Espalion : incarcéré pour assassinat, Marc Féral s’est donné la mort

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  • Marc Féral lors de son premier procès en assises à Rodez.
    Marc Féral lors de son premier procès en assises à Rodez. Philippe Ferrand / DDM
Publié le
C.C et Mat. R.

Jugé coupable de l’assassinat de Jean-Paul Chardenoux le 18 août 2010 à Espalion, Marc Féral s’est suicidé dans la nuit de lundi à mardi dans sa cellule de la maison d’arrêt montpelliéraine de Villeneuve-lès-Maguelone où il purgeait une peine de 25 ans de réclusion.

Marc Féral, 61 ans, s’est pendu dans la nuit de lundi à mardi, dans sa cellule de la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone (Montpellier). Une cellule individuelle, dans laquelle ont été retrouvés un téléphone portable et une lettre qu’il aurait laissée avant de se donner la mort en utilisant des linges pour en faire une corde. Selon des sources pénitentiaires, il n’avait pas été placé dans une cellule spéciale, réservée aux détenus suicidaires, car il n’avait pas donné de signes particuliers en ce sens.

Ancien gérant durant près de dix ans, de la discothèque Le Rétro à Baraqueville dans les années 2000, Marc Féral avait abattu d’un coup de fusil Jean-Paul Chardenoux, garagiste à Espalion, le 18 août 2010 pour une affaire passionnelle, et par jalousie, la victime étant le nouveau compagnon de son "ex". Dès après avoir tiré, il avait alors tenté de retourner l’arme contre lui et s’était blessé à l’épaule. " Je n’ai pas eu le courage de me tuer ", confiera-t-il à la barre de son procès en appel.

Mis en examen pour assassinat le 21 août 2010, il reconnaît les faits et la préméditation de son geste. Il est incarcéré à la prison de Villeneuve-lès-Maguelone, à sa sortie de l’hôpital. Le voisinage avec d’autres détenus ne se passe pas vraiment très bien, il sera donc par la suite transféré à Druelle en juillet 2013, d’où il aurait cherché à commanditer l’assassinat de son ex-compagne à travers un "contrat" conclu avec d’autres prisonniers. Affaire pour laquelle la justice le relaxera. Il retourne alors à Villeneuve, où le voisinage avec d’autres détenus ne se passe pas vraiment très bien.

Le 16 janvier 2014, au terme de quatre jours de procès, la cour d’assises de l’Aveyron le condamne à 24 ans de réclusion, assortis de 16 années de sûreté. Il fera appel. Le 29 juin 2016, Marc Féral tente de se suicider à la veille de l’ouverture de son procès en appel, à Montpellier. L’audience est ajournée.

Son procès en appel se tiendra finalement le 25 septembre 2017 à Montpellier. À l’issue d’une semaine de débats, l’avocat général réclame 20 ans de réclusion. Les jurés et la cour iront plus loin : 25 années de réclusion, toujours assorties de 16 ans de sûreté. Marc Féral se pourvoit en cassation le 6 février 2017 pour sa demande de remise en liberté, pourvoi rejeté le 13 juin 2017. Son parcours judiciaire est alors terminé, il devra rester en prison. Marc Féral était "sans histoires", aussi bien avec ses codétenus qu’avec les surveillants qu’ils ne laissaient pas indifférents. Il était "auxiliaire" dans la maison d’arrêt où il s’était vu confier un travail. Mais ces jours derniers, il avait été suspendu par les instances disciplinaires.

L'oiseau nde nuit s'était brûlé les ailes

Celui qui aura mis en lumière les nuits aveyronnaises durant près de trente ans, aura été parcouru tout au long de sa vie de zones d’ombre dans lesquelles il se sentait finalement à son aise. Marc Féral, volontiers taciturne, toujours affable avec sa clientèle, n’aimait guère parler de lui.
éclairagiste fétiche du groupe Gold au temps de sa splendeur, il savait jouer du projecteur dans bon nombre d’autres concerts quand les stars faisaient scène en Aveyron. La musique, la lumière et la nuit deviendront son élément quand il s’associe avec le propriétaire (et sa fille) de l’Hélianthe, discothèque emblématique des années 80 et 90, près de Lanuéjouls. L’association devient une affaire de famille et vole en éclats sur fond de conflits aussi passionnels que financiers.


