La Nationale 88, route maudite depuis le début de l’année

Trois personnes tuées sur la RN88 en quelques semaines à peine. Trois personnes tuées sur des tronçons de cette route nationale qui sont encore à deux voies. Un jeune homme de 23 ans à la Mothe le 17 janvier, une octogénaire le 10 février à l’entrée de Gages en provenance de Rodez, et le maire de Laissac, ce jeudi, à Bertholène. Un maire qui présidait, qui plus est, le collectif aveyronnais pour la mise en deux fois deux voies d’une RN88 sur laquelle il avait tragiquement perdu son épouse et ses deux enfants.

Cela à l’heure où les pouvoirs publics se félicitent d’une diminution de la gravité des accidents sur ce tronçon avec la mise en place d’un radar autonome sur les 43 km de routes séparant Rodez de Sévérac-le-Château et son A75. « C’est un constat depuis 2016 et la mise en place de ce radar », rappelle Jean-Pierre Escassut, responsable de la sécurité routière en Aveyron. Mais ces drames de la route semblent venir rappeler que rien ne saurait remplacer, en terme de sécurité, la mise à deux fois deux voies de cette RN88 mortifère. Et pas seulement en Aveyron.

En Haute-Loire, près d’Yssingeaux, le 31 janvier dernier, un terrible accident de la circulation est venu le rappeler. Dans un choc frontal entre un camion et une auto, un homme de 45 ans a perdu la vie. Ce qui, en 5 ans à peine, porte à sept le nombre de morts sur une portion de route de seulement deux kilomètres, entre l’échangeur de Villeneuve et le viaduc de Bessamorel.

En 2016, dans un courrier transmis à la présidente de la région Occitanie Carole Delga, le président délégué du collectif aveyronnais pour la mise à deux fois deux voies de la RN88, Alain Gal, rappelait que le dossier de transformation de cet axe reliant Toulouse à Lyon date de 1987. « Il a été approuvé au CIAT du 12 juillet 1993 avec un crédit de 300 millions de francs affecté à la liaison Rodez-Sévérac pour une réalisation sur 10 ans. »

Mais depuis, les voitures et les camions, 1 500 par jour selon un dernier recensement, ont circulé et cette portion de route reste depuis près de 40 ans une des plus dangereuses.

Alors que la liaison en deux fois deux voies entre Naucelle et Rodez avance, avec un contournement de Baraqueville prévu pour le courant de 2019 et un dernier tronçon, entre Baraqueville et La Mothe qui devrait suivre, que la réalisation du barreau de Saint-Mayme a démarré, qu’une réflexion est engagée sur l’aménagement des carrefours desservant la RN88 à Rodez, le tronçon devant relier le Causse-Comtal à Sévérac-d’Aveyron, dont le montant est estimé à 300 millions d’euros, a connu une petite impulsion en octobre dernier.

Alors que 90 % de l’emprise foncière a été acquise pour ce tronçon, le préfet Louis Laugier, lors de la présentation du rapport des services de l’État au département, a annoncé qu’une somme de deux millions d’euros avait été ajoutée à l’actuel contrat de plan État-Région, pour permettre la réalisation d’études. « Une étape essentielle pour cet aménagement », avait-il alors souligné.

Le salut de la mise à deux fois deux voies semble aujourd’hui passer par le prochain contrat de plan État-Région, celui actuel courant jusqu’en 2020. À ce titre-là, en mars dernier, lors d’une réunion consacrée à la RN88, le maire de Laissac avait appelé à la mobilisation de tous les acteurs aveyronnais du territoire pour un « combat commun ».

Ces derniers jours, avec cette tragique loi des séries, l’urgence de son propos prend tout son sens. Dans un récent bilan sur la mortalité routière entre Rodez et Sévérac-le-Château, la Direction des routes relevait entre 2011 et août 2016, 31 accidents et 7 morts. En 2018, le bilan sur la RN88 est, lui, déjà très lourd.