L’AOP Roquefort menacée par la fusion avec Tournemire ?

  • La chambre syndicale des industriels est vent debout contre le projet qui pourrait avoir des conséquences économiques.
    La chambre syndicale des industriels est vent debout contre le projet qui pourrait avoir des conséquences économiques. EVA TISSOT
Publié le
Guilhem Richaud

Les deux communes ont annoncé leur intention de s’unir, ce qui inquiète particulièrement les industriels.

Il a fait durer le suspense. Bernard Sirgue, le maire de Roquefort, avait relégué au bout de l’ordre du jour de son conseil municipal, en début de semaine, un point abordant la future fusion des communes entre la cité fromagère et Tournemire.

Le projet avait été révélé, un peu à la surprise générale, il y a quelques semaines, par le Progrès saint-affricain. Pour acter cette union, les édiles des deux communes souhaitaient aller vite. Avant la fin du moins de décembre pour que ce soit effectif au 1er janvier 2017. Une manière qui suscite l’interrogation de nombreux observateurs, au sein même des conseils municipaux actuels des deux communes.

Mais à Roquefort, on est décidément jamais à l’abri d’un retournement de situation. Voyant la fin de l’année arriver à grande vitesse, et après consultation des autorités préfectorales, Bernard Sirgue et Pascal Rivier, son homologue de Tournemire, ont pris la décision de repousser la fusion. « Après réflexion, le projet est reporté à 2017, a-t-il annoncé froidement. La décision sera prise dans le courant de l’année et si elle a lieu, la création de commune nouvelle sera effective au 1er janvier 2018. Je ferai, en 2017, une réunion d’information et de communication nécessaire pour voir la couverture et les ambitions des communes de Tournemire et de Roquefort et si ce projet est souhaitable ou pas. »

Dans ses propos, à aucun moment, l’édile n’a fait allusion au courrier qu’il avait reçu, quelques jours plus tôt, avec mention spéciale de la transmettre à ses conseillers municipaux. Un des élus, mis au courant, a pourtant souhaité le partager et avait même préparé des photocopies. Mais cette diffusion a été refusée par le maire, qui a assuré qu’il partagerait l’information en temps et en heure. Mais plus surprenant encore, cette rétention n’a pas suscité la moindre curiosité ou contestation des conseillers non informés, et notamment ceux de l’opposition.

Des frais supplémentaires

Ce courrier, qui émane donc de la chambre syndicale des industriels de Roquefort, est rédigé par l’avocate Hélène Bras. Celle-ci s’inquiète des conséquences de cette fusion pour l’AOP roquefort. « Les conséquences de cette fusion, particulièrement impréparée, seraient néfastes, explique-t-elle. Elle permettrait que les fromages de l’AOP roquefort ne puissent plus bénéficier de cette appellation, puisque le ressort ou le périmètre géographiques sur lequel elle repose aura réglementairement disparu. »

Une hypothèse que Bernard Sirgue avait balayée d’un revers de la main il y a quelques semaines en assurant avoir consulté l’Inao (Institut national des appellations origines), garant de l’AOP. Mais une autre question soulevée par la chambre est encore plus sensible. Parce qu’elle touche au portefeuille. « Sur les conséquences financières de la fusion des communes : telle qu’elle est annoncée, elle impliquera nécessairement et inéluctablement le changement d’un nombre considérable de dénominations, adresses, références et mentions portées sur les documents administratifs et commerciaux, ainsi que sur les emballages et autres supports. L’ensemble de ces changements atteindra très certainement un coût très important voire faramineux pour les industriels de Roquefort. »

C’est là où le bât blesse. Les industriels n’ont pas envie de mettre la main à la poche pour refaire tous leurs emballages et éléments graphiques. Et c’est bien cela qui pousse la chambre syndicale à demander l’arrêt pur et simple du processus. 

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