Conflits en boîtes


Il emménage alors quelques kilomètres plus loin, à Montbazens, pour y créer La Nuit avec deux associés, discothèque qui connaîtra elle aussi un vaste succès. C’est l’époque des thés dansants du dimanche et du samedi soir, formule qui fait déjà fortune dans les années 90. Mais, là encore, l’association prend du plomb dans l’aile : les cogérants se séparent, Marc Féral se transporte en 1998 à Baraqueville pour reprendre le « 747 » devenu « Dakota ». La boîte tourne comme un avion, il en fera l’emblème du disco-techno. Et plus encore en l’appelant Le Rétro que l’on fréquente de tous les départements limitrophes pour ses orchestres musette qui savent faire danser les aînés…


Passionnel


Tout au long de ces années, le parcours de Marc Féral sera bien jalonné de quelques fausses notes sans grandes conséquences, entre menaces, petites escroqueries, travail dissimulé… Le monde obscur de la nuit, en somme. Avec son cortège de rencontres sur fond de séduction, domaine dans lequel Marc Féral n’avait guère de leçon à recevoir. C’est d’ailleurs ce côté passionnel, jaloux et possessif, qui le perdra, plus que tout autre, lui qui était aussi affecté par de gros problèmes de santé, un rein en moins imposant la dialyse. Alors, quand son ex-compagne s’affiche avec un nouveau partenaire, il perd pied. Il connaît bien Jean-Paul Chardenoux, c’est un copain, mais là, la colère prend le dessus. Il se rend chez lui ce mercredi 18 août dans l’après-midi, avec des intentions bien définies : se venger de son dépit amoureux. Un coup de fusil de chasse suivi de près d’une tentative de suicide avec cette arme, qui le laissera vivant, mais blessé à l’épaule. Commence alors un parcours judiciaire d’assassin, ainsi qualifié par la justice qui le condamnera définitivement en 2017. En prison, il tentera à quelques reprises d’en finir, puis voudra en sortir, puis cumulera les regrets. Et finira, ce 26 mars, par rester maître de son destin. Fermez le bal.
 

Son parcours judiciaire

  • 18 août 2010. À Espalion, Marc Féral abat Jean-Paul Chardenoux d’un coup de fusil, retourne l’arme contre lui et se blesse.
  • 20 août 2010. Marc Féral est placé en garde à vue.
  • 21 août 2010. Hospitalisé à Montpellier, Marc Féral est mis en examen pour assassinat et est incarcéré à la prison de Villeneuve-lès-Maguelone à sa sortie de l’hôpital.
  • 14 octobre 2011. Marc Féral est transféré à Espalion pour les besoins de la reconstitution.
  • 1er juillet 2013. À sa demande, Marc Féral est transféré à la maison d’arrêt de Druelle.
  • 16 janvier 2014. Après quatre jours de procès, Marc Féral est condamné à 24 ans de réclusion, peine assortie de 16 années de sûreté.
  • 26 mars 2015. Marc Féral mis en examen pour instigation à l’assassinat.
  • 2 mai 2015. Le procès en appel est reporté sine die après le malaise du président Joël Mocaer.
  • 29 juin 2016. Après une crise suicidaire la veille de l’ouverture du procès en appel, Marc Féral est évacué en ambulance du tribunal, le procès est à nouveau reporté.
  • 17 janvier 2017. Marc Féral demande à être libéré pour délai irraisonnable de procédure.
  • 19 janvier 2017. Dans les médias, la famille Chardenoux, très discrète jusqu’alors, fait savoir sa colère sur cette demande de remise en liberté.
  • 31 janvier 2017. La cour d’appel rejette sa demande.
  • 6 février 2017. Marc Féral se pourvoit en cassation pour sa demande de remise en liberté.
  • 19 avril 2017. Le tribunal correctionnel de Rodez requiert 4 ans de prison à son encontre pour instigation à l’assassinat.
  • 13 juin 2017. La cour de cassation rejette sa demande.
  • 22 juin 2017. Marc Féral relaxé pour les faits d’instigation à l’assassinat.
  • 25 septembre 2017. Son procès en appel pour l’assassinat de Jean-Paul Chardenoux s’ouvre à Montpellier.
  • 30 septembre 2017. Il est condamné à 25 ans de réclusion assortis de 16 ans de sûreté et 7 ans de suivi sociojudiciaire. L’avocat général avait requis 20 ans
  • 26 mars 2019. Marc Féral se donne la mort dans sa cellule de la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone. 

Sabrina Chardenoux : « On aurait aimé qu’il purge sa peine »

Sabrina, la fille de Jean-Paul Chardenoux, assassiné par Marc Féral, a appris la nouvelle en fin de matinée par le biais de son avocat, Me François-Xavier Berger. Et elle ne s’y attendait pas vraiment : « On aurait aimé qu’il purge sa peine entièrement… C’est un gâchis pour nous. Car l’histoire ne sera jamais terminée, la blessure ne s’effacera pas. Et ce nouvel événement fait remonter plus de 10 ans de batailles judiciaires et vient une nouvelle fois tout remuer… », a-t-elle confié, tout en rappelant que Marc Féral « nous faisait toujours peur… ».

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