Le premier procès de la maltraitance animale s’ouvre ce jeudi à Alès

  • L’association L214 a tourné des vidéos entre mai 2015 et février 2016 dans l’abattoir du Vigan.
    L’association L214 a tourné des vidéos entre mai 2015 et février 2016 dans l’abattoir du Vigan.
Publié le , mis à jour
Centre Presse / AFP

Trois employés de l’abattoir certifié bio du Vigan (Gard) comparaissent à Alès jeudi et vendredi pour maltraitance à animaux, un procès emblématique rendu possible par la diffusion en février 2016 d’une vidéo choc de l’association de défense des animaux L214. Les images tournées en caméra cachée montraient, pendant 4 minutes 30, des animaux mal étourdis, égorgés ou recevant des coups répétés à la matraque électrique dans l’abattoir intercommunal du Vigan. Elles avaient immédiatement suscité une vague de réprobation, quatre mois à peine après une affaire similaire, déjà révélée par L214, dans un abattoir municipal d’Alès.

L’un des employés du Vigan sera jugé devant le tribunal correctionnel d’Alès pour avoir exercé des « sévices graves et actes de cruauté envers un animal tenu en captivité » et est passible de deux ans de prison et 30 000 euros d’amende. Il lui est notamment reproché d’avoir utilisé sans nécessité à plusieurs reprises une pince à électronarcose sur le museau de brebis et d’avoir violemment jeté des moutons par dessus une barrière. Les deux autres salariés seront jugés pour avoir « exercé volontairement des mauvais traitements » sur des animaux captifs : coups de pied à des bovins ou coups d’aiguillon électrique à la tête d’un porc notamment. Jugée en tant que « personne morale », la communauté de communes du Pays viganais, responsable de l’abattoir au moment des faits, devra elle répondre de plusieurs infractions à la réglementation sur l’abattage des animaux. Après la publication de la vidéo tournée dans l’abattoir du Vigan, le président de la communauté de communes Roland Canayer avait annoncé la fermeture de l’établissement « à titre conservatoire », la suspension de son personnel « jusqu’à nouvel ordre » et l’ouverture d’une procédure disciplinaire.

L’abattoir, situé dans une zone artisanale à l’entrée de la petite commune cévenole de quelque 4.000 habitants, avait rouvert partiellement un mois après le scandale. L’établissement traite environ 300 tonnes de viande par an provenant d’animaux d’une petite centaine d’éleveurs issus essentiellement des Causses et des Cévennes et qui travaillent en circuit court.

D’ici fin avril, la communauté de communes du pays Viganais doit céder l’établissement à un collectif d’éleveurs locaux, pour lesquels la poursuite de cette activité est vitale. À l’origine de ce procès et partie civile au côté d’autres défenseurs de la cause animale, l’association L214 a été créée en 2008 par un couple d’enseignants « végans », Brigitte Gothière et Sébastien Arsac. Elle milite contre le gavage de canards, les élevages industriels, les souffrances infligées aux animaux et contre toute consommation de produits issus des animaux. L’action de l’association, dont le nom fait référence à l’article du code rural qui, depuis 1976, désigne les animaux comme des « êtres sensibles », a connu un écho particulier depuis fin 2015 et la diffusion au fil des mois de plusieurs vidéos tournées en caméras cachées dans des abattoirs ou des élevages.

Selon Mme Gothière, le procès d’Alès sera toutefois le premier de ce type en France. À la faveur notamment de la publication des vidéos de L214, la dénonciation régulière des conditions de mise à mort dans les abattoirs a aussi débouché sur une commission d’enquête parlementaire qui a préconisé 65 mesures dont le renforcement de la vidéosurveillance, de l’intervention de vétérinaires et de la formation des employés. L’Assemblée nationale a voté de façon inattendue en janvier 2017 l’obligation d’installer des caméras de surveillance dans les abattoirs à partir de 2018. Avant le procès d’Alès qui devrait susciter une forte mobilisation des associations de défense des animaux, l’Alliance Anticorrida et l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (OABA), elles aussi parties civiles, ont dit douter de « l’exemplarité » des peines encourues.

« À l’exception du délit de sévices graves, les autres infractions relèvent des contraventions de 4e classe, punies d’une amende de 750 EUR au maximum, alors que certains bovins, ovins ou porcins sont abattus après plusieurs minutes d’agonie, quand d’autres sont suspendus, en pleine conscience, pour être saignés à vif », ont déploré les deux associations.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?