Arnaud Viala : « Pour l’Aveyron, je suis optimiste et surtout combatif »

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Centre Presse / Philippe Routhe

Vous présidez depuis peu, à l’Assemblée nationale, une mission d’information commune sur la préparation d’une nouvelle étape de la décentralisation en faveur du développement des territoires. On dit que vous avez joué des coudes...

Oui. Cette mission d’information s’est construite entre la commission des lois dont je fais partie et celle du développement durable. Elle devait échoir à un député LR. J’ai ferraillé car cela correspond complètement à ma préoccupation sur la problématique des territoires. Mes collègues ont accepté et j’en suis ravi. Car je travaille avec deux rapporteurs de la République en marche !, qui apportent des idées plus urbaines que les miennes...

Quelle est la finalité de cette commission ?

Dresser un état des lieux de la décentralisation, sur ce qui marche et ce qui ne marche pas. On a créé une décentralisation verticale et descendante, et ce schéma est reconstitué avec les métropoles des régions. Or, il faut selon moi partir du terrain et aller vers des acteurs de territoires. Dans un département comme l’Aveyron, 80 % des acteurs privés ou publics se mobilisent. Si l’État doit intervenir, c’est pour les 20 % manquant. Et c’est au niveau local que cela doit se définir, avec une décentralisation qui se fasse aussi avec les acteurs de territoire. Il faut modéliser un type de contractualisation moderne, à la maille, en fonction des territoires. Il faut une loi pour cela.

Vous étiez député avant l’arrivée d’Emmanuel Macron à la présidence, vous l’être après. Quel sentiment se dégage sur le fonctionnement de l’Assemblée nationale ?

Tout a été bousculé dans l’organisation de la vie politique. Et c’est à l’AN que cela se ressent le plus. Deux phénomènes sont apparus : l’écrasante majorité numéraire d’En Marche !, laissant une place très réduite aux autres groupes, qui se comporte comme un troupeau. À l’encontre du souhait du président de la République il me semble. L’autre phénomène concerne ma famille politique. Il y a un bouleversement des attentes désormais. Et je ne suis pas sûr qu’elle l’a bien compris.

Justement, entre Wauquiez d’un côté et le tout nouveau collectif Agir (1) de l’autre, où vous situez-vous ?

J’ai toujours eu des convictions de droite. Cela a toujours été le sens de mon engagement politique. Et cela nécessite une grande ouverture d’esprit. Je reste de droite, élu dans un contexte difficile. Je ne vais pas changer par opportunisme. Et j’ai fait le choix de rester à l’intérieur pour porter une volonté d’innovation. Ce qui se passe aujourd’hui me laisse encore sur ma faim. Ma famille politique se « cornérise », et cela ne me plaît pas.

Quelle priorité dégagez-vous de votre action de député ?

Je veux être utile à nos concitoyens, être un député actif. Je pense l’être. Tout ce qui touche à l’aménagement du territoire représente un défi majeur. Tout cela ne peut pas être qu’une opportunité politique. Il faut être habité !

Concernant le département, les sujets ne manquent pas...

Comme l’agriculture, qui représente un enjeu majeur, pour laquelle j’ai présenté un projet de loi qui n’a pas été retenu. Le désenclavement pour lequel on ferraille avec les autres parlementaires du département. Et sur le tronçon reliant Rodez à Séverac, on est loin d’avoir obtenu gain de cause.

Le train pose problème également...

Cela représente une grosse difficulté. Il y a une forte désaffection pour ces trains et ils sont donc plus difficiles à défendre. Mais il ne faut pas renoncer à ce service au regard des attentes. Il faut se battre. L’absence de moyen de substitution pour le Rodez-Paris est inadmissible. Il faut unir nos forces pour manifester notre mécontentement.

Un sujet très tendu en Aveyron est celui de la présence du loup...

Il est arrivé à un tel point passionnel qu’il faut être prudent. Il cristallise l’opposition entre la volonté de vie et de vivre dans le monde rural et une vision urbaine et métropolitaine d’un monde rural bucolique et mis sous cloche. L’accroissement de la tension sur ce sujet donne crédit aux visions négatives. Or, les modèles agropastoraux ne peuvent s’adapter à une présence massive, je dis bien massive, du loup. La France doit peser plus lourd pour faire abaisser le niveau de protection de l’espèce.

