Industrie automobile : Sam relancée, Bosch sermoné
En raison de l’urgence sociale pour l’avenir de la filière automobile et des inquiétudes qui pèsent sur ses deux principales entreprises aveyronnaises, Bosch et Jinjiang Sam, la venue du ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, jeudi à Rodez, était particulièrement attendue. Le représentant du gouvernement a fait preuve de la plus grande fermeté envers la direction du groupe Bosch, afin qu’elle respecte ses engagements, pour compenser les pertes d’emplois provoquées par la crise du diesel. Un accord a, par ailleurs, été trouvé pour Jinjiang Sam. Le plan social est annulé et le travail reprend. Bruno Le Maire en appelle à un « nouveau départ industriel » de l’entreprise du Bassin de Decazeville. Une relance qui doit passer notamment par des investissements sur l’outil de production.
Un accord pour Jinjiang Sam
Depuis lundi matin, après la divulgation d’un possible plan social, qui pourrait concerner 200 à 250 emplois sur les 420 actuels, les salariés de la fonderie sous pression du Bassin de Decazeville avaient cessé le travail et bloqué tous les accès de l’usine. Pour mémoire, lors du rachat des trois unités du feu groupe Arche, Sam Technologies, FVM en Lorraine et Alfisa en Espagne, les industriels du groupe Jinjiang avaient promis un plan de développement et d’importants investissements, qui n’ont toujours pas eu lieu. Pour sa défense, le groupe chinois reproche au groupe Renault, son principal donneur d’ordres, de ne pas lui fournir suffisamment de travail. Mercredi soir, une première réunion préparatoire s’est déroulée à la préfecture en présence des dirigeants de Jinjiang Europe et Jinjiang Sam, MM. Yun Xu et Cavinato, des représentants des salariés, de deux cadres dirigeants du groupe Renault, Bruno Moustacchi et Carole Boyer (venus de Paris à Rodez, en voiture !) et des services de l’État. Hier matin, une nouvelle réunion s’est tenue en préfecture, en présence de Bruno Le Maire.
À l’issue de cette nouvelle rencontre un accord a pu être trouvé entre les différentes parties et les salariés ont décidé de reprendre le travail, le plan social initialement envisagé étant annulé.
Moderniser l’outil de production de Sam avec l’appui de l’État et de Renault
Lors de sa conférence de presse, Bruno Le Maire a salué l’attitude « très constructive » des salariés qui ont décidé de reprendre le travail. « Il faut donner un nouveau départ industriel à la Sam, a insisté le représentant du gouvernement. Il faut maintenant réaliser les investissements nécessaires, pour améliorer l’outil de production et la qualité des fabrications. Il faut aussi accélérer la formation des personnels et faire venir de nouvelles compétences sur le site. Les quinze jours qui viennent vont permettre d’engager la réflexion sur les investissements. »
« L’État a joué son rôle »
« L’État a joué son rôle » s’est félicité Sébastien Lallier, l’un des porte-parole CGT des salariés. « Nous allons maintenant pouvoir discuter sous l’égide de l’État et de Renault. C’est une grosse avancée. »
Le groupe Renault a profité de cette réunion de crise, en présence de Bruno Le Maire, pour confirmer ses engagements : un volume annuel de 85 M€ de commandes auprès de Jinjiang pour la période 2021-2025. Reste à passer le cap difficile de 2019-2020, pour lequel le constructeur français devrait également accompagner l’entreprise de la zone des Prades (lire en page Decazeville).
Bosch : « Les choses n’avancent pas. Il faut changer de braquet ! »
C’est ce qui s’appelle faire preuve de la plus grande fermeté.
Une fois encore, le ministre de l’Économie n’a pas épargné la direction générale du groupe Bosch. « Bosch doit avoir de vraies perspectives industrielles claires et ce n’est pas le cas. Je ne suis pas satisfait. Les choses n’avancent pas, il faut changer de braquet pour garantir la diversification de l’activité et maintenir l’emploi. Cela doit passer par une diversification externe mais également interne. »
Bruno Le Maire s’est engagé à revoir rapidement la direction générale du groupe.
« Les obligations de Bosch ne sont pas remplies. Il devait y avoir 300 emplois. Il y en a une centaine, peut-être moins, ce n’est pas suffisant. Bosch a 7 500 emplois en France, le groupe a partie liée avec le pays. L’État a rempli ses engagements, que Bosch prenne ses responsabilités. Bosch ne peut pas se laver les mains de l’avenir du site de Rodez. »
Neutralité énergétique et innovations technologiques
L’étude scientifique indépendante sur les émissions des véhicules essence et diesel aurait dû être finalisée d’ici décembre 2019. Selon les dernières informations, elle devait être retardée de plusieurs mois, l’échéance de septembre 2019 étant désormais avancée.
À la demande de Bruno Le Maire, un rapport d’étape sera fourni fin 2019 et les résultats de l’étude seront livrés au plus tard en juin 2020. « Le gouvernement est garant de la neutralité énergétique. Nous ne sommes pas là pour choisir une motorisation ou une autre mais pour garantir la santé des Français, a déclaré le ministre. Il faut investir dans les nouvelles technologies pour améliorer les véhicules thermiques existants jusqu’en 2040, afin de garantir qu’ils rejettent moins de CO2 et de particules. L’étude indépendante permettra de voir quels véhicules peuvent obtenir la vignette Critt’Air 1. Il n’y a aucune raison pour que les véhicules diesel ne puissent obtenir cette vignette. » Et le ministre de l’Économie de rappeler que 12 000 salariés travaillent dans le secteur du diesel en France. « Je comprends leurs inquiétudes. Je pense qu’il faut mettre les bouchées doubles. »
Des salariés de Bosch soulagés mais toujours mobilisés
À la sortie de leur rencontre avec Bruno Le Maire, les salariés de Bosch étaient relativement soulagés. Soulagés de constater que l’État ne les abandonne pas. Soulagés, donc, mais toujours mobilisés.
« C’est plutôt positif. Nous avons eu les paroles, il nous faut maintenant des actes, et nous demandons toujours à être reçus par Emmanuel Macron », nous a déclaré l’un des porte-parole de l’intersyndicale, à l’issue de l’assemblée générale du personnel, qui s’est déroulée en présence des dirigeants de l’usine et du président de Bosch France-Bénélux, Heiko Carrié, qui « n’a pas été autorisé » à prendre la parole, comme il l’aurait souhaité.
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