Conditions d’accueil dans les Ehpad à Millau : l’alerte des familles

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  • L’Ehpad de Saint-Côme fait face à un problème d’eau chaude dans les chambres.
    L’Ehpad de Saint-Côme fait face à un problème d’eau chaude dans les chambres. V. G.
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Victor Guilloteau

À Millau, des dysfonctionnements dans la prise en charge des résidents obligent les familles à tirer la sonnette d’alarme.

Alain Durand n’en peut plus de voir sa mère de 88 ans accueillie dans ces conditions. Chaque jour, les mêmes va-et-vient. Les aides-soignantes de l’Ehpad Saint-Côme, afin de réaliser les toilettes des personnes âgées, font des allers-retours entre les chambres avec des bassines d’eau chaude.

Depuis septembre et le déménagement des résidents de Saint-Michel vers l’ancienne clinique transformée en maison de retraite (conséquence de la construction du futur Ehpad, NDLR), les chambres ne disposent pas, ou trop peu, d’eau tempérée. "On se croirait au Moyen-Âge", observe Alain Durand, impuissant malgré son statut de membre du conseil de vie sociale des Ehpad millavois. "C’est indigne du respect de la vie humaine", dénonce-t-il.

"Ça fait mal au cœur"

Il n’existe que quatre douches collectives au sein de la structure, "mais inadaptées aux personnes en situation de handicap", indique-t-il encore. Les résidents les plus autonomes, en mesure de se laver eux-mêmes, "se nettoient donc à l’eau froide", fait savoir une aide-soignante, chez qui l’on sent l’abattement. " Certains nous disent parfois que ça fait du bien d’avoir un peu d’eau chaude. Ça fait mal au cœur d’entendre ça."

Le personnel porte réclamation depuis de nombreux mois, mais il ne se sent pas écouté par sa direction. "On nous dit que le sujet est traité, mais les actions sont sans effet, fait savoir une autre membre du personnel, qui laisse transparaître un sentiment d’abandon. On ne sait plus quoi faire. On ne veut pas pleurer pour de l’eau chaude. Mais les Ehpad doivent être des lieux de vie décents." Le conseil d’administration des Ehpad ainsi que le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en ont été avertis.

Pour Alain Durand, les personnels se sentent "laissés pour compte", en sachant qu’ils ont aussi à gérer la cohabitation parfois difficile entre résidents dans les chambres. "À Saint-Michel, ils étaient seuls en chambre. À Saint-Côme, ils sont deux, et pour le même tarif", déplore Alain Durand, qui met en avant la diminution d’intimité et de confort.

"Maltraitance" et insalubrité

L’Ehpad de l’Ayrolle fait face à d’autres dysfonctionnements. De sources internes, certains résidents, parmi les plus dépendants, ne seraient plus en mesure d’être douchés depuis "plusieurs mois". "Le lit-douche fourni au personnel est inadapté à la structure, aux chambres, et donc inutilisable", signale-t-on au sein de l’établissement, qui compte deux douches communes pour 90 résidents. Des éléments par ailleurs relatés, selon nos informations, auprès de l’inspection du travail et de la médecine du travail.

Des familles, en ciblant la direction, font également état de cas de "maltraitance ordinaire" (résidents en pyjama dès l’après-midi, parfois sans surveillance, livrés à eux-mêmes) et relèvent un manque de confort et d’hygiène (insalubrité, murs défraîchis).

"Depuis septembre, je ne cesse d’interpeller la direction sur ces problématiques", se désole, pour sa part, Corine Mora, représentante syndicale CGT à l’hôpital de Millau. Le contexte pèse sur le personnel, lequel n’espère qu’une chose, la livraison du futur Ehpad prévue fin 2021. D’ici-là, l’attente pourrait être longue.

Fatima Bouzaoua, directrice déléguée : "On essaye de faire le maximum"

Blattes, eau froide, douches, formation… Fatima Bouzaouza assure mener des actions pour régler les problèmes.

Comment comptez-vousrégler le problème d’eau chaude à Saint-Côme ?

Il y a de l’eau chaude à Saint-Côme, mais elle n’est pas équitablement répartie au sein de l’établissement. Nous avons trouvé des solutions depuis plusieurs mois, avec notamment la mise en place de réchauffeurs. Aujourd’hui, nous allons installer des ballons d’eau chaude dans chaque chambre. On veut à tout prix essayer de régler ce problème.

Concernant la présence de blattes à l’Ayrolle, quelles réponses pouvez-vous fournir aux résidents et personnels ?

Une cellule de crise s’est réunie il y a trois semaines pour prendre le sujet à bras-le-corps. Une entreprise est déjà intervenue plusieurs fois. Mais il est nécessaire de tuer les œufs avant de refaire une désinsectisation. On a pris des mesures préventives. Des boîtes hermétiques ont été mises à disposition pour sécuriser les aliments. On a aussi choisi de renforcer le personnel. L’ARS en a été informée. Aujourd’hui, il n’y a pas de risque pour les résidents de l’Ayrolle. Mais il faut reconnaître que la situation n’est pas agréable. Là encore, on trouve des solutions.

Toujours à l’Ayrolle, un lit douche semble inutilisable pour le personnel…

Suite au signalement d’un manque de matériel, un lit douche a effectivement été livré. Il ne peut être utilisé que dans la salle de bains commune.

Les ouvertures ne sont effectivement pas assez larges dans les chambres. Mais les soins sont réalisés chaque jour, soit au lit, soit à la salle de bains, en fonction du niveau d’autonomie du résident. En plus des soins quotidiens, les résidents sont douchés au moins une fois par semaine.

Selon nos informations, des résidents n’ont pas pu prendre de douche depuis un an…

C’est totalement faux. Que les personnes qui vous disent cela le prouvent.

Le personnel affecté au ménage (ASH) participerait, quant à lui, aux soins sans forcément de formation préalable. Comment est-ce possible ?

Dans la majorité des Ehpad, les ASH participent aux soins. Mais ils ne font pas de soins seuls. Fin 2018, alors que certains n’avaient pas les compétences suffisantes, nous avons initié des formations, afin que les tâches relatives aux soins leur soient accessibles. Nous accompagnons les personnels.

Vous fait-on part d’une souffrance au travail à l’Ayrolle ?

On nous a fait part de difficultés, alors nous menons des actions pour être plus serein, avec notamment un psychologue du travail, des formations, la mise à disposition d’équipements, la recherche de personnel, dans un contexte où il est difficile de recruter. Il est vrai que l’Ayrolle est un vieux bâtiment. C’est le sens de la construction du futur Ehpad. Nous essayons de faire le maximum pour tenir jusqu’à sa construction.

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