Millau. Jacques Pierrejean, le designer millavois que le ciel s’arrache

Abonnés
  • Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long.
    Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long. Repro CPA
  • Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long.
    Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long. Repro CPA
  • Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long.
    Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long. Repro CPA
  • Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long.
    Jacques Pierrejean a mis deux ans et demi pour le concevoir l’intérieur du Deer Jet (en haut). Presque autant pour le Yas, un yacht de luxe de 141 m de long. Repro CPA
Publié le
Aurélien Delbouis

Spécialisé dans le design intérieur de jets et de yachts, le Millavois est un précurseur. Il a œuvré sur les avions de chefs d’État et de compagnies prestigieuses. Ses aménagements allient la fonctionnalité de l’espace et le bien-être. Rencontre

On peut avoir les pieds sur terre et la tête dans les nuages. Jacques Pierrejean est de ceux-là. Le Millavois, passé par l’école Boulle avant d’exercer ses talents d’architecte en Afrique, est aujourd’hui un designer réputé dans l’aéronautique et la marine. Un designer "heureux" qui met régulièrement son savoir-faire au profit des grandes fortunes de ce monde, en réalisant leurs rêves les plus fous. Un parcours atypique pour celui qui espérait réaliser des décors de films… mais surtout une question qui va bousculer ce parcours tout tracé : "Qui aménage les avions ?" C’était au début des années 80. "En revenant à Paris, je me suis dit qu’il serait intéressant de rentrer en contact avec Dassault. Il se trouve qu’à cette époque, Dassault ne faisait que des avions militaires et très peu d’avions privés".

"Par un concours de circonstances miraculeux" dira-t-il, le jeune architecte rencontre donc Marcel Dassault, conscient de l’appétit croissant de ses clients pour les jets d’affaires. Ensemble, ils développent une unité d’aménagement d’avions privés, Dassault Falcon service. "Pendant ces douze années, je me suis retrouvé chez l’avionneur comme consultant pour aménager des Falcon. On en faisait de quatre à six par an. Ça prenait de plus en plus d’ampleur. Dans le monde, nous devions être environ cinq cabinets à pouvoir travailler ce genre de design intérieur d’avions". Devant le succès rencontré, les avionneurs civils suivent.

"Comme une résidence"

Face à Boeing, "le monstre de Seattle", Airbus qui n’est pas encore le géant européen que l’on connaît, tente de faire sa place. La réputation de l’Aveyronnais fait le reste. "Airbus m’a demandé de travailler sur quelques projets d’avions en aménagement privé. Ces projets ont commencé à intéresser les vendeurs d’Airbus, ce qui m’a valu de faire des avions privés de grande taille, très vite. Des projets incomparables avec ce que je faisais dans le milieu des jets d’affaires". Comme une résidence, Jacques Pierrejean conçoit des avions luxueux, confortables et contemporains, en réponse à une clientèle exigeante. "Plus dynamique, plus créatif", se félicite-t-il volontiers, le style du Millavois séduit. Les commandes affluent. Le savoir-faire de Jacques Pierrejean s’exerce bientôt dans les avions présidentiels.

"On ne vend plus un siège mais un espace"

Avec l’enthousiasme d’un jeune premier, celui qui a fêté ses 62 ans le 28 juillet dernier, raconte comment il a aménagé celui de Jacques Chirac ou de Silvio Berlusconi en 2005. Plus récemment celui de l’Émir du Qatar et du Premier ministre du Qatar l’année suivante. L’Aveyronnais, se souvient aussi d’une commande spéciale. Très spéciale. "Installer des toilettes à la turque dans un avion de ligne. Très difficile, reconnaît-il, mais nous y sommes arrivés." S’il rend possible les caprices aériens des grands de ce monde, – il a notamment aménagé trois Boeing 747 pour des usages privés – Jacques Pierrejean doit aussi sa renommée à son travail pour Emirates ou Qatar Airways et leurs flottes d’Airbus A380. Son fait d’armes : repenser la première classe dans sa totalité.

"On ne vend plus un siège mais un espace. Et dans cet espace, on offre un vrai lit, une table, une penderie. L’idée est de faire voyager les passagers de première classe comme s’ils étaient dans un jet privé". Pour la First Class des A380 d’Emirates, Jacques Pierrejean va concevoir les premières douches dans les avions. Un tour de force pour lequel il aura fallu bousculer les contraintes techniques tout en répondant aux normes de sécurité. On parle ici d’une innovation mondiale !

"Projets fous"

En parallèle, le designer vend son art aux fortunes de ce monde. Son projet le plus fou ? Un A380 privé. "C’était il y a huit ans, explique Jacques Pierrejean. Je suis convié par le roi Fahd qui cherche un projet pour sa future résidence aérienne. J’attends dans une salle immense dotée d’un mur couvert de télévisions allumées, avec neuf autres concurrents. Arrive le roi, accompagné de sa suite. Le défilé des candidats commence. Il accueille les propositions avec un enthousiasme modéré, avant de déclarer que rien ne l’intéresse. Je suis finalement retenu, bien que tout le monde me déconseille de travailler pour lui : il serait mauvais payeur ! La crise économique règle la question, sonnant le glas de ce chantier faramineux. D’autant qu’un avion privé à deux étages ne pouvant se poser que dans un nombre limité d’endroits, n’aurait pas été des plus fonctionnels… Mais, pour le roi, ce n’était qu’un détail."

Totale démesure

Plus récemment, Jacques Pierrejean a transformé un Boeing 787 en palace volant. Pour la compagnie Deer Jet, filiale aviation d’affaires du groupe chinois HNA, le designer a imaginé ce qui est encore aujourd’hui l’avion le plus luxueux au monde… Suite parentale, dressing XXL, salle de bains avec douche, à l’avant. Grand salon avec tables basses et canapés, salle à manger pouvant accueillir 16 convives en partie centrale. Cabine disposant de 18 fauteuils transformables en lits en queue d’appareil. La démesure est totale… Sachez néanmoins que le biréacteur est disponible à la "location" au tarif de 62 000 euros l’heure de vol, équipage compris.

Le Yas, sauce aveyronnaise

S’il conçoit des avions luxueux, confortables et contemporains, Jacques Pierrejean a aussi le pied marin. Son dernier "bébé", l’aménagement du Yas, un Yacht de luxe propriété de Hamdan bin Zayed bin Sultan Al Nahyan, membre de la dynastie régnante d’Abou Dabi.

Capable d’accueillir 60 passagers, pour 56 membres d’équipage, le Yas et ses huit ponts (!) détient le titre du huitième plus grand yacht privé du monde, avec ses 141 m de long. "Nous avons réalisé l’intérieur et l’extérieur" se félicite le designer, discret quant au budget consacré. Un budget probablement conséquent au regard des 200 millions d’euros investis par son propriétaire.

Cet article est réservé aux abonnés
Accédez immédiatement à cet article
2 semaines offertes
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?