Législatives 2012: le FN renvoyé en procès pour des soupçons d'escroquerie aux frais de l'Etat

  • Photo-montage de portraits de Jean-François Jalkh, un des vice-présidents du FN (g) et Wallerand de Saint-Just, trésorier du FN
    Photo-montage de portraits de Jean-François Jalkh, un des vice-présidents du FN (g) et Wallerand de Saint-Just, trésorier du FN AFP/Archives - JACQUES DEMARTHON, DOMINIQUE FAGET
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Centre Presse Aveyron

Le Front national, deux de ses dirigeants et un très proche de Marine Le Pen devront faire face à un procès pour des soupçons d'escroquerie aux frais de l’État, notamment lors des législatives de 2012, une perspective embarrassante à l'approche de la présidentielle.

La date du procès, dont il n'est pas exclu qu'il se tienne avant l'élection présidentielle de 2017, n'est pas connue, mais cette perspective met à mal l'image du parti d'extrême droite, longtemps champion pour dénoncer les "magouilles" de ses adversaires.

Sur le banc des prévenus comparaîtront le FN en tant que personne morale, pour complicité d'escroquerie, son trésorier Wallerand de Saint-Just, pour recel d'abus de biens sociaux, et l'un de ses vice-présidents, Jean-François Jalkh, pour escroqueries, abus de confiance et recel d'abus de biens sociaux, a indiqué à l'AFP une source judiciaire. Contactés, ils n'ont pas donné suite. Marine Le Pen, qui n'avait pas été mise en examen, n'a pas réagi.

Le parti, qui a toujours clamé son innocence, est rattrapé par son système de kits, mis en place lors des législatives de 2012 avec la société Riwal, dirigée par Frédéric Chatillon, un très proche de Marine Le Pen et un pivot de la communication du parti. Ce quinquagénaire, connu pour avoir dirigé le GUD, un syndicat étudiant d'extrême droite, est aussi renvoyé en procès pour faux, escroqueries, abus de biens sociaux et blanchiment.

Tracts, affiches, cartes postales... la petite panoplie du candidat, obligatoire aux yeux de nombre d'entre eux, coûtait 16.650 euros. Pour l'acquérir, les frontistes devaient dans le même temps contracter un prêt avec intérêts auprès de Jeanne, mouvement satellite du FN.

Les juges pensent que derrière ce montage complexe se cachent des prestations gonflées et surfacturées au détriment de l'Etat, qui rembourse les frais de campagne aux candidats dépassant 5% des voix. Le système aurait été imposé aux candidats sans tenir compte de leurs besoins sur le terrain ni de la réalité de leur campagne, "dans l'unique but de majorer des dépenses électorales remboursables", explique une source proche de l'enquête.

- "Allers-retours à la benne" -

Dans ses réquisitions, le parquet s'appuyait sur les estimations d'un imprimeur pour qui un tel kit devait coûter 4.800 euros dans une "fourchette haute", transport compris. Ainsi, les enquêteurs ont-ils découvert que Riwal avait sous-traité l'impression de tracts... au FN, pour un montant de 412.000 euros, alors que les coûts de production ont été évalués à 80.000. Des chiffres contestés par les protagonistes.

Autre singularité, le recours à un seul expert-comptable pour tous les candidats, dont la rémunération était indexée sur le résultat: 1.200 euros pour ceux qui faisaient plus de 5%, 350 euros pour ceux qui faisaient moins. D'où le soupçon que les conventions de prêt n'aient été antidatées et ajustées aux résultats électoraux. L'expert-comptable Nicolas Crochet, un proche du parti, a aussi été renvoyé en procès, parmi sept personnes physiques et trois personnes morales (le FN, Riwal et Jeanne).

Lors de l'enquête, des candidats ont confirmé n'avoir pas eu d'autre choix que de se fournir chez Riwal, d'autres que le matériel n'était pas arrivé ou alors trop tard. L'un d'eux a parlé d'"allers-retours à la benne pour jeter des quantités incroyables de docs".

"Un prétexte de mauvais candidats qui n'ont pas distribué les tracts", avait rétorqué Wallerand de Saint Just à l'AFP, fustigeant des "assistés totaux".

Autre sujet d'investigation, les intérêts des prêts facturés par Jeanne aux candidats, à 6,5%, soit environ 1.000 euros par kit, et eux aussi remboursés partiellement par l'Etat.

Pour les juges d'instruction, ces prêts sont une fiction, Jeanne n'ayant jamais disposé des sommes, avancées par Riwal via un crédit sans intérêts de plus de huit millions d'euros en 2012. Un crédit considéré par les juges comme un abus de bien social.

Au-delà, l'enquête vise la mise à disposition gratuite par Riwal de locaux ou d'employés pour le parti et l'achat de matériel. Riwal se voit aussi reprocher d'avoir salarié fictivement les élus David Rachline et Nicolas Bay en mai-juin 2012.

Source : AFP

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