Katcross, le duo aveyronnais des machines qui dansent

Elle a porté longtemps ce projet dans la tête, Catherine Cros. Une histoire au long cours, un projet qui devint un peu plus réalité lorsque la Sud-Aveyronnaise (elle est originaire de Saint-Georges-de-Luzençon) se retrouva assise près de l’un des papes du trip-hop, le Britannique Tricky, ancien de Massive Attack, alors que ce dernier regardait sa première partie jouer sur scène. Ni une ni deux, Cathy l’aborda, lui dit qu’elle faisait de la musique, et lui glissa une démo. C’est ainsi qu’elle se retrouva dans la playlist de Tricky, et ses synthétiseurs en connection avec la scène électro pop internationale. Sortant par exemple deux albums et se produisant à droite à gauche, entourée de musiciens venus d’un peu partout, et même d’Amérique.

Mais c’est avec un musicien aveyronnais que le projet de Cathy eut son acte 2 en 2012. Avec Mathieu Blanc, un guitariste ruthénois rencontré deux ans plus tôt, et avec qui elle avait commencé à travailler. Cette année-là, c’est au Canada que naît véritablement le duo Katcross, soit Kat et Mat, Cathy et Mathieu donc.

À deux, ils créent l’alchimie sonore de Katcross, aux influences multiples, qui s’affinera avec les années. Mathieu a commencé à jouer du rockabilly à Rodez à 15 ans, puis de la musique occitane à la vielle à roue avant de revenir au rock.

La machine et l’esprit

À Millau, Cathy jouait à 16 ans dans divers groupes, au clavier, du hard-rock et du punk-jazz. Deux années auparavant, un grave accident de ski l’avait plongée dans le coma, avant par la suite de la laisser sur un fauteuil roulant. "Je ne sais pas si cela m’a poussée plus vers la musique, essaie-t-elle de se souvenir. J’ai commencé toute petite, je jouais sur un orgue d’église, et j’ai fait l’école de musique à Millau. Le son avec les orgues et les synthés m’intéressait, avec cet univers sonore et vibratoire."

Après l’accident, la musique, "ça m’est revenu comme un boomerang ", constate-t-elle toutefois.

Jusqu’à façonner son projet qui est devenu aujourd’hui Katcross. Avec Mat, le son "synthpop" (entendez par là pop avec synthétiseurs) va s’orienter au fur et à mesure vers le rock, au fil des concerts à deux ou appuyés de quelques musiciens (on a ainsi vu Clive Deamer, batteur de RadioHead et de Portishead, jouer avec eux à Sauveterre en août), ou encore des albums qui vont jalonner le parcours du duo, "Bridge the distance" en 2014, et "Downloading time" en 2017. Dans cet album, la chanson "I am the machine" résume l’écriture et la philosophie des chansons écrites par Cathy. Voire plus. "Je compare le corps à une machine qu’il faut réactiver, dit-elle. Je raconte ça, ces moments-là et aussi cette espèce de couloir que j’ai vu quand j’étais dans le coma. Mais j’y ajoute un côté poétique, tout est à double sens."

Le clip de la chanson, réalisé par Amic Bedel qui travaille à France 3 à Toulouse, un Aveyronnais lui aussi, raconte d’ailleurs cette journée de l’accident de Cathy. "Une sacrée aventure, se souvient-elle. On a trouvé un bus des années 80 à Rodez, et on a dû demander des autorisations pour le faire rouler. Puis on a enregistré le clip à Barèges (Hautes-Pyrénées), parce qu’il y avait aussi des installations qui dataient des années 80. "

Le corps, la machine, Katcross s’applique à présent à le faire bouger sur son excitante musique electro-pop-rock. Qui vous entraîne peu à peu, l’air de rien, dans une sorte de transe de dancefloor. La danse. La cadence. Mais sans oublier l’esprit, la pensée, la nécessité de questionner l’existence, pour mieux la saisir, pour ouvrir de plus en plus de portes. Rendre la machine organique. Comme un corps qui s’éveille. Pour qu’elle vibre et qu’elle vive à son tour.