Histoire de voir ! Rodez : de l’asile de Paraire à l’hôpital de Cayssiols

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  • L’hôpital Sainte-Marie de Cayssiols, près de Druelle, tel qu’il est aujourd’hui.
    L’hôpital Sainte-Marie de Cayssiols, près de Druelle, tel qu’il est aujourd’hui. Cédric Méravilles
  • la chapelle de l’asile départemental de Paraire.
    la chapelle de l’asile départemental de Paraire. Cédric Méravilles
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Centre Presse

Suivez Maëva Cluzel, stagiaire au service du patrimoine dans une nouvelle évocation de l’histoire du patrimoine ruthénois.

La création des hôpitaux généraux dans la seconde moitié du XVIIe siècle correspond à une volonté politique d’ordre public : ces établissements n’ont pas de vocation médicale mais sont destinés à enfermer les indigents, les mendiants, les orphelins et les enfants de mendiants comme le précise l’édit royal de 1662 qui décrit et définit leur vocation. Depuis la fin du Moyen Âge, pauvreté et mendicité se développent et menacent le confort et la sécurité des classes bourgeoises émergentes. En réaction, le travail se trouve nimbé de valeurs morales et religieuses. Les catholiques y voient un moyen de combattre le vice mais aussi une forme de prière et d’ascèse.

Dès le début du XVIIe siècle, Paris, Rouen et Lyon se dotent ainsi d’établissements pour enfermer les indigents. L’édit de 1662 prône la généralisation de ces institutions qui furent à la fois des prisons, des couvents et des manufactures.

Avec l’obligation de prise en charge des aliénés par l’État, la plupart d’entre eux sont placés dans des prisons ou des hôpitaux, non adaptés à leurs pathologies.

De nombreux membres du monde médical s’en offusquent et tentent de faire évoluer la situation, comme Jean Colombier, inspecteur des hôpitaux en France, qui publie en 1785, avec François Doublet un document sur l’organisation des maisons pour soigner les "insensés".

"Les furieux, les tranquilles, les imbéciles et les convalescents"

Jean-Etienne Esquirol publie également au début du XIXe siècle, un ouvrage sur le sort des aliénés en France. Le retentissement de ce dernier fait comprendre l’urgence de la situation à l’État qui émet une circulaire pour améliorer les soins des malades.

L’architecture asilaire s’élabore alors, préconisant des divisions selon les critères comportementaux : "Les furieux, les tranquilles, les imbéciles et les convalescents". Les progrès de la médecine permettent peu à peu l’amélioration du traitement des aliénés et l’asile devient un champ d’observation et d’expérimentation. La loi du 30 juin 1838 est un jalon dans l’histoire de la psychiatrie et du traitement des malades mentaux. Elle réglemente la construction des asiles et l’intégration de nouveaux patients. Le bâtiment devient ainsi une architecture thérapeutique.

Ainsi à Rodez, l’asile départemental de Paraire est construit en retrait de la ville par Etienne-Joseph Boissonnade, architecte départemental depuis 1821. Les malades y respirent un air pur et ont une vue sur des espaces ouverts. Les terrains sont achetés en 1836 et les travaux commencent en 1840. Les premiers aliénés sont admis deux ans plus tard. L’édifice, en forme de U, est séparé entre les hommes et les femmes et chaque côté du bâtiment est lui-même divisé en fonction des pathologies.

Tout au long de la construction, les plans sont modifiés en raison du manque de place. Les étages et les bâtiments ajoutés ne réussissent pas à répondre à la demande.

De plus, un autre problème persiste, celui de l’eau. En effet, Rodez connaît des difficultés d’adduction et l’asile manque d’eau, notamment pour l’hydrothérapie. Ainsi, les travaux accumulent du retard et sont finis par Jean-Baptiste Vanginot après la mort de Boissonnade en 1862.

Il faut déménager

Au début du XXe siècle, on prévoit de déplacer l’asile à cause du manque de place mais ce projet est stoppé par la Première Guerre mondiale. L’entre-deux-guerres est plus propice à la reprise de ce projet et la construction d’une annexe est envisagée pour remédier à l’encombrement de certains quartiers et ajouter des terrains agricoles.

Trois lieux sont alors proposés : Cayssiols, Combelles ou le Puech (au Monastère). Finalement, le conseil général choisit Cayssiols, seul endroit qui ne pose pas de problème pour l’accès à l’eau en grande quantité. De plus, lors d’une visite de l’asile de Clermont-Ferrand dirigé par la congrégation Sainte-Marie, les responsables de Rodez se rendent compte que la manière de gérer cet asile est excellente et décident de leur confier Paraire.

À l’asile de Cayssiols, sur les seize pavillons dédiés au soin des malades que comptait initialement l’asile, onze sont construits entre 1931 et 1955. Hauts de trois étages, ces bâtiments impressionnants de 43 mètres de long sur 11 mètres de large comportent une surface utile de plus de 1 600 m² chacun. L’asile de Cayssiols est terminé. En 1953, l’asile de Paraire se ferme tandis qu’une grande partie de ses bâtiments disparaît dans la démolition.

Aujourd’hui, il ne reste de cet asile que les deux bâtiments les plus récents et la chapelle Antonin-Artaud (poète, acteur, metteur en scène, dessinateur etc.), rebaptisé en l’honneur du malade le plus connu interné de 1943 à 1946 ; sans oublier la grande et douloureuse histoire du "soldat amnésique" de la Première Guerre mondiale soigné et "réclamé" par de nombreuses familles et ce, pendant près de vingt ans à Rodez.

Retrouvez le service du Patrimoine de Rodez Agglomération (agenda des visites et conférences, notices historiques sur les commerces anciens de Rodez etc.) sur : www.patrimoine.rodezagglo.fr

Chaque semaine, Centre Presse ouvre ses colonnes au service du patrimoine de Rodez Agglomération. Laissez-vous entraîner dans son sillage à la découverte de ces trésors, connus ou méconnus, de l’agglomération ruthénoise.

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