Aveyron : ces labels de terroir qui franchissent les frontières

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  • The Angelcy, en concert à la MJC de Rodez.
    The Angelcy, en concert à la MJC de Rodez. DR
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Monsieur l'Ouïe

Les labels musicaux aveyronnais ne sont pas légion, mais ils ont une forte propension à aller voir ailleurs s’ils y sont. Et ils y sont.

Vingt-six janvier 2019, MJC de Rodez. Les Israéliens de The Angelcy sont en concert, pour célébrer la sortie de leur deuxième album. Pourquoi Rodez ? Parce le groupe israélien est produit par Ulysse, la maison d’artistes figeaco-castonétoise.
Depuis que la maison d’artistes figeacoise s’est installée dans le ventre de la Baleine d’Onet, et même avant, Ulysse qui est aussi un label musical n’avait dans son escarcelle que des artistes locaux, régionaux, au plus loin nationaux, tels que Barcella, le KKC Orchestra ou les Aveyronnais Wally et Lombre. Avec the Angelcy, Ulysse franchit pour la première fois les frontières. Avec un nom pareil, on se dit qu’il était temps. Ulysse donc a produit le deuxième album de ce groupe israélien qui connaît un joli succès à l’international, notamment en Allemagne, avec des textes façon song-writter (on évoque Joan Baez, Leonard Cohen ou Dylan) sur une musique acoustique des plus inventive et des jeux de voix ad hoc. Un deuxième album que Sony, partenaire d’Ulysse au niveau mondial, distribue, et que Rotem Bar Or, le leader charismatique du groupe, a baptisé « Nodissey »... juste en référence à Ulysse maison d’artistes.
Un Ulysse qui va sûrement prendre goût au voyage et se payer une autre odyssée en avril, avec la sortie du deuxième album du groupe germano-luxembourgeois Say Yes Dog, nouveau poulain de la maison.

Le monde entier en confidentiel

Depuis sa sortie en 2011, « Canopy », le premier album post-rock des Aveyronnais de Silent Whale Becomes A°Dream, continue à faire son chemin dans la sphère mondiale des amateurs du genre.
Depuis sa sortie en 2011, « Canopy », le premier album post-rock des Aveyronnais de Silent Whale Becomes A°Dream, continue à faire son chemin dans la sphère mondiale des amateurs du genre. DR

Mais le goût du voyage est de toute manière plutôt prononcé chez la poignée de labels aveyronnais. Comme chez Arbouse Records qui fête cette année ses 20 ans d’existence. « Depuis le début et la première référence qui était « Eglantine », un artiste aveyronnais d’ailleurs, on est distribué un peu partout sur la planète, assure Cyril Caucat son créateur.  Bon, ce ne sont pas des kilos de CD qui s’en vont, mais des poignées. Distribution internationale confidentielle, c’est la marque de fabrique. »
Chaque œuvre sort à un millier d’exemplaires chez Arbouse, mais parfois, il faut remettre la sauce. Comme avec « Canopy », le premier album post-rock des Aveyronnais de Silent Whale Becomes A°Dream, qui depuis sa sortie en 2011 continue à faire son chemin dans la sphère mondiale des amateurs du genre. À tel point que le groupe sort d’une tournée en Chine en novembre dernier. Pour le coup un rêve éveillé pour ce groupe qui va sortir un deuxième album... mais pas chez Arbouse. « Avec le succès, ils m’échappent un peu », sourit Cyril. Qui ne pleure pas sur son sort et continue, en produisant également des artistes venus d’ailleurs, de toute la planète. Des « rencontres d’artistes » qui débutent aujourd’hui via Internet autour de projets lancés par Cyril. Et « le Net a aussi permis des rencontres physiques, avec des gens qui sont venus se produire en live », en France, et en Aveyron. Au programme de cette année anniversaire d’Arbouse, la parution vinyle « dans quelques semaines » d’A.G, un Grec versé dans la musique minimaliste, et une compilation « Les fous doux ».