Quelles relations entretenez-vous avec les autres élus parlementaires du département ?

Avec les sénateurs Alain Marc et Jean-Claude Luche, on se connaît bien. Quand je vois passer des textes qui attirent mon attention, je les avise. Avec les deux nouveaux députés, Stéphane Mazars et Anne Blanc, on a beaucoup échangé sur les sujets aveyronnais. On les fait passer devant nos différences politiques.

Êtes-vous optimiste pour l’avenir du département ?

Je suis optimiste, mais surtout combatif. Je suis conscient que notre département a des atouts, mais il faut se battre pour les faire-valoir.

Vous gardez toujours un œil sur le Lévezou ?

(Sourire) Beau sujet. J’en ai été maire d’une commune (Vezins-de-Lévezou, NDLR), président de l’intercommunalité, du syndicat mixte. On a porté l’idée que j’étais derrière le rideau et tire encore les ficelles. Il n’en est rien. Je ne le fais pas. Je suis présent si on me sollicite. Et je suis ravi car cela se passe très bien pour mes successeurs. Après, je suis né ici, j’y vis, et cet engagement local nourrit ma vision. C’est pourquoi je ne cesse de dire que je suis déçu sur la loi de non-cumul de mandats. Parce qu’il faut être à l’écoute de ce territoire. Cela doit aller du bas vers le haut.

Le Lévezou est un territoire à part, tout de même...

De par sa position géographique d’une part. Car il est central. Cela a façonné sa mentalité. mais il n’est pas isolationniste comme je l’ai entendu. Il revendique le fait d’exister sans être morcelé par l’attractivité de Rodez et Millau. Le Lévezou a toute sa place. Et ma circonscription du sud Aveyron est à l’image du Lévezou. Elle est parfois décrite comme indépendantiste mais elle ne l’est pas. Il y a une véritable identité.

La revendication est un de ses traits de caractère. Le sujet brûlant du transformateur de Saint-Victor le montre...

C’est vrai que la revendication a fait de ce territoire ce qu’il est.

À quoi ressemble une semaine d’Arnaud Viala ?

C’est très chargé. Le lundi matin, je le consacre au Lévezou en général. L’après-midi je tiens une permanence à Millau. Je pars tôt le mardi matin pour l’Assemblée nationale où je suis jusqu’au jeudi après-midi. Le vendredi matin, je suis à la permanence de Millau et le samedi matin à Saint-Affrique. Je suis un laborieux. Je travaille beaucoup ce qui est dur pour la famille et fatiguant. Et je veux rajouter un mot sur la représentation. Je trouve important que quand les autres agissent, font, il faut les écouter. Aller à leur rencontre. C’est dur mais tellement enrichissant. Cela permet de rester branché au territoire. C’est chronophage mais indispensable, même si je fais 55 000 kilomètres par an, en étant trois jours par semaine à Paris, où je me rends en avion.

Vous appartenez à la nouvelle vague politique, tout en commençant à être bien expérimenté. Avez-vous un objectif en terme de responsabilité nationale ?

Je n’ai pas de plan de carrière. Si l’on m’avait dit un jour que je deviendrais député... Il n’en demeure pas moins que la France à besoin que de vrais ruraux se hissent à des responsabilités nationales. Ce n’est pas là une question de partis politique. Pour ma part, je me sens jeune et je ne veux surtout pas tomber dans le travers des « vieux » politiques. La modernité nous appartient. Mais, comme je dis, c’est par le travail que l’on s’impose que l’on peut s’imposer dans son travail.

CARTE D’IDENTITE

Né le 4 décembre 1974.

Marié à Christelle Viala, deux enfants, âgés de 14 ans et 11 ans.

Habite à La Clau.

A été maire de Vézins-de-Lévézou, président de la communauté de communes, de Lévezou Pareloup, président du syndicat mixte du Lévezou et vice-président du conseil départemental.

A été élu député la première fois le 13 septembre 2015 et réélu le 18 juin 2017.

Son suppléant est Sébastien David, conseiller départemental, élu sur le canton de Saint-Affrique.