Claude Salles, un destin jalonné de drames et d’amour

« Je ne comprends pas. Comme à son habitude, il était en pleine forme, on s’était vu le matin même pour une réunion à Bertholène, je savais qu’il partait pour Rodez... Et qu’il en reviendrait pour aller dans une autre réunion, je ne sais plus où. Claude était rayonnant comme toujours. »

Jean Lardin, son ami, peine à retenir ses larmes. L’incrédulité fait place à l’émotion.

Et trois kilomètres plus loin du lieu de l’accident, à Laissac, la chape de plomb s’est déjà abattue sur le village. Stupéfaction.

Claude Salles a quitté la route et la vie hier, sur cette RN88 pour le doublement de laquelle il se battait sans relâche.

Pour des raisons de sécurité d’abord. La nationale lui a volé sa première épouse et sa fille, puis son fils : Delphine et Solange dans une effroyable collision à la barrière SNCF de Gages en 1988, Frédéric ensuite en 2005 tué à moto près de Naucelle par un automobiliste.

Terrible destin que celui du maire de Laissac, longtemps sapeur-pompier volontaire qui a côtoyé, sans jamais parvenir à s’en faire une raison, la mort des autres.

Avant que tout un pays ne pleure déjà la sienne. Les drames ont façonné la vie de Claude Salles qui s’est caparaçonné au fil du temps pour mieux les surmonter.

Par sa bonhomie, son empathie, son humanité inoxydable, sa sincérité en toutes circonstances et son attention permanente à ces petits riens qui font le quotidien des habitants de sa commune, le maire de Laissac gagnait l’adhésion de tous.

Laissac, marié à Sévérac-l’église il y a deux ans, n’était pas son terrain de jeu mais sa carte du tendre.

Au point de faire en sorte que rien ne soit jamais trop beau pour valoriser l’image de sa commune et le bien-être de sa population.

À l’ombre du marché phare de l’élevage et des exploits sportifs de toute sorte, des événements il y en a eu (« il y en aura encore », confiait-il en janvier), jusqu’au Tour de France cet été 2017, comme un couronnement pour lequel « on a eu peur de ne pas être à la hauteur. »

Mais si, comme toujours. Sa fierté de voir sa commune connue bien au-delà de l’Aveyron faisait briller ses yeux.

C’est un amoureux de son territoire qui est porté au fauteuil de maire en 2008. Pas un politique au sens commun du terme. Il ne voulait pas être le premier des élus, ne savait de toute façon pas intriguer pour y parvenir.

Mais goûtait les responsabilités « qui permettent surtout de tirer les choses et les gens vers le haut », rappelait-il il y a peu encore. Alors, pourquoi pas. Quitte à être « le maire des égouts ! », comme il disait en riant, tant l’assainissement pesait, à son grand agacement, sur les finances communales.

Et pour se faire pardonner d’être le chef, il entraînera associations, habitants, commerçants et artisans dans cette dynamique qui était sa force de vivre.

Claude Salles avait encore des projets plein la tête. Pour « donner à Laissac l’image qu’elle mérite », pour lui permettre aussi d’être, un peu plus encore, heureux de vivre.

Son destin ne lui en a pas laissé le temps.

Claude Salles nous a quitté. Claude Salles, maire de Laissac, a perdu la vie aujourd’hui jeudi 15 février 2018 dans un accident de la route à Bertholène, dans le sens Rodez-Laissac. https://t.co/d0FUygD7qq #Aveyron pic.twitter.com/Sywfl3a32Y

— Département Aveyron (@dept_aveyron) February 15, 2018