Marcillac-Vallon. Marcillac : le blob d’Audrey Dussutour bientôt star du petit écran

Elle a passé son enfance dans le village de Fijaguet. À portée du vallon de Marcillac. Elle est aujourd’hui une chercheuse reconnue du CNRS au centre de recherches sur la cognition animale de Toulouse. Cette spécialiste du comportement des fourmis a fait la rencontre, en Australie, d’un drôle et passionnant organisme unicellulaire, le blob.

Un étonnant compagnon de route qui ne quitte pratiquement plus la chercheuse originaire de l’Aveyron et qu’elle étudie minutieusement depuis plus de 10 ans. Un étrange être vivant, qui vit dans nos forêts depuis plus de 500 millions d’années, se nourrissant de petits champignons et de bactéries. Une amibe sociale, quelque part entre l’animal et le végétal, composée d’une seule cellule et dénuée de cerveau mais qui peut... apprendre. Étrange chose capable de se déplacer (à une vitesse de pointe de 4 cm par heure) pour s’alimenter.

En mai 2017, nous avions consacré la page Rencontre de notre édition du dimanche aux travaux d’Audrey Dussutour, après la sortie de son ouvrage "Tout ce que vous avez voulu savoir sur le blob sans oser le lui demander." Cet ouvrage de vulgarisation a rendu le blob particulièrement médiatique. La jeune femme de Fijaguet était à l’honneur d’un récent numéro de "Midi, ma Région, mes Envies" dans le cadre d’un dossier consacré aux femmes dans la recherche.

Entre-temps, Audrey est venue à plusieurs reprises à Rodez, dans des établissements scolaires ou à la Maison du Livre, pour s’entretenir sur cette découverte scientifique de premier plan, qui défie les lois de la biologie. Ce blob pour lequel, la chercheuse a mis au point des protocoles d’apprentissage. "C’est la première fois qu’on constate qu’un organisme vivant sans cerveau peut apprendre", explique Audrey. De quoi venir titiller l’intelligence humaine. "Ce fut un vrai bouleversement quand on s’est rendu compte que les plantes pouvaient communiquer. De manière générale, nous sommes très humains centrés. Peut-être que le blob va contribuer à nous apprendre qu’il n’existe pas de vie sans intelligence..."

Le blob, ce génie sans cerveau

Depuis la sortie du livre d’Audrey Dussutour, de nombreux reportages et publications ont été consacrés à cette "masse rampante" qui occupe une bonne partie des journées de la scientifique toulousaine. "ça occupe beaucoup de mon temps, en effet, et ça continue. ça va vite, ça s’enchaîne et je n’ai pas encore de recul", confirme l’Aveyronnaise.

Cela continue d’autant plus depuis qu’Arte, la chaîne de télévision franco-allemande à vocation culturelle, a acheté les droits de son ouvrage de vulgarisation pour en livrer une adaptation documentaire. Le tournage de ce film de 52 minutes, "Le blob, un génie sans cerveau", a été confié à Jacques Mitsch, un spécialiste du documentaire scientifique, déjà nommé à deux reprises aux César du cinéma, à qui l’on doit notamment Le Mammouth Kobalski ainsi qu’un documentaire sur Canelle et Papillon, les derniers ours de souche pyrénéenne.

Produit par Arte et la société Hauteville Production, avec la participation du CNRS, le film devrait être diffusé à la télévision en 2019. Le tournage a débuté au cœur des Baronnies, la "petite Amazonie des Pyrénées." Après cette chasse aux blobs en milieu naturel, l’équipe de tournage s’est transposée dans le laboratoire toulousain d’Audrey Dussutour, pour une série d’expériences. Elle va également s’envoler pour le Japon, l’Angleterre, l’Italie, l’Allemagne et les États-Unis, à la rencontre de tous ces chercheurs qui s’intéressent, de par le monde, à cette intelligence sans cerveau. Cette drôle de chose que l’on retrouve surtout dans les forêts tempérées. "En Aveyron, il doit aussi y en avoir, commente, avec le sourire la jeune femme, qui multiplie les conférences et les interventions auprès des jeunes. Il faut que le sol soit humide, pas acide et pas trop froid. Le blob se développe surtout dans les vieilles souches."

Et si l’éthologiste, originaire de Fijaguet, consacre désormais une grande partie de ses recherches au physarum polycephalum (son nom scientifique que lui a donné, en 1822, le mycologue américain Lewis David von Schweinitz), elle n’en oublie pas, pour autant, ses petites amies les fourmis, qui feront l’objet de son prochain livre.