Basket. L’interview de Vincent Bonnefous : comment Rodez en est arrivé là

  • Cette semaine dans nos locaux, le désormais ex-président du Srab, Vincent Bonnefous, a souhaité mettre fin au flou qui a longtemps entouré son club et sa gestion. (José A. Torres / Centre Presse Aveyron)
    Cette semaine dans nos locaux, le désormais ex-président du Srab, Vincent Bonnefous, a souhaité mettre fin au flou qui a longtemps entouré son club et sa gestion. (José A. Torres / Centre Presse Aveyron)
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Centre Presse / Rui Dos Santos / Aurélien Parayre

L’ex-président du club de basket de la ville, le Srab qui a été placé en liquidation judiciaire par le TGI de Rodez le 22 mai, a souhaité livrer enfin sa vérité après avoir longtemps voulu garder le silence pour « le bien des 236 licenciés et de l’avenir du basket à Rodez ». Il n’élude aucune question, prend sa part de responsabilité et recadre la municipalité.

« J’ai repris la présidence du club à Noël 2006. Des mains d’Alain Martel qui avait démissionné pendant les congés. Au 30 juin 2006, il y avait un passif de 50 000 . La première des choses que je me suis attaché à faire, avec le comité directeur élu au 30 juin 2007, c’est de minimiser la masse salariale. Ça s’est vu, puisqu’on est descendu. Mais en trois saisons, on avait aussi dégagé 43 900 € de bénéfices et donc ramené le club quasiment à zéro. Est arrivé ensuite le championnat du monde U17 féminin, impactant deux saisons de 2009 à 2011. Et là, je vais être obligé de mouiller la fédération : il y avait un engagement oral pris avec ma coprésidente du comité d’organisation (Cathy Gistou, NDLR) de compenser le fait de mettre des salariés à disposition deux mois avant et durant le mois de compétition.

J’avais donc prolongé les contrats en mai, juin et juillet pour sept ou huit personnes dont les salaires devaient être pris en charge. Mais au moment de faire les comptes, on s’est fait envoyer à 100 m par la fédération. Donc on a fini l’année 2009-10 à -34 000 € et ça a impacté aussi 2010-11 que l’on a fini à 33 000 € de pertes. 67 000 € en cumulé, dont on peut affecter 80 % à ce Mondial. Ensuite, on est plus sérieux.

On arrive à équilibrer, mais pas à combler le passif. Au 30 juin 2016, il est de 94 332 . Ce n’est pas une somme démesurée mais importante sur un budget de 400 à 450 000 €. Est venu se rajouter, en 2012-13, un contrôle Urssaf. Contrôle que l’on a provisionné de suite. De l’ordre de 171 000 . Sur des frais de déplacement, des mises à disposition d’appartement, des requalifications de salaires ; comme tous les autres clubs le font, y compris ceux de la région ruthénoise d’autres sports. Au départ, le redressement était même plus élevé : 230 000 €.

Mais après avoir contesté, il est passé à 171 000 € et on a reçu la notification. On s’est aperçu qu’il y avait un vice de forme, puisqu’elle n’était pas signée. On s’est dit : “On va aller au bout et quand on sera au TASS, si un jour on y va, c’est gagné.” Mais le cas ne se posera pas puisqu’on a déposé le bilan. Donc, pour moi, le passif total du club est de 94 332 €, puisque par rapport à l’Urssaf, tant que tu n’es pas jugé tu es innocent. »

Rétrospectivement, ce Mondial U17, le referiez-vous ?

« Évidemment que non, si on avait su qu’on perdrait de l’argent ainsi, évidemment que non. Ça a été un coup de folie : un jour on voit passer un appel de candidature de la fédération, on y répond et c’est parti, voilà. En revanche, ça restera mon plus beau souvenir. »

- « Je tiens à dire que les collectivités étaient parfaitement au courant année après année de nos comptes et de l’état de nos finances, puisque les comptes sont fournis chaque année à l’ensemble des collectivités. Et jusqu’à peu, il n’y avait eu quasiment aucune remarque. »

Et le comité directeur était-il au courant, a-t-il allumé des feux ?

« Non... Enfin des feux, c’est-à-dire ? Se posait la question chaque année de comment on faisait, oui. Là, au mois de juin dernier, au moment du recrutement, la solution avait été prise de recruter un commercial pour augmenter les recettes. Ce fut un échec, mais c’était une décision validée par le comité directeur (lire plus loin, NDLR). »

- « Je n’ai jamais demandé d’aide supplémentaire (aux collectivités, NDLR). Car ce n’est pas leur rôle. Je savais très bien à l’époque où des aides de ce type avaient été faites à d’autres clubs, qu’elles le seraient à certains mais pas à d’autres. La visibilité et l’aura d’un club qui a été aidé étaient plus importantes et touchent plus de monde que ce que peut toucher le basket. Avec les aides qui avaient été accordées au club de rugby, allez on va le citer, “150 000 € en quatre ans, c’est bien ça ?” (rire jaune), on n’aurait plus de passif... »

- « En septembre (2016, NDLR), on prend une décision : on décide de limiter au maximum les dépenses, donc les salaires, et on embauche un commercial qui se trouve être un joueur. Avec pour mission de nous augmenter le partenariat afin de dégager du bénéfice. Et malheureusement, on s’est planté de personne. »

Pourquoi ne pas avoir choisi de sacrifier le sportif pour remettre les comptes à flots et sauver le club ?

