L'appétit pour la farine bio donne du grain à moudre aux meuniers

  • L'appétit grandissant en farines bio a, de l'avis général, contribué à développer les exploitations céréalières de ce type
    L'appétit grandissant en farines bio a, de l'avis général, contribué à développer les exploitations céréalières de ce type tataks / IStock.com
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Relaxnews

(AFP) - "Près de 40% des boulangers parisiens avaient au moins un produit bio en 2018. Il y a cinq ans, il y en avait peut-être 10%", remarque Olivier Deseine, meunier francilien: l'appétit grandissant en farines bio a, de l'avis général, contribué à développer les exploitations céréalières de ce type.

En 2018, le secteur des grandes cultures, longtemps parent pauvre, est même devenu pour la première fois la locomotive des conversions des fermes françaises à ce type de production, comme l'a indiqué à l'AFP l'agence bio.

Dernier exemple de la volonté du secteur de se développer, l'inauguration par le groupe Soufflet d'un moulin dédié au bio, à Lozanne, dans le département du Rhône.

"C'est le premier moulin du groupe dédié au bio. On a fait de manière confidentielle de tout petits volumes bio, mais on n'est pas producteur de bio" à l'origine, explique Erick Roos, directeur général de la meunerie pour le groupe.

L'entreprise auboise, un des principaux meuniers français, a fait le choix d'un moulin spécifique, "car il ne faut pas qu'il y ait de contamination" pour satisfaire aux "exigences de traçabilité" du bio.

D'autre part, le moulin est équipé d'une meule, plus rare en farine conventionnelle et permettant, contrairement aux cylindres utilisés en meunerie industrielle, de produire de la farine de meule, donc plus ou moins enrichie avec les sons, jusqu'à faire de la farine de blé complet.

La production de ce moulin ne représentera toutefois qu'une toute petite partie de la farine produite par le groupe. Jusqu'à 25.000 tonnes en capacité maximale, sur les 700.000 à 800.000 tonnes de farine produites chaque année par Soufflet.

Mais d'autres projets apparaissent et de plus en plus d'agriculteurs envisagent ce type de production afin d'améliorer leur marge, dans un monde où les cours sont plus volatiles que jamais.

Alors que ces derniers temps, "le prix payé au producteur atteignait 160 à 170 euros la tonne, il peut atteindre en bio, selon les contrats, 350 à 500 euros la tonne", explique à l'AFP Franck Bluteau, agriculteur vendéen et responsable de la commission bio qui vient tout juste d'être mise en place au sein du conseil d'administration de l'AGPB (syndicat des producteurs de blé), autre signe de la montée en puissance de cette production.

- La France importe un tiers de ses besoins -
Si le blé tendre est presque exclusivement utilisé en meunerie, M. Bluteau souligne que les autres espèces de céréales bio (orge, triticale, maïs) sont utilisées uniquement en nourriture du bétail, l'autre maillon d'entraînement de la conversion des exploitations, grâce à la demande croissante de viande bio.

Le prix est alléchant, mais la production de céréales bio n'est pas sans risque, notamment compte tenu de la vulnérabilité en cas d'aléas climatiques.

"On produit à peu près deux tiers de nos besoins (en blé tendre bio), on en importe un tiers", indique M. Bluteau.

Mais lors de la récolte 2018, marquée par des aléas climatiques sévères, seulement "50% des besoins ont été couverts", souligne Florent Guhl.

La faute à des variations dans les volumes dues en partie à l'absence de produits pour protéger les cultures après récolte et à des rendements plus aléatoires.

"Là où le blé conventionnel atteint les 7 tonnes (70 quintaux) à l'hectare, le rendement en bio oscille entre 2 et 5 tonnes, selon les régions", selon Franck Bluteau.

Ce constat ne décourage pas les grandes coopératives: Vivescia et les Grands Moulins de Paris (farine Francine) envisagent de spécialiser un à deux moulins en bio à l'horizon 2020.

Axiane Meunerie, filiale d'Axéréal, espère quant à elle doubler d'ici trois ans les quelque 39.000 tonnes de blé bio qu'elle collecte actuellement.

De quoi atteindre peut-être le vœu de la filière: l'autosuffisance de la France en farine bio d'ici à 2022.

La demande, elle, ne cesse de croître. Selon le groupe Soufflet, en 2017 un Français sur quatre a consommé du pain bio, parmi lesquels 18% étaient de nouveaux consommateurs.

ngu/tq/mcj

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