Mixeur sans frontières

Favoriser les rencontres via d’abord le Net jusqu’à en faire un projet physique, tel est aussi la façon de faire du label ruthénois Dora Dorovitch.
Favoriser les rencontres via d’abord le Net jusqu’à en faire un projet physique, tel est aussi la façon de faire du label ruthénois Dora Dorovitch. DR

Favoriser les rencontres via d’abord le Net jusqu’à en faire un projet physique, tel est aussi la façon de faire du label ruthénois Dora Dorovitch, versé dans le rock d’abord, puis plus dans le rap underground, loin du rap rutilant des emperlousés à minettes et du show-business.
Label créé en 2003 par Cisco notamment (1), madame Dora couve sous son aisselle bienveillante quantité d’artistes venus des quatre coins arrondis de cette planète. Le label incite aux rencontres, propose des pistes de travail, et produit le résultat, le plus souvent en vinyle. Cela donne par exemple Triune Gods, un trio composé d’un Japonais, d’un Américain et d’un Canadien. Ou Drones, ou si Pink Floyd avait fait du rap...
Dernière sortie en date chez Dora Dorovitch, l’excellent « Thorts and Kady Starling, sur le thème de la parité homme-femme, où lui, Thorts, et elle, Kady, se répondent en morceaux au milieu d’une kyriade d’invités.
Là, ça vient d’Australie, rien de moins.

Épices indiennes sur la Nauze, rock’n’roll chez Méthanol

Cette année, la Nauze a sur la planche un voyage poético-musical autour de la Méditerranée. C’est quand même plus dépaysant qu’une escapade à Bouloc. Quoiqu’avec quelques rennes et deux ou trois Lapons...
Cette année, la Nauze a sur la planche un voyage poético-musical autour de la Méditerranée. C’est quand même plus dépaysant qu’une escapade à Bouloc. Quoiqu’avec quelques rennes et deux ou trois Lapons... DR

Au Studio de la Nauze, on ne voyait guère plus haut que l’Aubrac ni plus bas que le Larzac. « Avec les labels Oc Sonic et la Dralhe, on faisait dans les productions en occitan, donc on n’avait pas vocation à franchir les frontières », commente Stéphane Sichi.
Avant d’ajouter malicieux : « Quoiqu’on allait plus loin que la planète, carrément dans le cosmique, puisqu’on avait deux extraterrestres : Wally avec le Macarel Show, et René Duran. » Pas faux. Mais en cherchant bien, quelques épices indiennes ont flotté sur le studio avec le projet Mukhra initié par le pianiste Lionel Mellot et le batteur Claude Gastaldin. Lesquels avait conviés en France deux musiciens indiens, Pandit Anindoo Chaterjee et Pandit Ashok Pathak, aux tables et au sitar, et dont la venue en France pour des enregistrements et des concerts, à Conques et à Genève notamment, ne se passa pas comme une lettre à la poste... Et pour cette année, la Nauze a sur la planche un voyage poético-musical autour de la Méditerranée. C’est quand même plus dépaysant qu’une escapade à Bouloc. Quoiqu’avec quelques rennes et deux ou trois Lapons...

Le Bassin decazevillois est la  terre du label Méthanol Prod, centré sur la production du groupe les Ennuis commencent, et des groupes assimilés.
Le Bassin decazevillois est la terre du label Méthanol Prod, centré sur la production du groupe les Ennuis commencent, et des groupes assimilés. DR

Enfin, un tour vers le Bassin decazevillois, terre d’accueil, charbon aidant, d’immigrés, espagnols et polonais notamment. le label Méthanol Prod, une association en fait, est centré sur la production du groupe les Ennuis commencent, et des groupes assimilés. Locaux, donc. Et pourtant, les Ennuis commencent franchissent allègrement les frontières, jouant en Écosse, en Espagne (normal, avec les racines du leader Ben) et cette année en Suisse. Mieux même, des albums des ennuis se retrouvent expédiés aux States ou au Japon. « Tu sais pas trop comment les mecs connaissent, c’est un peu énigmatique comme truc, lance Hugo des Ennuis. Maintenant, on s’est mis sur les plateformes, parce que maintenant la musique passe par là. Et tu te rends compte que c’est assez mondial. » Et comme ce bon vieux rock’n’roll, lui aussi, se fout bien des frontières, celui qu’on fait à Decazeville lui aussi a bien droit à son odyssée.

(1) Nous n’avons pas joint Cisco, touché cette semaine par un deuil familial. Sincères condoléances à lui, sa famille et ses proches.
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