« On y a pensé, mais la volonté des gens était d’avoir du basket de haut niveau à Rodez et il y avait la peur de la descente, de ne plus avoir de partenaire, ni de subvention. Plus rien. Toutes les décisions ont été validées par le comité directeur. (Rétrospectivement, feriez-vous les mêmes choix ?, NDLR) ça fait partie des regrets. Mais on a tellement vécu de choses qu’on ne se projette pas dans une saison sans. Je l’ai connu la première année, la saison sans à 22 défaites et 2 victoires quand on descend de N2 à N3. Quatre-vingts personnes dans l’Amphi, c’est terrible. Voilà ce qui a fait peur aux personnes pour ne pas s’engager dans cette voie-là. »

- « Cette personne-là, et je ne la citerai pas volontairement, n’a pas apporté du tout ce que l’on attendait d’elle sur le plan commercial, en plus d’être un échec sportif.

- « Je l’assume je me suis trompé en la prenant. »

- « Il a été licencié en décembre. »

- « Non, car jusqu’au mois de novembre, personne ne parle de ça dans le club. Le 23 novembre, une de mes sociétés dépose le bilan, est placée en redressement judiciaire, et, c’est en suivant que j’annonce au comité directeur que je vais devoir démissionner à la fin de la saison pour m’occuper de mes entreprises. Et à ce moment-là, certaines personnes disent : “On va étudier ce que l’on peut faire pour la continuation du club”. Je leur donne les documents et assez rapidement, ils disent : “Il y a un passif de 94 000 € et il y a une provision Urssaf. On ne sait pas si on veut assumer ça ou si on prend la décision de repartir à zéro”. »

- « Il n’y a jamais trop eu de fracture au sein du comité directeur, beaucoup d’interrogations en revanche. »

- « A partir de ce jour-là (l’étude de la situation par les nouveaux dirigeants, NDLR), ils m’ont demandé à ce qu’on ne communique pas de manière à pouvoir mener à bien leur projet. Donc j’ai respecté parfaitement la volonté du comité directeur. »

- « Moi, je pense que j’aurais communiqué, mais j’ai respecté la volonté du comité directeur. »

- « A partir de ce moment-là, moi je me suis consacré beaucoup plus à mes entreprises, les nouveaux dirigeants ont pris peu à peu la main. Et derrière, étant moi moins présent et à nouveau sans commercial, les signatures de partenariats avaient pris du retard. Donc on a manqué de rentrées et les difficultés financières sont apparues avec des retards de salaires etc... La question s’est posée de déposer le bilan au mois de janvier. Car c’était très tendu. Mais par respect envers les licenciés, il a été décidé de faire tout ce qui était en notre pouvoir pour aller jusqu’au bout de la saison. On y est arrivé, sans creuser le trou davantage et en assurant la gestion courante en ayant remis un coup de collier sur les partenariats. Et on a tenu jusqu’en avril, à la fin de saison de l’équipe une. Puis on n’a pas payé les salaires d’avril et de mai. »

- « A partir du moment où la décision de déposer le bilan a été prise, il a fallu fixer un calendrier. Et le calendrier nous a imposé de passer au tribunal de grande instance le 12 mai avec une possibilité de poursuite de l’activité d’une grosse semaine pour jouer, sur demande expresse du club, la finale régionale U17. Mais pas davantage.

- « Et je suis un peu choqué que le maire de Rodez (Christian Teyssèdre, NDLR) puisse dire que ce sont les dirigeants de Rodez qui ont décidé de ne pas faire disputer la coupe de l’Aveyron aux licenciés. Puisque c’est le calendrier judiciaire qui l’a fait et c’est la fédération qui nous a interdit de la jouer. »

- « Les dirigeants voulaient envoyer les gamins les jouer ces finales, puisque justement les gamins ont été notre priorité pour finir la saison ou sinon, on aurait déposé le bilan (plus tôt). »

- « J’ai donc été président durant 13 ans, je reconnais tout à fait que le Srab a pu avoir une mauvaise gestion puisqu’il est en liquidation judiciaire. Et j’en prends ma part puisque j’en suis le président. Mais le club a quand même fait vivre des choses assez extraordinaires à ses bénévoles, à ses licenciés, au public ruthénois : un championnat du monde, cinq tournois intercomités de zone avec à chaque fois 2 000 personnes, 12 tournois intercomités de ligue avec à chaque fois 800 personnes. Je n’oublie pas non plus tous les matches de l’équipe une garçon avec un public extraordinaire, puisqu’on a mis 2 000 personnes dans l’Amphi et 1 400 au Dojo pour des matches mémorables (très ému). Et c’est vrai que, parfois, on pouvait se croire à un niveau au-dessus de ce qu’on était.

- « Je vis très mal la situation car j’ai déçu 240 licenciés, enfin on a déçu 240 licenciés. Je m’en excuse d’ailleurs auprès d’eux. »

- « Maintenant, j’ai besoin de prendre du recul. Et si un jour je remets les pieds sur le parquet de l’Amphi, ce sera pour aller voir un match de gamins, car il n’y a que ça de vrai. »

Cobra, le nouveau club de basket ruthénois présidé par Xavier Alric

Club Occitanie Basket Rodez Aveyron. Voilà le nom du tout nouveau club de basket de la ville de Rodez, Cobra. Voilà donc à quoi une partie des dirigeants du Srab travaillait dans l’ombre, pour sauver ce qui peut l’être, depuis plusieurs semaines. Plusieurs mois même puisque les statuts de l’association, dont on devrait savoir le 9 juin à quel niveau sportif elle pourra débuter en septembre prochain, ont été déposés le 9 mars et publiés le 8 avril dernier. Parmi les fondateurs, celui qui était membre actif du Srab, Xavier Alric, doit en devenir le président. Sollicité par nos soins, il n’a pas souhaité hier évoquer l’avenir, attendant d’en savoir davantage, pour s’étendre sur le sujet. Affaire à suivre donc.

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