député européen et candidat à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon lors d'une conférence sur la mondialisation à Montréal au Canada le 23 avril 2016 AFP/Archives - Marc BRAIBANT
  • Le chef de file des députés LR Christian Jacob à l'Assemblée nationale à Paris, le 22 mars 2016
    Le chef de file des députés LR Christian Jacob à l'Assemblée nationale à Paris, le 22 mars 2016 AFP/Archives - Eric FEFERBERG
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Centre Presse Aveyron

Face au risque de voir le projet de loi travail rejeté à l'Assemblée par "une conjonction d'oppositions", Manuel Valls a dégainé mardi l'arme constitutionnelle du 49-3 pour faire adopter le texte sans vote, sauf si une motion de censure, aussitôt déposée par la droite, est adoptée jeudi.

En signe de protestation, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées dans plusieurs villes à l'appel de Nuit debout, entraînant des heurts avec les forces de l'ordre.

Devant les députés, vers 16H30, le Premier ministre a formellement engagé la responsabilité de son gouvernement, après le feu vert un peu plus tôt d'un conseil des ministres extraordinaire.

"Nous exprimons clairement une fronde contre la division", a lancé le chef du gouvernement aux socialistes opposés à ce texte, porté avec "engagement et opiniâtreté" par la ministre du Travail Myriam El Khomri.

"Poursuivre le débat parlementaire fait courir le risque de revenir sur l'ambition du projet de loi, de renoncer à sa cohérence, d'abandonner le compromis que nous avons construit et d'offrir le spectacle désolant de la division et des postures politiciennes", a plaidé Manuel Valls, deux jours avant une nouvelle journée de manifestations, à l'appel notamment de la CGT et FO.

Ces deux syndicats, avec cinq autres organisations syndicales, ont appelé mardi soir dans un communiqué à "construire" deux nouvelles journées de grèves et manifestations, les 17 et 19 mai, pour dénoncer la loi travail.

Les groupes LR et UDI ont annoncé de leur côté le dépôt d'une motion de censure, qui sera débattue jeudi après-midi. Pour faire tomber le gouvernement, elle devra être adoptée par la majorité des membres de l'Assemblée, soit 288 députés. A eux seuls, LR et UDI regroupent 226 députés.

"Tout est fait pour précipiter les choses dans l'affolement, la peur des manifestations", a dénoncé le chef de file des députés LR Christian Jacob, la droite fustigeant "l’impasse dans laquelle François Hollande a mené notre pays".

- 'Triple coup de force' -

Mardi soir, Manuel Valls a toutefois affiché sa sérénité, disant "ne pas craindre" que son gouvernement puisse être renversé. Il a aussi assuré que l'usage du 49.3 lui "fend(ait) le coeur", alors que dans les rangs socialistes, des élus critiques mais non "frondeurs", ont dénoncé "un braquage démocratique" a l'instar de Yann Galut, ou une "erreur politique" pour Karine Berger.

Le chef de file des députés Front de gauche André Chassaigne, qui a dénoncé "un triple coup de force" contre "le monde du travail", "les Français" et "la représentation nationale", voudrait aussi réunir le minimum requis de 58 députés pour une motion de censure "de gauche".

Il table sur le soutien d'élus écologistes, dont le courant contestataire a dénoncé mardi un "déni de démocratie" avec le 49.3 et "frondeurs". Une "décision collective" sera prise "probablement demain", selon l'un de leurs chefs de file, Christian Paul.

Les communistes se disent aussi prêts à voter la motion de la droite et Jean-Luc Mélenchon a appelé tous les députés de gauche à les imiter. Le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement Jean-Marie Le Guen a jugé "inconcevable" que des députés PS puissent s'associer à la droite. "Comme d'hab', j'imagine qu'ils ne nous rejoindront pas", a ironisé Benoist Apparu (LR).

Même si le débat sur les 5.000 amendements a tourné court, le gouvernement en retiendra 469. Sur les licenciements économiques, il a renoncé à modifier le périmètre d'appréciation géographique des difficultés d'un groupe. Et il a renvoyé une éventuelle surtaxation des CDD aux partenaires sociaux. Quant au point le plus dur, des accords d'entreprise, Manuel Valls a évoqué "un renforcement du rôle des branches".

Sauf si une motion de censure est adoptée, le texte va poursuivre son chemin au Sénat, avant de revenir à l'Assemblée.

L'annonce du recours au 49-3 - dont la droite a rappelé que François Hollande le dénonçait comme antidémocratique - a été le point d'orgue d'une journée sous haute tension entre socialistes. Après une réunion d'une quinzaine de députés, frondeurs compris, une grande majorité des socialistes s'était dite prête à voter la dernière version du texte, mais une minorité de "frondeurs" a confirmé son opposition.

Selon un élu, "de 50 à 60 députés PS" étaient prêts à voter contre ou s'abstenir, sur les 286 socialistes.

A l'appel de Nuit debout, plusieurs centaines de personnes ont manifesté dans l'après-midi devant l'Assemblée aux cris de "Tout le monde emmerde le 49-3". Vers 23H00 environ 200 personnes étaient réunies dans le calme Place de la République.

A Toulouse, de 1.000 à 2.000 personnes selon la police ou la CGT, se sont réunies place du Capitole en criant "Toulouse, soulève-toi". Des incidents se sont produits, deux manifestants ont été blessés à la tête ainsi qu'un policier.

Dans l'Ouest, plusieurs manifestations tendues ont eu lieu simultanément, les manifestants ciblant particulièrement le Parti socialiste, notamment à Caen, où le local départemental du PS a été saccagé. A Nantes, quelque 400 personnes ont défilé en scandant "Tout le monde déteste le PS" puis des heurts ont éclaté vers 21h30. Des manifestations similaires ont eu lieu à Rennes, Lille, Lyon, Tours, Marseille et Grenoble. Dans la préfecture de l'Isère, six policiers ont été blessés par des jets de projectiles et une personne a été interpellée.

Enfin, sept syndicats opposés au projet de loi travail, dont la CGT et FO, se sont réunis en intersyndicale et ont appelé à des grèves et manifestations les 17 et 19 mai.

Source : AFP

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