Jean-François Richet pour "L'Empereur de Paris" : "Je tenais absolument à tourner en France"

  • Jean-François Richet  a déjà dirigé par trois fois Vincent Cassel au cinéma.
    Jean-François Richet a déjà dirigé par trois fois Vincent Cassel au cinéma. Courtesy of Microfilms/Gaumont Distribution
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Relaxnews

(Relaxnews) - Avec "L'Empereur de Paris", le réalisateur Jean-François Richet signe son neuvième long-métrage et le quatrième avec Vincent Cassel dans le rôle principal. Passionné par l'Histoire de France, le réalisateur de "L'ennemi public n°1" s'est attaqué à l'une des périodes qu'il affectionne le plus, celle de l'Empire. A l'occasion de la sortie de son film "L'Empereur de Paris" le 19 décembre au cinéma, Jean-François Richet a révélé à Relaxnews quelques anecdotes de tournages et le choix important de son casting porté par Vincent Cassel et Fabrice Luchini.

Vous êtes un passionné d'Histoire. Qu'est-ce qui vous a attiré dans l'histoire de Vidocq ?

C'est un personnage qui dit non déjà. Dire non, c'est le début de la liberté. C'est quelqu'un qui montre qu'on peut sortir aussi de sa condition sociale. Il commence bagnard, il va finir chef de la police de Paris, le chef de la sûreté. J'aime beaucoup aussi l'époque de l'Empire. J'aime particulièrement l'Histoire, de la Révolution française jusqu'à l'Empire. Tous ces éléments font que, quand j'ai reçu le scénario, ça a été une évidence. Et pour moi, et pour Vincent [Cassel] de l'accepter.

Vous avez réalisé ce tournage sur l'ancienne base aérienne 217 au Plessis-Pâté dans l'Essonne et reconstitué le Paris de 1810. Pourquoi avez-vous décidé de rester en France pour tourner votre film et comment s'est déroulé le tournage ?

C'est plutôt un film qui coûte très cher donc évidemment on pense à aller à l'étranger pour réduire les coûts. Moi j'étais contre et les producteurs aussi. On a comparé les devis et on s'est aperçu que c'était possible de tourner en France avec quelques sacrifices. Quelques semaines de moins de tournage. Mais il y a eu aussi un crédit d'impôt en France qui est arrivé au bon moment et qui nous a permis de tourner en France. Et puis surtout, on a d' excellents artisans pour reconstruire Paris. Je ne suis pas sûr que dans les pays de l'Est, ils savent faire les mêmes choses. Je tenais absolument à tourner en France pour donner du travail à des artisans français, des ouvriers français. Je pense que je suis redevable de ce pays et si je peux le rendre de cette façon, tant mieux.

Vous avez déjà travaillé avec Vincent Cassel dans le diptyque sur Mesrine en 2008 et dans "Un moment d'égarement" en 2015. Qu'est-ce qui vous a poussé à le choisir de nouveau ?

Je l'aurais choisi mais on nous a proposé le scénario à tous les deux en même temps. C'est-à-dire Vincent en tant qu'acteur pour le premier rôle et moi en tant que réalisateur. On devait accepter ensemble ou alors refuser ensemble. Maintenant, on me l'aurait proposé sans Vincent, je lui aurais proposé automatiquement. Il sert mon imaginaire. J'ai l'impression qu'on aime aussi les personnages en marge de la société. Je trouve qu'il a un panel de jeu assez large, il peut être romantique, il peut être violent dans un film, il peut être marrant s'il faut.

Patrick Chesnais, Fabrice Luchini, Olga Kurylenko? Denis Ménochet... Parmi la pléiade d'acteurs et d'actrices, qui vous a le plus étonné dans son rôle ?

Ils m'ont un peu tous étonné. Ils apportent tous des choses différentes. [Patrick] Chesnais a apporté beaucoup plus d'humour que son personnage dans le scénario par exemple. Freya Mavor n'est pas tombée dans le piège de Fantine dans "Les Misérables" sous prétexte qu'elle jouait une fille du peuple. Ce n'est pas de la langue de bois, ils m'ont tous étonné. Je fais très très attention quand je fais mon casting. J'essaye d'avoir les meilleurs pour les rôles mais aussi les meilleurs pour la cohésion du groupe. Un acteur peut transformer radicalement un film. Je fais beaucoup d'essais. Il y a certains acteurs à qui je propose directement parce que je connais bien leur travail mais quand je connais moins leur travail, je fais beaucoup d'essais. Je vois leur nature et ce qu'ils peuvent proposer.

Vous teniez particulièrement à avoir Fabrice Luchini. Pourquoi lui et pas un autre ?

