Un Président tout en lumière pour éclairer la concertation

Ce qu’il faut de patience et de discipline pour donner corps à la démocratie participative aura dominé le Grand débat avant même qu’il ne commence. Une heure pile de retard sur un horaire particulièrement contrarié par le drame de la préfecture de police de Paris. Plus de 500 invités, lecteurs des journaux du Groupe La Dépêche, et une petite centaine de journalistes, tout en chuchotements religieux dans cette salle des fêtes pleine comme un œuf, attendent la délivrance : se lever et applaudir le chef de l’État et son haut-commissaire aux Retraites, Jean-Paul Delevoye. Chose faite à 19 h 30. Mais encore un peu de patience. Quelques minutes d’entretien en tête à tête, dans les coursives avec Olivier Biscaye, rédacteur en chef de Midi Libre qui va animer le débat. Comment on s’articule au démarrage ? Comment est l’ambiance dans la salle ? Prête à échanger, c’est évident, chacun est venu avec sa question, parfois aussi en famille.
Entrée dans l’arène. Le large sourire ne cache pas la gravité, Emmanuel Macron évoque le drame de Paris, le travail remarquable de ceux qu’il a pris le temps d’aller soutenir en début d’après-midi, l’enquête. Une minute de silence est observée. Fallait-il maintenir ce Grand débat, déjà reporté la semaine passée avec le décès de Jacques Chirac ? Le Président parle en clarté : oui il était important de venir et d’avoir cet échange, dans les territoires et en proximité. « Le débat est direct ici et permet de construire différemment la décision publique. C’est essentiel pour la vie de la Nation. Et la retraite est au cœur du pacte de la Nation pour elle-même ». Une introduction va clarifier tous les principes et les arguments d’une réforme devenue nécessaire, vrai « projet de société » qui appelle « concertation et co-construction ».

L’œil du cyclone

Le préalable posé, le débat suit son train, vif dans ses enchaînements, toujours posé dans un échange où la pédagogie du Président capte toutes les attentions. Emmanuel Macron prendra les questions par paquets de cinq, n’en éludera aucune. Les participants ont reçu avec bienveillance ces consignes d’Olivier Biscaye, qu’ils respectent. Les mains se lèvent, timides au début, plus franches ensuite. Et le micro circule alors entre les chaises disposées en cercles concentriques laissant le chef de l’État au centre de la salle, comme dans l’œil du cyclone, calme dans la tempête, balayer tous les regards en tournant sur lui-même. Il est au cœur du débat, parle au cœur de ceux qui lui confient leurs inquiétudes, leur soif de comprendre.

Prénoms, complicité et conviction

Emmanuel Macron leur répond en les interpellant par leur prénom noté à la hâte sur une feuille de papier. Un art consommé du dialogue en détente, en confiance, en séduction assurément. Il garde la veste, sa main gauche scande ses arguments. Les exemples fusent pour convaincre, expliquer à tout le moins le sens des choses, sans jamais faiblir. Fermeté dans les réponses quand un interlocuteur plaide pour le maintien de son régime spécial, ou quand une apostrophe politique se fait un peu trop agressive. Virulent parfois, rassurant toujours. Le public suit ce tourbillon des échanges conjugué ici ou là sur le ton de la complicité et rythmé par quelques rires francs et des applaudissements respectueux.
Deux heures de dialogue au compteur, on n’a pas vu le temps passer. Les mains se tendent toujours pour espérer une réponse. On continue. La nuit suffira-t-elle au débat ? Non. Mais d’autres rendez-vous sont au programme, lequel s’achève à Rodez sous la dictature horaire, à 23 h bien sonnées. La retransmission prend congé mais l’échange avec les participants se poursuit autour d’un buffet. Charme et pédagogie toujours au menu pour que l’exercice citoyen prolonge sa nuit.