Déjà Fabrice ne passe pas d'essais. J'aime me confronter à de grands acteurs. J'aime diriger des grands acteurs. J'aime voir comment ils incarnent un texte, ils incarnent des personnages. En tant que metteur en scène, et je pense que je ne suis pas le seul metteur en scène français, on veut tous tourner avec Fabrice Luchini. Tout comme on veut tous tourner avec Vincent Cassel. C'est normal en tant que metteur en scène de se confronter à ça. Après j'ai trouvé qu'il [Fabrice Luchini] allait extrêmement bien avec le personnage de Fouché. Cette espèce d'intelligence glaciale. J'étais aussi surpris, et heureusement, par ses propositions, où il mettait ses intonations et à quel moment. A un moment, il a une grande tirade sur la guillotine, il appuie sur des choses que je n'aurais pas forcément pensé à l'écriture et ça prenait une autre ampleur, parce qu'un acteur c'est aussi un rythme. Et il a un rythme unique, Fabrice.

"L'Empereur de Paris", c'est finalement l'histoire d'un homme qui se bat pour retrouver la liberté. Est-ce que vous pensez que cette histoire a une résonance particulière en ce moment en France ?

L'histoire m'intéresse si elle a des résonances dans notre époque. Quelqu'un qui dit non, ça a une résonance dans toutes les époques. En revanche, on peut faire des ponts entre la période de l'Empire et maintenant. Est-ce que la liberté sans ordre, ça existe ? Ce n'est pas pour rien que l'Empire arrive juste après la Révolution. Le peuple le désirait. Il voulait une espèce de concorde nationale, que l'on travaille tous ensemble. Par exemple Napoléon a fait travailler des ex-monarchistes et des Jacobins, c'est quand même incroyable. Mais c'est ce que fait Charles de Gaulle. Il fait travailler après la guerre des gens de Vichy et des communistes. Parce qu'il y a quelque chose qui les dépasse, qui dépasse leur idéologie. Napoléon, c'est ça. C'est l'idée de la France. Ce qui fait qu'elle gagne, malgré le fait qu'elle soit attaquée sur toutes ses frontières, ça consolide le peuple. Il y a des questions sous-jacentes mais après ça reste un film d'aventure. J'aime penser à ce que ferait Vidocq en 2018. Je pense qu'il infiltrait les casseurs pour les arrêter. Concrètement, c'est ce qu'il ferait. Il ne serait pas contre le peuple mais il essaierait d'arrêter les casseurs. Mais je pense qu'en 2018, il y a des flics qui sont des Vidocq, en tout cas potentiels ou qui le sont déjà.

Vous avez porté à l'écran Mesrine et maintenant Vidocq. Quel autre personnage historique aimeriez-vous porté à l'écran ?

J'adorerais porter à l'écran La Fayette. C'est un projet qui est dans les cartons depuis pas mal de temps, j'ai l'impression que ça avance plutôt bien parce que c'est une grosse série avec Studio Canal. On parle de l'Empire, mais on prend n'importe quel maréchal, n'importe quel général, même n'importe quel grognard, c'est une histoire fantastique. On peut revisiter Jeanne D'Arc, faire Clovis, Jean Moulin. Quand on aime l'histoire, quand on commence à lire des bouquins sur n'importe quel personnage historique, on s'aperçoit que leur réalité est mieux que notre imaginaire. C'est un puits sans fond. Ce n'est pas pour rien qu'il y a eu plusieurs versions du personnage de Vidocq. C'est un archétype de roman, on peut le décliner à l'infini. Pourquoi je me suis attelé à Vidocq ? j'avais l'impression, parce que j'avais lu les mémoires et en les relisant ça a confirmé mes impressions, qu'il n'avait jamais été proposé tel qu'il est. Soit il était proposé d'une façon souvent un peu aérienne et très bien. La série avec Claude Brasseur est très bien mais on est loin du vrai personnage de Vidocq qui est plutôt un sanglier, qui a les pieds sur terre, qui est plutôt taciturne, quelqu'un qui se protège énormément. C'est plus un ours qu'un guépard.

Une anecdote de tournage ?

A un moment, il faut faire très attention en tant que metteur en scène de ne pas être spectateur des acteurs parce que quand on est spectateur des acteurs, on n'est plus objectif et on devient un fan. Et plusieurs fois, ça m'est arrivé sur le plateau. On parlait de Fabrice Luchini, et à un moment, il a une grande tirade et je me suis dit : "C'est pas mal ce qu'on a écrit quand même !". Et en fin de compte, je me suis dit que c'est n'importe quoi, ce n'est pas ce qu'on a écrit qui est pas mal, c'est comment il le dit. Parce que ce texte dans la bouche d'un autre acteur, ça serait une catastrophe. Il faut être un peu modeste, ce n'est pas moi qui ai écrit le scénario, je l'ai adapté avec Eric Besnard, mais d'une façon générale, je suis toujours assez fasciné par la façon dont les acteurs s'approprient les mots des autres, comment on a l'impression qu'ils les improvisent et que ça vient d'eux. C'est une force des acteurs. Ce qui est incroyable avec Fabrice, c'est que je suis sûr que si vous l'emmenez dans un quartier défavorisé en banlieue, avec des gamins très durs, qui en ont rien à foutre de l'Histoire de France ou de la littérature, vous les laissez une heure avec Fabrice Luchini, ils sont fascinés. Parce qu'il arrive à faire partager la culture sauf qu'il ne nous prend pas pour des cons. Quand il s'adresse à des gens à la télévision, même si c'est un show, il respecte vachement son public.

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